Afrique du Sud : les attaques contre les fermiers ne visent plus seulement les Blancs
En Afrique du Sud, un fermier a deux fois plus de chance de se faire tuer qu’un policier. Un métier à haut risque, y compris pour les Noirs qui, vingt ans après l’abolition de l’apartheid, sont un peu plus nombreux à prendre la tête des exploitations agricoles du pays.
C’est un problème récurrent depuis la fin de l’apartheid et le bilan que dresse la Commission sud-africaine des droits de l’homme qui a rendu son rapport ce mois-ci au gouvernement est loin d’être brillant.
En 2014, le ministère de l’Intérieur sud-africain a relevé pas moins de 500 attaques contre des exploitations agricoles. Au total, ce sont 58 agriculteurs qui ont été assassinés. C’est de loin le taux d’homicide le plus élevé du pays par catégorie professionnelle – 132,5 pour 100 000 personnes contre 31,1 en moyenne.
Leur nombre a été divisé par deux depuis 1990, mais les chiffres demeurent très élevés et ils ont tendance à stagner ces dernières années.
Les fermiers sont des « proies faciles »
« Les propriétaires fermiers représentent des proies faciles », commente Johan Burger, spécialiste des questions de criminalité à l’Institute for Security Studies (ISS), interrogé par Jeune Afrique. « Ils sont généralement isolés et perçus comme gagnant très bien leur vie. Alors que ce sont des gens ordinaires. »
« Tout le monde est potentiellement victime »
Contrairement aux idées reçues, les Blancs ne sont pas les seules victimes de cette violence, insiste le rapport de la commission qui exclut tout « motif raciste ».
« 90 % de ces attaques sont purement criminelles et sont motivées par l’argent », explique Johan Burger. « Tout le monde sur la ferme est une victime potentielle », ajoute l’expert, les propriétaires comme leurs ouvriers agricoles et leurs familles. Déjà en 2003, un précédent rapport de la commission révèle que le tiers des victimes de ces attaques étaient noires.
Le manque d’implication du gouvernement
Pour remédier à l’insécurité ambiante, un grand nombre de propriétaires se sont offerts les services de compagnie de sécurité privée.
La frilosité du gouvernement sud-africain à s’impliquer davantage sur ce dossier s’explique par le fait qu’ « il ne souhaite pas être vu comme trop protecteur envers les gros agriculteurs où dominent principalement les Blancs », ajoute Johan Burger.
Une vision « trop restrictive », selon l’expert, d’autant plus que, ces dernières années, « de plus en plus de propriétaires noirs font l’objet d’attaques ».
L’Afrique du Sud compte environ 40 000 exploitations agricoles et l’agriculture est l’un des secteurs clés de son économie. Certains craignent qu’à terme, le maintien d’un tel niveau de criminalité décourage les jeunes à exercer ce métier.
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