Guinée : Conakry dévastée par des pluies diluviennes
Conakry est frappée depuis le 24 juillet par des pluies torrentielles qui ont provoqué la mort d’au moins quatre personnes. Les populations se plaignent du manque de réaction des autorités, et la saison des pluie n’est pas terminée.
Le ciel de Conakry n’était toujours pas dégagé, ce mercredi 29 juillet, mais les pluies diluviennes qui ont fait quatre morts ces derniers jours, selon un bilan provisoire, semblaient en voie de s’estomper – au moins provisoirement. Au secteur Tombo 1 dans la presqu’île de Kaloum, souvent inondée, les concessions ont été totalement envahies par les eaux. Partout, les populations profitaient de l’accalmie pour sécher leur linge, mais aussi réitérer leurs cris de détresse.
« Nous souffrons beaucoup. Nous appelons les autorités à nous venir en aide », lance Mme Keita et la plupart de ses voisins. Le chef de secteur, Ansoumane Bangoura, se repose sous un hangar autour d’un thé avec ses amis. « Depuis plus de six ans, à chaque saison des pluies, il y a des inondations. Chaque fois, la presse passe, mais il n’y a pas de réactions des autorités… Les congélateurs, les postes téléviseurs, tous sont imbibés d’eau. Nous passons la nuit débout. »
Ironie du sort, Tombo abrite justement la direction nationale de la protection civile, dont l’action est jugée insuffisante par les populations. Le colonel Cécé Haba, directeur régional de ce service public se défend : « Tous les canaux d’évacuation des eaux de ruissellement sont bouchés par les populations qui y déversent des ordures. (.. .) Kaloum est entourée par la mer. Les caniveaux servent à évacuer les eaux. Les populations en ont fait des dépotoirs et voilà les conséquences. »
Manque de moyens
De fait, la protection civile intervient quand il y a sinistre. « S’il y a des blessés nous sommes obligés d’intervenir, poursuit Cécé Haba. C’est le cas à Kobayah, où un véhicule a été emporté par les eaux. Les corps des trois personnes qui étaient à son bord ont été déposés à la morgue de l’hôpital Donka. Un troisième corps en décomposition a été retrouvé avant-hier à Coléah. Mais en cette période d’Ebola, on hésite à intervenir quand nous ne sommes pas avec la Croix rouge, habilitée à gérer les corps ». Et si l’enceinte de la direction nationale de la protection civile est remplie de véhicules, l’essentiel manque. « On a besoin de motopompes et de vide-caves pour évacuer les eaux dans les concessions », déplore le colonel.
« Conakry est l’une des capitales les plus pluvieuses du monde et fait partie des foyers orageux les plus intenses », rappelle le directeur national de la météorologie, Mamadou Lamine Bah. « Au total, il a été recueilli en 72h à la station météorologique de l’aéroport de Conakry 450 mm (450 litres par mètres carrés), selon le bulletin météo publié lundi. Soit la quantité de pluie habituellement enregistrée les 11 derniers jours du mois de juillet. »
« Ce n’est pas fini »
En dépit des dégâts provoqués par ces pluies torrentielles, le record de 471,8 mm, enregistré en 24 h le 16 juillet 1991, n’a pas été battu, selon la direction nationale de la météorologie, qui annonce des journées ensoleillées pour la fin de semaine. « Mais ce n’est pas fini, prévient Mamadou Lamine Bah. Les perturbations se succèdent à des intervalles de 24h. » La saison des pluies en cours a été marquée pas des phénomènes particulièrement violents à Conakry. Outre les inondations, la capitale a été secouée, entre fin mai et début juin, par le passage de tornades. Les installations de quatre radios privées et une partie de la toiture du deuxième stade de la ville (non encore inauguré) ont également été détruites par la foudre.
« À cause du changement climatique, notre continent est surchauffé. L’air monte facilement et la vapeur d’eau avec », reprend Mamadou Lamine Bah, non sans dénoncer les constructions anarchiques qui pullulent parfois jusque dans le lit des cours d’eau, comme à Kakimbo (commune de Ratoma). De son côté, Lousény Camara, ministre de la Ville et de l’Aménagement du territoire, dit attendre le rapport de ses agents sur le terrain pour aviser.
Comme l’action des autorités, la fiabilité de la météo guinéenne est critiquée par les populations. Ce qu’admet Mamadou Lamine Bah, qui répond que cela n’est pas un problème propre qu’à la Guinée. « Les phénomènes naturels sont difficiles à saisir », dit-il, rappelant que son service manque aussi de moyens, d’équipements et de personnel qualifié. « Notre budget est secret, car si je vous dit qu’il est égal à zéro, vous ne me croiriez pas… ».
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