Banque d’affaires : Kamel Lazaar entre Riyad et Tunis
Kamel Lazaar, fondateur de Swicorp, banque d’affaires basée en Arabie saoudite, pilotera la cession de Carthage Cement, l’une des entreprises confisquées au clan Ben Ali-Trabelsi.
L’heure de vendre les entreprises du clan Ben Ali-Trabelsi confisquées par l’État tunisien après la révolution est venue. Une perspective de rentrées d’argent bienvenue pour le gouvernement, qui craint de manquer de fonds pour relancer l’économie. Et de quoi faire saliver les banques d’affaires, sevrées de gros contrats par un contexte international morose. Fondé par le financier tuniso-suisse Kamel Lazaar, Swicorp a emporté fin août, à la barbe de BNP Paribas et Rothschild, l’un des lots les plus convoités : la gestion de la cession de 37 % du capital de Carthage Cement, une part estimée à 105 millions d’euros. « Une marque de confiance, car le processus d’attribution de ce contrat a été particulièrement transparent », souligne Lazaar. Preuve que vingt-cinq ans après sa création, la société, qui gère par ailleurs 1,3 milliard de dollars (1 milliard d’euros) d’actifs, fait partie des acteurs de référence en matière de conseil financier dans la région.
Pour convaincre nos clients,
il faut personnaliser nos propositions d’investissement.
Immobilier
Après une première carrière au sein de Citigroup, où il occupe le poste de vice-président Europe et Afrique du Nord, Kamel Lazaar implante d’abord Swicorp en Suisse, avant d’ouvrir en 1992 une antenne en Arabie saoudite. « L’immense majorité des fonds qui me sont confiés vient des pays du Golfe », explique-t-il. En 2006, l’institution financière installe son quartier général à Riyad et est l’une des premières à obtenir une licence de banque d’affaires dans le royaume. Outre leurs activités de capital-investissement, ses équipes conseillent l’État saoudien dans la diversification de ses ressources et participent avec plusieurs institutions publiques au montage de projets immobiliers d’envergure, notamment Knowledge Economic City, à Madinah, dont la capitalisation boursière est de 1,6 milliard de dollars.
C’est en revanche essentiellement dans les pays du pourtour méditerranéen que Swicorp investit l’argent de ses clients. Il détient par exemple une partie du capital du distributeur algérien de lubrifiants Petroser, du fabricant turc de tapis contemporains Stepevi ou encore du leader tunisien de l’emballage, Altea Packaging. L’établissement a également accompagné au cours des années 2000 les multinationales Savola, Henkel et Danone lors d’investissements en Algérie et au Maroc. Des activités fructueuses qui ont permis à Swicorp d’amasser 200 millions de dollars de fonds propres.
Mais faire des affaires en Afrique du Nord comporte toujours une part de risque. En 2011, à la surprise des observateurs, le financier a été évincé par la Banque d’Algérie du tour de table d’Ijar Leasing Algérie, qu’il avait lui-même élaboré. Un revers douloureux qui a poussé Kamel Lazaar à mettre ses activités en veille dans le pays, même s’il assure garder un oeil sur de possibles opportunités.
Présence locale
Pour gérer son portefeuille, Swicorp a délocalisé dès 2003 une partie importante de ses 100 collaborateurs à Tunis. Une implantation dont le patron espère plus que jamais tirer profit. « Avec le Printemps arabe et la crise européenne, lever de l’argent pour le placer dans des fonds est difficile. Pour poursuivre notre croissance, il faut personnaliser les propositions d’investissement faites à nos clients et il est plus facile de repérer de bonnes affaires en étant présent localement », estime-t-il.
À 60 ans, le banquier n’entend ni ralentir ni passer la main. « Un de mes enfants travaille sur les produits dérivés à Londres, mais rien ne dit qu’il prendra ma suite. Ne pas mélanger l’actionnariat et le management est la meilleure façon d’inscrire une entreprise dans la durée », insiste le financier, qui reste l’actionnaire de référence de Swicorp. Et quand il s’agit de se ressourcer, Kamel Lazaar travaille avec sa fille, experte chez Sotheby’s, à promouvoir l’art contemporain arabe au travers de sa fondation. Initié à la peinture par un descendant du peintre flamand Rubens, le patron jure qu’alors il ne parle plus d’argent.
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