Agathon Rwasa : « Nous siégeons au Parlement burundais pour ne pas décevoir ceux qui nous ont fait confiance »

Le 27 juillet, le principal opposant burundais, Agathon Rwasa, s’est rendu à l’Assemblée nationale pour occuper son siège de député. Une décision qui en a surpris plus d’un, après le combat qu’il a mené contre Pierre Nkurunziza.

Agathon Rwasa, à Bujumbura, en août 2013. © Esdras Ndikumana/AFP

Agathon Rwasa, à Bujumbura, en août 2013. © Esdras Ndikumana/AFP

Publié le 30 juillet 2015 Lecture : 3 minutes.

Des critiques et des accusations de trahison fusent de toutes parts depuis que le leader des Forces nationales de libération (FNL), Agathon Rwasa, a décidé, le 27 juillet, de finalement siéger à l’Assemblée nationale du Burundi. Il a contesté les résultats des derniers scrutins, législatifs et présidentiels, qui se sont tenus en juin et en juillet dans un contexte très tendu au Burundi. Il explique à Jeune Afrique les raisons de sa décision.

Jeune Afrique : Vous n’avez cessé de contester les résultats des dernières élections et aujourd’hui vous occupez votre siège au Parlement.  Quelles sont les raisons de ce revirement ?

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Agathon Rwasa : Nous ne croyons pas aux résultats qui ont été proclamés par la Commission nationale indépendante (Ceni), parce qu’ils reflètent beaucoup plus une fabrication pure et simple de la part du gouvernement de Nkurunziza que les réelles aspirations de la population. Néanmoins l’Assemblée nationale reste une institution dédiée aux citoyens. Nous ne pouvons pas décevoir leurs doléances et il faut qu’ils soient représentés. Pas seulement ceux qui ont voté pour nous, d’ailleurs mais aussi tous ceux qui ont contribué à empêcher la situation de s’envenimer ces dernières semaines.

Avez-vous subi des pressions de la part du pouvoir ou de la médiation internationale pour intégrer l’Assemblée ?

Nous sommes dans un processus politique qui a connu des caractéristiques très particulières. Qu’on le veuille ou non, le forcing électoral de Nkurunziza et de son parti a très bien réussi. Nous nous retrouvons devant le fait accompli et il faut réagir d’une façon appropriée. Au lieu de nous isoler complètement, il me semble plus judicieux de conserver une tribune qui nous permette d’exprimer nos points de vue. À l’Assemblée, nous pourrons réclamer nos droits, et notamment la réhabilitation de notre parti, le FNL. Nous pourrons continuer à faire de la politique. L’Assemblée nationale, même mal élue, est un endroit privilégié pour défendre notre cause.

Que répondez à ceux qui vous accusent d’avoir trahi votre promesse de ne pas intégrer un gouvernement basé sur des élections que vous avez vous-même qualifiées de « mascarade » ?

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Je n’ai trahi personne ! Je le répète, moi et les membres de mon parti n’avons trahi personne parce que nous sommes mandatés par les Burundais. On n’avait aucun pacte avec qui que ce soit. Notre engagement était de faire de la politique au nom d’une partie des Burundais. Ceux-ci se sont exprimés et nous ont envoyés les représenter à l’Assemblée nationale.

Contrairement à d’autres, la situation a toujours été délicate pour moi et mes proches. En 2010, nous avons dénoncé d’autres élections irrégulières et nous avons ensuite été menacés. Nos militants ont été emprisonnés et même tués. Nous refusons de revivre le même calvaire.

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Par ailleurs, le parti au pouvoir a tendance à toujours réussir à se fabriquer des alliés de ‘’paille’’. En 2010, cette stratégie a fini par diviser complètement notre parti. Faudrait-il encore une fois leur offrir cette aubaine ?

Votre allié, Charles Nditije, a vertement critiqué votre décision de siéger. Est-ce que la Coalition es indépendants de l’espoir, que vous avez formée avec lui, est menacée ?

Les années précédentes, l’Uprona [le parti de Nditije, ndlr] était à l’hémicycle mais nous n’y étions pas. Cela ne nous a pas empêché de travailler ensemble. Aujourd’hui, l’inverse est possible. Sans compter qu’il est encore trop tôt pour savoir si nos alliés ne vont pas, eux aussi, venir siéger à nos côtés finalement. Ils ne pourront être remplacés que s’ils totalisent le tiers des absences. Je pense que ceux qui se disent aujourd’hui farouches pourraient bien, après mûre réflexion, nous rejoindre à Kigobe [siège du parlement à Bujumbura, ndlr].

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