La bourse du Caire encore convalescente

Lourdement affecté en 2011 par la révolution, le marché voit ses indicateurs repartir à la hausse. Mais la menace d’une dévaluation plane sur cette reprise fragile.

Les investisseurs étrangers n’ont pas encore fait leur retour sur l’Egyptian Exchange. © Amr Nabil/AP/SIPA

Les investisseurs étrangers n’ont pas encore fait leur retour sur l’Egyptian Exchange. © Amr Nabil/AP/SIPA

ProfilAuteur_ChristopheLeBec

Publié le 5 septembre 2012 Lecture : 3 minutes.

La Bourse égyptienne a du mal à remonter la pente, après une année 2011 révolutionnaire qui lui a valu un bilan catastrophique. Pour mémoire, la capitalisation de la place avait baissé de 40 % l’an passé, ce qui l’avait fait rétrograder du deuxième au troisième rang sur le continent, derrière les Bourses de Johannesburg et de Casablanca. Lors de cette année noire, son indice de référence, l’EGX 30 (basé sur les trente valeurs les plus importantes), s’était effondré de 49 %. Les cours des secteurs particulièrement affectés, comme l’immobilier, le tourisme et la finance, avaient atteint des profondeurs abyssales, perdant environ 60 % par rapport à 2010.

Depuis le début de l’année 2012, la Place qui rassemble les deux plus anciennes Bourses du monde arabe, Alexandrie et Le Caire, a repris timidement des couleurs, mais elle n’a pas encore retrouvé son lustre d’antan. Au 22 août, l’EGX 30 avait progressé de 43 %, mais cette hausse paraît encore bien fragile aux analystes, avec un cours en dents de scie. Si, de janvier à son plus haut du 7 mars, il a crû de 51 %, il s’est ensuite effondré de 24 % jusqu’à l’élection du président Mohamed Morsi, saluée par une forte hausse de 7,6 % lors de la seule journée du 25 juin. La capitalisation boursière, d’environ 47 milliards d’euros à la mi-août 2012, reste encore inférieure de 28 % à la période prérévolutionnaire.

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« Aux yeux des investisseurs, l’avenir paraît sombre tant que la stabilité politique ne sera pas assurée sur le long terme, avec une révision de la Constitution, l’élection d’un nouveau Parlement, et surtout une feuille de route économique claire », estime Magda Kandil, chercheuse au Centre égyptien d’études économiques (ECES). « Les fluctuations boursières actuelles, même à la hausse, sont d’abord dues à des acteurs financiers opportunistes, voire spéculatifs, et pas à ceux qui cherchent de la valeur sur le long terme », ajoute l’économiste, inquiète de la volatilité du marché.

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De fait, les investisseurs étrangers, qui avaient retiré pas moins de 4,3 milliards de livres égyptiennes (près de 550 millions d’euros) de la Bourse après la révolution, ne sont pas encore revenus. Ils pesaient 29 % de la capitalisation (dont 5 % pour les investisseurs arabes) fin 2011, un chiffre tombé, fin juillet 2012, à 22 % (dont 6 % pour les investisseurs arabes). Les banques d’affaires et fonds occidentaux attendent encore leur heure. La perspective d’une dévaluation de la livre égyptienne plane comme une épée de Damoclès et douche les ardeurs des investisseurs. « Nous préférerons patienter le temps que la monnaie soit dévaluée avant de réinvestir dans le pays », indique Claire Peck, responsable des marchés émergents au sein de JP Morgan Asset Management, interrogée par le Financial Times.

Car avec une balance commerciale et une balance des paiements chaque jour un peu plus dans le rouge, l’État égyptien ne devrait bientôt plus avoir les moyens de soutenir le cours de sa monnaie. Durant les six premiers mois de l’année, ses réserves en devises ont baissé de 34 %. Et le déficit budgétaire se creuse aussi. Début août, il était supérieur à 10 % du PIB.

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« Pour le moment, l’État a tenu grâce aux soutiens financiers qu’il a obtenus in extremis, comme ce prêt de 500 millions de dollars [soit 407 millions d’euros, qui doivent être suivis de 1,5 milliard de dollars supplémentaire, NDLR] que lui a accordé le Qatar le 11 août dernier. Mais tout va dépendre des négociations avec le FMI [Fonds monétaire international] », estime Magda Kandil. Les autorités égyptiennes ont profité de la visite de Christine Lagarde au Caire, le 22 août, pour tenter d’obtenir un prêt de 4,8 milliards de dollars, soit plus que les 3,2 milliards initialement évoqués – et déjà loin d’être acquis. « Cette somme ne sera accordée qu’avec des garanties de saine gestion », souligne Magda Kandil. Selon elle, « une dévaluation organisée dès maintenant, mais par paliers, pourrait s’avérer une meilleure solution qu’une dépréciation brutale, désastreuse pour la Bourse et l’image du pays ».

Assainissement

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En attendant, les autorités du marché tentent de contrer la volatilité des cours, n’hésitant pas à interrompre les cotations en cas de dépassement des seuils de 10 % à la hausse ou à la baisse. « On ne peut blâmer le management de la place financière. Il a fait un bon travail contre la spéculation, juge Magda Kandil. Mais, pour que la Bourse reparte durablement à la hausse, il faut que les fondamentaux – consommation, chômage, inflation – repassent au vert. Pour cela, au-delà de l’assainissement des finances publiques, le gouvernement doit soutenir les petites et moyennes entreprises, qui sont le moteur de l’économie égyptienne. » 

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