Rwanda : la nouvelle zone piétonne de Kigali fait le bonheur des piétons et le malheur des taxis
Depuis une semaine, une zone interdite aux voitures a été mise en place dans le centre de Kigali. Seuls les piétons sont désormais autorisés à occuper le boulevard KN4, la rue la plus commerciale de la capitale rwandaise. Une initiative rare dans les villes africaines.
Un espace vert, des stations de repos et du wifi gratuit ont remplacé depuis lundi 24 août les vrombissements des voitures et des motos sur le boulevard KN4, dans le quartier de Nyarugenge, en plein centre de Kigali. Si les zones piétonnes se multiplient dans les métropoles occidentales (une partie du boulevard Anspach vient d’être fermé à la circulation à Bruxelles), leurs consoeurs africaines sont encore rares à avoir franchi le pas. Mais pour Kigali qui se prétend moderne et accueillante, il fallait justement prouver qu’on pouvait être à la hauteur d’autres villes « comme Bruxelles, Paris ou New York », nous a affirmé le maire, Fidèle Ndayisaba.
Poursuivant un plan de modernisation de la capitale, le gouvernement rwandais a préconisé des espaces exclusivement piétons. « Une ville est faite pour les gens, pas pour les voitures », a déclaré aux médias rwandais Luben Ahimbisibwe, directeur de l’infrastructure urbaine.
Du nord au sud de Kigali, à partir de l’école belge jusqu’au building Centenary House, le boulevard KN4, le plus emprunté du centre ville, est donc désormais interdit aux voitures sur environ 800 mètres.
Les piétons revivent : en plus de respirer un air moins pollué sur le boulevard, ils se sentent libérés du stress pour traverser la route. » Je n’étais jamais rassuré pour aller au trottoir d’en face, mais maintenant je peux traverser les yeux fermés », explique l’un d’entre eux.
Et la « car free zone » a déjà laissé place à l’imagination et à la joie des passants.
Des commerçants moins ravis
Mais le site identifié pour cette « car free zone » est aussi l’un des carrefours les plus commerciaux de la capitale rwandaise. La Banque de Kigali (KB) et le building Centenary House – qui héberge, entre autres, le supermarché Simba, des compagnie d’assurance, des pharmacies ou encore des restaurants -, constituent le dispositif commercial le plus couru de Kigali.
Auparavant, tous les usagers et employés de ces services avaient le droit de se garer au pied des immeubles. Désormais, ils bataillent pour chercher des parkings aux alentours.
» Imaginez si j’ai une somme de 10 millions à déposer à la banque de Kigali, je ne me sentirai pas en sécurité d’y aller à pied », nous explique Frank Maza, un entrepreneur. » Nous allons perdre beaucoup de clients à cause de cette interdiction de circuler en voitures dans ce secteur », s’indigne un agent de la banque panafricaine Ecobank.
Certains enseignes, comme la banque commerciale kényane basée à Kigali, avaient pour leur part pris des précautions et averti leurs clients que des places de parkings ont été réservées pour eux en-dehors de la zone piétonne.
https://twitter.com/KCBRwanda/status/635822181784649728
Des taxis ronchons
Pour faire respecter l’interdiction de circulation, la police a déployé de nombreux agents en plus des panneaux routiers déjà installés. Les taxis ne sont évidemment pas les plus ravis de l’initiative.
« Je suis obligé de faire un énorme détour pour rapprocher mes clients de la zone interdite », confie Éric, un moto-taxi. « Et nous sommes obligés de marcher encore 500 mètres alors que nous avons payé la course entière », se révolte un client.
Selon la mairie, qui n’a pas l’intention de céder aux réclamations des automobilistes, la nouvelle « car free zone » n’est que le début d’un vaste programme urbain.
Depuis 2002, les autorités se sont doté d’un outil de planification performant intitulé Vision 2020, visant au développement de la ville. » L’objectif est de créer un centre urbain moderne et dynamique pour améliorer l’image, l’attractivité touristique ainsi que l’économique de Kigali », a précisé à Jeune Afrique Fidèle Nsabimana. Avant d’ajouter que pour la zone piétonne, iil restait encore « à aménager l’endroit avec des bancs publics pour le transformer en réel poste de repos ». Viendront ensuite les initiatives culturelles et artistiques (concerts et festivals) qui devraient achever de persuader les Kigalinois du bien-fondé de la décision.
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