L’incurie de l’État nigérian, pire que Boko Haram ?

Il y a quelques mois, le Nigeria élisait un nouveau président.

Des fillettes nigérianes ont fui Boko Haram et se sont réfugiées au Tchad, dans le camp de Baga Solo, ouvert en janvier 2015 et qui accueille plus de 6 000 réfugiés. © Jérome Delay/AP/SIPA

Des fillettes nigérianes ont fui Boko Haram et se sont réfugiées au Tchad, dans le camp de Baga Solo, ouvert en janvier 2015 et qui accueille plus de 6 000 réfugiés. © Jérome Delay/AP/SIPA

Fouad Laroui © DR

Publié le 20 juillet 2015 Lecture : 2 minutes.

La chose fut saluée, un peu partout, par des articles élogieux, optimistes, voire dithyrambiques, dont la teneur se résumait à cette affirmation, en anglais s’il vous plaît : Nigeria is back! Et puis on passa à autre chose, actualité oblige. Personne ne semble s’être avisé qu’il ne suffit pas de s’extasier parce qu’une élection a eu lieu, fût-ce dans un pays où les coups d’État sont plus fréquents que les consultations populaires, mais qu’il faut fixer au nouvel élu des objectifs clairs, précis et quantifiables : c’est sur cela qu’il faudra le juger, quatre ans plus tard. Que peut-on exiger de Mr Buhari ?

Faisons d’abord un flash-back. On se souvient de ces fillettes enlevées au Nigeria par les ignobles brutes de Boko Haram. Du monde entier s’élevèrent des cris d’indignation et ils n’ont pas cessé. Cependant, cette indignation ne semble pas s’exercer contre le Nigeria lui-même, alors qu’il se montre lamentablement incapable d’assurer la sécurité de ses citoyens. À la limite, on pourrait admettre qu’une bande organisée puisse réussir à kidnapper des enfants sans défense ; mais qu’un État n’arrive pas à mettre sur pied une armée digne de ce nom pour en finir avec des bandits, voilà qui montre l’incurie de cet État. Il dispose pourtant d’énormes rentrées de devises grâce à ses réserves de pétrole.

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Mais il y a pire. Un rapport de l’Unicef nous apprend que 40 % des enfants nigérians âgés de 6 à 11 ans ne vont pas à l’école. Parmi les petites filles, la proportion est encore plus importante. On estime à vingt millions les petites Nigérianes privées de toute instruction. Vingt millions !!!

Résumons-nous : les fanatiques de Boko Haram enlèvent deux cents fillettes parce qu’ils estiment que les femmes ne doivent pas être éduquées. L’État nigérian prive, par pure incompétence, vingt millions de gamines d’école. (N’oublions pas que Muhammadu Buhari a dirigé le pays du 31 décembre 1983 au 27 août 1985). Cet État incapable et corrompu est donc cent mille fois (!) plus nocif que les criminels de Boko Haram. Pourquoi personne n’ose-til faire ce simple petit calcul ?

L’objectif qu’on est en droit de fixer à Mr Buhari est donc simple : dans quatre ans, toutes les petites filles et tous les petits garçons du Nigeria devront être scolarisés. Si l’objectif est réalisé, on s’inclinera bien bas devant Mister President et on le proposera au prix Nobel de la paix. Sinon, une seule réponse : au piquet, le soi-disant éléphant de l’Afrique, avec un bonnet d’âne !

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