Football en Mauritanie : pour Moussa Bagayoko, leur capitaine, « les Mourabitounes sont devenus crédibles »
Le capitaine des Mourabitounes, l’équipe nationale, a vu le football mauritanien considérablement évoluer ces dernières années. Même si beaucoup reste à faire.
Jeune Afrique : Pourquoi n’avez-vous jamais quitté la Mauritanie, comme beaucoup de joueurs qui y sont nés ?
Moussa Bagayoko : Tout simplement parce que pendant des années, personne ne s’intéressait au football mauritanien ! La sélection nationale ne jouait pratiquement pas, les clubs ne participaient pas aux coupes d’Afrique, le championnat n’était pas très bien organisé… Donc les recruteurs ne venaient quasiment jamais. Je pense qu’à l’étranger, on se demandait même si on jouait au foot en Mauritanie. En ce qui me concerne, j’ai eu quelques opportunités d’aller en Afrique du Sud, mais cela ne s’est jamais fait. C’est aussi le cas pour d’autres joueurs mauritaniens. Et puis, pendant longtemps, les rares agents ou recruteurs qui venaient n’étaient pas tous très honnêtes.
Vous jouez à l’Asac Concorde, l’un des meilleurs clubs de Nouakchott et du pays. Vous considérez-vous comme un joueur professionnel ?
Je ne fais que cela et je ne vis que du football. Donc j’ai le rythme d’un professionnel. Je m’entraîne presque tous les jours, parfois deux fois dans la même journée. Le club me verse un salaire, par contre je n’ai pas d’avantages en nature, comme un logement ou une voiture. C’est à moi de payer. Mais je ne me plains pas, je vis correctement.
En Mauritanie, il y a des joueurs qui touchent des salaires intéressants. Cela peut aller jusqu’à 500 euros par mois. Mais cela reste rare. Certains sont obligés d’avoir un emploi à côté, car ce qu’ils gagnent en jouant au foot n’est pas suffisant pour en vivre.
L’organisation des clubs est-elle devenue plus professionnelle ?
Cela dépend du club. Concorde, le FC Nouadhibou, Tevragh-Zeina, l’ASC Police ou l’AS Garde nationale sont plutôt bien organisés car ils ont des moyens plus importants qu’ailleurs. Certains disposent d’un médecin, qui peut soigner les joueurs blessés. Mais il y a beaucoup de choses à améliorer. Au niveau médical, mais aussi par exemple sur le plan de l’alimentation des joueurs. À Concorde, il est très rare que les joueurs mangent tous ensemble, avec un menu adapté.
Les Mauritaniens s’intéressent plus qu’avant au championnat et à la sélection nationale
La sélection nationale constitue-t-elle une vraie locomotive pour le foot mauritanien ?
Oui. C’est au sein de la sélection que le cadre est le plus professionnel. Beaucoup de choses ont changé depuis 2011 et l’arrivée de nouveaux dirigeants à la tête de la fédération, grâce aussi à Patrice Neveu [sélectionneur de 2012 à 2014] et à Corentin Martins, qui lui a succédé.
Au niveau des déplacements, des soins, de l’hébergement et des primes, tout est devenu plus sérieux. Les joueurs sont mis dans de bonnes dispositions pour travailler. Pour nous, joueurs locaux, c’est un vrai plus. Et pour les internationaux qui sont en Europe, ils évoluent dans un cadre qui rappelle celui de leur club. Si la Mauritanie s’est qualifiée pour le Championnat d’Afrique des nations (Chan) 2014 [sa première compétition internationale], ce n’est pas par hasard…
Cette amélioration du niveau du championnat national pourrait-elle favoriser l’exil des meilleurs joueurs ?
Je pense que les meilleurs partiront, en Europe ou dans des pays comme la Tunisie, le Maroc ou l’Algérie. Personnellement, j’espère toujours jouer à l’étranger, même si j’ai déjà 31 ans… Le football mauritanien est devenu plus crédible, on s’intéresse un peu plus à lui, la sélection obtient des résultats intéressants. Par contre, les clubs sont trop peu présents en coupes d’Afrique. Ils n’y participent quasiment jamais pour des raisons financières, et c’est un problème pour l’exposition des joueurs au niveau international.
Avez-vous l’impression que l’intérêt pour le football en Mauritanie a augmenté ces dernières années ?
Les Mauritaniens ont toujours adoré le football. Ils s’intéressent plus qu’avant au championnat et à la sélection nationale. Et au niveau médiatique, j’ai remarqué que davantage de gens écrivent sur le foot depuis trois ou quatre ans. Les journalistes, mais aussi de nouveaux des blogs consacrés au foot, on en parle aussi beaucoup sur les réseaux sociaux.
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