Guinée-Bissau : turbulences au sommet de l’État

Malmené par des décennies de coups d’État et de violences politiques, la Guinée Bissau est à nouveau au bord d’une crise institutionnelle.

Le président José Mario Vaz et sa femme, en août 2014, lors du sommet de Washington. © Susan Walsh/AP/SIPA

Le président José Mario Vaz et sa femme, en août 2014, lors du sommet de Washington. © Susan Walsh/AP/SIPA

Publié le 12 août 2015 Lecture : 3 minutes.

La tension politique en Guinée-Bissau est monté d’un cran depuis une semaine. En cause, la mésentente entre les deux hommes forts du pays : le président José Mario Vaz et son Premier ministre Domingos Simões Pereira, également à la tête du puissant parti au pouvoir, le Parti africain pour l’indépendance de la Guinée et du Cap-Vert (PAIGC).

Si la discorde entre les deux hommes, issus du même parti, est notoire, la tension a atteint son paroxysme jeudi 6 août, lorsque le Premier ministre a annoncé que le président avait l’intention de destituer son gouvernement. « Le président m’a dit qu’il ne me faisait plus confiance. De nombreuses tentatives ont été faites pour résoudre le différend, mais [il] a maintenu sa position de dissoudre le gouvernement », précisait Domingos Simões Pereira vendredi.

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Le président reprocherait à son Premier ministre un manque de communication, et souhaiterait aussi le départ de certains ministres, dont celui des Affaires étrangères. Un limogeage qui entraînerait la destitution du gouvernement, formé à l’été 2014 après une période de transition de deux ans, consécutive au coup d’État de 2012.

Silence radio du président

Depuis l’annonce faite par le premier ministre, les réunions se multiplient pour empêcher une énième crise politique, dont les soubresauts malmènent le développement du pays depuis son indépendance en 1974. Pour déminer le terrain, le président sénégalais Macky Sall a donc invité José Mario Vaz à Dakar vendredi. Une réunion à laquelle participait également Apha Condé, en visite au Sénégal.

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De retour dimanche en Guinée-Bissau, José Mario Vaz a promis de s’adresser au pays dans les jours à venir. Depuis, silence radio. Car si le président semble, selon l’entourage du Premier ministre, camper sur ses positions, sa décision suscite une forte opposition.

La société civile, qui s’était déjà alarmée de la mésentente entre les deux hommes, a de nouveau plaidé contre une dissolution. Tout comme les partisans du Premier ministre, qui manifestent depuis le début de la crise devant le palais présidentiel.

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L’aide financière internationale menacée ?

Mais le principal coup de semonce est venu de l’ancienne puissance coloniale, le Portugal. Mardi, Lisbonne a menacé de suspendre l’aide financière en cas de nouvelle crise politique. Sans « un fonctionnement démocratique normal, il serait extrêmement difficile pour la communauté internationale de continuer à procurer la coopération et le soutien dont la Guinée-Bissau a besoin », a tranché Rui Machete, le ministre portugais des Affaires étrangères.

L’enjeu est de taille. En mars, à la faveur d’une stabilisation politique, les bailleurs internationaux s’étaient engagés à accompagner le développement du pays à hauteur d’un milliard d’euros.

Une dissolution impopulaire 

Face aux conséquences politiques et économiques qu’une nouvelle crise pourrait entraîner, la position de José Mario Vaz suscite l’incompréhension. « Cette crise n’avait pas lieu d’être », regrette l’ancien candidat à l’élection présidentielle Paolo Gomes. « Il était nécessaire que le président veille à consolider la stabilité politique, il faut qu’il calme le jeu », espère l’économiste.

« IUn gouvernement doit enfin pouvoir aller au bout de son mandat », plaide de son côté la ministre de la Justice, Carmelita Pires. « Il ne s’agit pas de se positionner pour ou contre le président ou le Premier ministre, il s’agit de restaurer la stabilité politique », demande Carmelita Pires, qui fait partie des ministres d’ouverture invités au sein du gouvernement Domingos Simões Pereira.

Une opinion partagée par le Parti de la rénovation sociale (PRS), deuxième force politique du pays, également invité dans le gouvernement d’union. « Si le gouvernement tombe, tout est compromis », déplore Victor Pereira, porte-parole du PRS. « Nous sommes contre une dissolution, car cela va à l’encontre des efforts de paix et de stabilité. Il faut que le PAIGC règle ses problèmes internes », poursuit-il.

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