Gériatrie : le Sénégal ouvre la voie
Instituts spécialisés, gratuité des soins, tissu associatif… En matière de prise en charge et d’offre de soins pour les seniors, Dakar fait preuve de volontarisme.
Le vieillissement de la population n’épargne pas l’Afrique, loin de là. D’après les dernières statistiques de l’OMS, la majorité des personnes âgées de plus de 60 ans vivent dans les pays à revenu faible ou intermédiaire. Selon l’Institut national d’études démographiques (Ined), le nombre des seniors devrait quadrupler en Afrique entre 2010 et 2050, passant dans cet intervalle de 56 à 215 millions. Le continent comptera alors 22,5 millions de personnes âgées d’au moins 80 ans, soit cinq fois plus qu’aujourd’hui. Un constat qui a poussé le Sénégal à prendre les devants en lançant en 2006 le plan Sésame afin d’assurer la gratuité des soins dans les structures de santé publique aux personnes du troisième âge. Ciblées : les 70 % d’entre elles dépourvues de couverture sociale. « Le Sénégal est le seul pays africain à faire de la prise en charge des personnes âgées une priorité », résume le gériatre Ousseynou Ka.
Le défi de la formation
Pour remédier à la pénurie de gériatres, l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar propose une spécialisation depuis la rentrée dernière. Cette formation diplomante, en co-tutelle avec les universités Paris XIII et Joseph Fourrier à Grenoble, implique un stage obligatoire d’un à deux mois en France. Elle est accessible aux paramédicaux, qui en sortent avec une licence professionnelle après deux ans d’études.
Au niveau médical, un DU de gérontologie est ouvert aux médecins généralistes et un diplôme d’études supérieures (DES) de gériatrie est accessible aux spécialistes (cardiologues, urologues etc). Objectif : « avoir dans chaque centre de santé un infirmier licencié et un titulaire du DES de gériatrie dans chaque structure hospitalière », note Mamadou Coumé, maître-assistant en gériatrie gérontologie à l’Ucad. N.L.
Déploiement national
Cette politique volontariste est le dernier jalon d’une importance toute particulière accordée à la gériatrie. Dakar compte deux structures spécifiques : le centre médico-social de l’Institution de prévoyance retraite du Sénégal (Ipres) à Dakar et le centre de gériatrie et de gérontologie de Ouakam, à Dakar. Doté d’un budget annuel de 1,2 milliard de FCFA, le premier, crée en 1982, est un centre national de référence gérontologique qui reçoit quelque 60 000 patients par an, dont les deux tiers souffrent de pathologies chroniques : maladies cardio-vasculaires, hypertension artérielle, diabète etc.
Après avoir ouvert une antenne dans chaque région du pays, ce centre envisage de se déployer à l’échelle départementale à partir de 2013. Il s’agira alors de « contractualiser avec les centres de santé de ces départements afin de prendre en charge les retraités qui y vivent », précise son directeur, le Dr Mamadou Coumé. Créé par la ville de Dakar en 2003 pour la prise en charge médicale des personnes âgées, le centre de gériatrie et de gérontologie de Ouakam « a un budget annuel de fonctionnement compris entre 30 et 40 millions de FCFA », indique Abdoul Aziz Lô, le directeur de l’action sanitaire de la ville de Dakar.
Pour faciliter la prise en charge des Dakarois du troisième âge, la mairie a mis en place en 2010 la coordination des associations des personnes âgées de la ville de Dakar (CAPA/VD), qui regroupe une trentaine d’associations et compte plus de 4 000 membres. Autre acteur du secteur : la Fondation Sonatel qui « contribue à hauteur de 7 à 10 millions par an à la prise en charge des médicaments des personnes âgées. Mais également en équipements comme l’achat de fauteuils dentaires, d’ambulances etc. », souligne Ousseynou Ka. Après la prise en charge des personnes âgées, reste à former des gériatres, le Sénégal n’en comptant que six et la population âgée devant atteindre 11 % en 2015 d’après les prévisions de l’Agence nationale de la statistique et de la démographie.
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