Homosexualité : un journaliste sénégalais emprisonné pour « actes contre nature » estime avoir été piégé

Accusé de pédophilie par un jeune garçon, le journaliste sénégalais, Tamsir Jupiter Ndiaye, a été innocenté de ce chef d’inculpation mais condamné vendredi 31 juillet à six mois de prison pour homosexualité (ou « actes contre nature »).

Le Palais de justice de Dakar. © AFP

Le Palais de justice de Dakar. © AFP

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Publié le 5 août 2015 Lecture : 2 minutes.

Arrêté le 24 juin et détenu depuis lors, Tamsir Jupiter Ndiaye, était accusé d’actes contre nature, pédophilie et conduite en état d’ébriété. Innocenté des deux derniers chefs, il écope néanmoins d’une peine de six mois de prison pour actes contre nature.

Le journaliste risquait, en vertu de l’article 319 alinéa 3 du code pénal, jusqu’à cinq ans d’emprisonnement et 2 500 dollars d’amende, la peine maximale pour homosexualité au Sénégal.

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Pourtant, l’enquête, en l’absence de reconstitution des faits par la police ne s’appuie en réalité que sur les versions (opposées) du jeune garçon et du journaliste.

Deux versions opposées

Le jeune garçon prétend que le journaliste, à qui il avait demandé son chemin dans Dakar, l’aurait emmené en voiture, lui aurait touché le sexe et l’aurait forcé à pratiquer une fellation.

Tamsir Jupiter Ndiaye affirme de son côté avoir été piégé. Il se serait, selon lui, arrêté à une station-service, où il aurait été témoin d’une altercation entre jeunes. S’étant interposé, il aurait proposé à l’un d’eux, la victime présumée, de l’exfiltrer.

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Il se serait ensuite retrouvé poursuivi par la bande de jeunes et, prenant peur, aurait trouvé refuge dans un commissariat de Dakar, non sans avoir constaté le vol de son téléphone portable, dont la victime présumée et exfiltrée a ensuite reconnu être coupable.

Des accusations portées par vengeance ?

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Selon la presse sénégalaise, les accusations de viol du jeune homme ne seraient survenues qu’après que la police a retrouvé dans la poche du garçon le téléphone qu’il avait subtilisé. Simple calomnie motivée par la vengeance ? La thèse n’a visiblement pas convaincu le tribunal de Dakar le 31 juillet lors du procès qui avait déjà plusieurs fois été reporté.

Pour Me Khoureyssi Ba, avocat de la défense, qui s’exprimait à l’issue du procès, « les faits ne sont pas clairement établis ». « Cette affaire est un défi au Droit, […] une offense faite à la présomption d’innocence », a-t-il ajouté, estimant que la victime présumée était vraisemblablement un enfant de la rue, qui vit d’escroqueries.

Un débat plus vaste

Tamsir Jupiter Ndiaye, ancien chroniqueur de « Nouvel horizon » ne se remettra peut-être pas de ce jugement. Il avait en effet déjà fait la une des journaux en 2012, alors qu’il avait été condamné à deux ans d’emprisonnement, pour actes d’homosexualité et détention illégale d’armes. Libéré en 2013 par effet de la grâce du ministère de la Justice, il avait perdu son travail et affirme aujourd’hui que sa famille a été détruite.

Son procès avait en effet beaucoup fait parler au Sénégal, où conservateurs et religieux y avaient vu le moyen de réaffirmer leur opposition à une hypothétique dépénalisation de l’homosexualité. Les peines pour homosexualité sont relativement rares au Sénégal mais pas inexistantes.

En octobre 2014 notamment, deux jeunes hommes, Billa Ba et Alassane Thioye, ont été reconnus coupables d’actes contre nature et condamnés respectivement à cinq et deux ans de prison ferme. Ils avaient, selon les accusations, été « surpris » dans leur chambre en plein ébat sexuel. « Élément aggravant » à l’époque : du lubrifiant avait été découvert dans les bagages de l’un des deux accusés.

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