Burundi : négociations sous haute tension à trois jours de la présidentielle

Les négociations entre acteurs de la crise burundaise, ouvertes mercredi à Bujumbura sous médiation ougandaise, se sont déroulées sous haute tension samedi au moment d’aborder les premiers sujets de fond, à moins de trois jours de la présidentielle dont l’opposition exige le report.

Pierre Nkurunziza, lors de sa campagne électorale à Bujumbura, le 26 juin 2015. © Landry Nshimiye/AFP

Pierre Nkurunziza, lors de sa campagne électorale à Bujumbura, le 26 juin 2015. © Landry Nshimiye/AFP

Publié le 19 juillet 2015 Lecture : 3 minutes.

Après avoir enfin fixé un ordre du jour, les délégués avaient entamé dans la matinée des discussions sur la « sécurité dans le pays et le retour des réfugiés ». Ces sujets sont jugés prioritaires par le camp présidentiel, confronté depuis trois mois à une contestation contre la candidature du président Pierre Nkurunziza à un troisième mandat que ses adversaires jugent contraire à la Constitution. Les violences qui ont émaillé les manifestations ont fait au moins 80 morts depuis la fin avril.

Le gouvernement a réussi à déjouer à la mi-mai une tentative de coup d’État militaire et à étouffer à la mi-juin des manifestations quasi-quotidiennes à Bujumbura par une brutale répression. Mais il a essuyé depuis une série d’attaques à la grenade et est confronté, depuis une semaine, à des combats et escarmouches entre armée et rebelles au nord du pays, dans la zone frontalière avec le Rwanda.

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Plus de 150.000 Burundais ont fui dans les pays voisins le climat pré-électoral délétère.

Les opposants d’être « tous des putschistes », selon le camp Nkurunziza

Au moment d’aborder dans l’après-midi le point n°2 de l’ordre du jour – le calendrier électoral contesté par les adversaires de M. Nkurunziza qui réclament l’annulation des législatives du 29 juin et le report sine die de la présidentielle de mardi -, le camp présidentiel a brandi un texte récemment publié, signé par plusieurs délégués de l’opposition et appelant au regroupement des opposants à M. Nkurunziza, tant de l’intérieur qu’en exil.

Selon plusieurs représentants du camp anti-Nkurunziza, qui ont rapporté séparément les mêmes propos, les délégués du gouvernement ont qualifié ce texte de « continuation du putsch » et accusé les opposants d’être « tous des putschistes », refusant de passer au point n°2. En cause, une phrase du texte disant que le futur Conseil « saura pleinement jouer le rôle qui lui incombe comme garant de la légalité et des institutions du Burundi ».

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« Il s’agit d’un subterfuge pour éviter d’aborder la question du calendrier électoral », a expliqué un représentant de la société civile, faisant état d’une « agressivité violente » du camp présidentiel et des « accusations extrêmes ».

« Manœuvres dilatoires », selon l’opposition

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Les discussions ont été suspendues puis ajournées à dimanche.

Agathon Rwasa, principal opposant à M. Nkurunziza, a dénoncé des « manœuvres dilatoires » pour repousser l’examen de cette question à après la présidentielle prévue mardi. M. Rwasa a beau rester « techniquement » candidat à cette élection, il en rejette par avance la tenue, exigeant son report et déniant au président Nkurunziza le droit de se représenter.

« Ils cherchent des prétextes pour ne pas passer au point n°2 », a renchéri l’ancien président Domitien Ndayiziye, qui a lui retiré cette semaine sa candidature, en compagnie de deux autres candidats, Sylvestre Ntibantunganya, autre ex-chef de l’Etat, et Jean Minani, président du parti Frodebu-Nanyuki (opposition).

Dans une lettre adressée au président de la Commission électorale, ils estiment que « l’environnement politique et sécuritaire dans lequel les élections sont organisées n’en garantit pas le caractère pluraliste, inclusif, libre, transparent ».

Outre MM. Nkurunziza et Rwasa, restent dans la course des candidats considérés comme des alliés du chef de l’État.

Les pays de la région ont mandaté, pour tenter de trouver une issue à la crise, le président ougandais Yoweri Museveni qui a ouvert les pourparlers mercredi, avant de passer le relais à son ministre de la Défense, Crispus Kiyong.

Les discussions ont un temps calé sur le refus du camp présidentiel – gouvernement et parti au pouvoir CNDD-FDD – de voir figurer au menu les questions controversées du calendrier électoral et du troisième mandat du président Nkurunziza.

Mais, sous la pression de la médiation, le camp présidentiel a finalement accepté que « tous les sujets » soient abordés.

Par ailleurs, l’Union africaine (UA) a accusé Bujumbura d’être responsable du retard pris dans le déploiement au Burundi – décidé le 13 juin – d’observateurs des droits de l’Homme et d’experts militaires pour respectivement surveiller les éventuelles violations des droits et vérifier le désarmement des « groupes armés », notamment des Imbonerakure, la Ligue de jeunesse du CNDD-FDD, qualifiée de « milice » par l’ONU.

« L’UA voudrait réitérer sa disponibilité à déployer immédiatement au Burundi » ces experts et observateurs, a indiqué samedi l’organisation, énumérant les obstacles successifs posés par les autorités burundaises.

Selon une source à l’UA, l’organisation souhaitait envoyer 70 observateurs et 50 experts militaires, mais le ministre burundais des Relations extérieures Alain-Aimé Nyamitwe a confirmé à l’AFP que Bujumbura n’avait donné son accord qu’à 15 membres de chacune des deux catégories et renvoyé sur l’UA la responsabilité du fait qu’ils ne soient pas arrivés.

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