BHP Billiton s’extrait du continent

Après ses désinvestissements en Guinée, en RD Congo et en Afrique du Sud, la major australienne BHP Billiton semble accorder moins d’intérêt à l’Afrique. Elle devrait toutefois rester à l’affût d’opportunités dans le cuivre et le fer.

Le groupe extrait 47% de son charbon thermique en Afrique australe (ici la mine de Middelburg, en Afrique du Sud). © BHP

Le groupe extrait 47% de son charbon thermique en Afrique australe (ici la mine de Middelburg, en Afrique du Sud). © BHP

ProfilAuteur_ChristopheLeBec

Publié le 7 août 2012 Lecture : 4 minutes.

Ne cherchez pas l’Afrique dans le dernier rapport d’exploration et de développement du géant australien BHP Billiton. Aucun projet majeur pour le continent n’apparaît dans le document publié le 18 juillet. Pas même en Afrique du Sud, où la major est pourtant cotée, comme à Sydney, à Londres et à New York. Mi-2012, le groupe dirigé par Marius Kloppers, natif du Cap, comptait 10 000 salariés en Afrique (sur 41 000 en tout), principalement dans ses installations minières sud-africaines (charbon, manganèse, aluminium et titane), algériennes (pétrole et gaz) et mozambicaines (aluminium). Au cours des douze derniers mois, la firme a réalisé 1,16 milliard d’euros de chiffre d’affaires en Afrique australe, à peine 2 % de ses revenus globaux (55 milliards d’euros). Elle y extrait 46 % de son manganèse et 47 % de son charbon thermique. Elle y produit aussi 85 % de son aluminium. Mais ces chiffres devraient baisser à l’avenir.

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Depuis six mois, les indices d’une réduction de la voilure africaine se sont ainsi multipliés. Le groupe a mis en place, fin 2011, un redéploiement de ses équipes d’exploration dévolues au continent, en affectant à l’Amérique latine plus de la moitié des 200 géologues qui y travaillaient. Dans la filière bauxite-aluminium, il a annoncé, le 7 février, la vente des parts (33 %) qu’il détenait dans la raffinerie de Guinea Alumina Corporation, en Guinée.

Une semaine plus tard, il a signifié son retrait de ses derniers projets actifs en RD Congo, avec l’abandon de la construction d’une raffinerie d’aluminium à l’embouchure du fleuve Congo et, par conséquent, a annulé sa participation au barrage hydroélectrique d’Inga, qui devait l’alimenter. Deux investissements qui devaient coûter conjointement au groupe australien et à l’État congolais 4,9 milliards d’euros, et générer 15 000 emplois.

Rio Tinto plus « risqueur »

Pour la filière bauxite-aluminium comme pour le fer, la direction s’est justifiée par la « faiblesse des prix sur les marchés internationaux » et par la baisse de la demande chinoise. Le titane est quant à lui jugé comme un actif non stratégique par le groupe, qui dispose déjà du panier de ressources le plus diversifié parmi les majors minières. Mais pour les connaisseurs de l’entreprise, ces décisions tiennent surtout à la frilosité de la direction. C.L.B.

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Dernière annonce en date, le 18 juillet, la cession de ses parts dans la Société des mines de fer de Guinée, qui explore les gisements de Diecké et de Nimba-Nord. Une décision qui a aussitôt entraîné les spéculations des analystes sur un éventuel retrait au Liberia voisin, en raison des synergies envisagées entre les projets ferreux de BHP Billiton dans les deux pays. Enfin, la major est en train de vendre les 37 % qu’elle détient dans Richard Bay Minerals, qui extrait du titane en Afrique du Sud.

Frilosité

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L’australien Rio Tinto est plus offensif que son « frère ennemi » BHP Billiton. Malgré des négociations difficiles en Guinée, il poursuit le développement du gigantesque gisement de fer du Simandou, après un paiement de 570 millions d’euros pour sécuriser ses droits. En RD Congo, en dépit de l’instabilité politique, il explore le fer dans l’Est. Et il n’est pas rebuté par la réglementation changeante du Zimbabwe, où il exploite du diamant, ni par la transition malgache, où il extrait de l’ilménite.

« Marius Kloppers tout comme ses principaux adjoints ne croient pas suffisamment en l’Afrique », regrette un ancien cadre dirigeant qui a coordonné plusieurs désinvestissements similaires. « Contrairement à son challengeur Rio Tinto [lire encadré, NDLR], qui, malgré l’instabilité dans l’est de la RD Congo, y travaille toujours, BHP Billiton n’est pas prêt à assumer le risque politique. Il n’hésite pas à partir, y compris de manière brutale et en perdant de l’argent, si une situation lui paraît bloquée », ajoute-t-il.

La société manoeuvre pour reprendre l’alléchant gisement de Belinga, au Gabon.

Toutefois, si l’exploration directe est en repli, augurant une future production africaine de BHP Billiton en baisse, cela ne signifie pas un retrait général. Dans certaines filières comme le cuivre, le fer et le cobalt, pour lesquelles l’Afrique reste incontournable, le groupe australien va rester à l’affût d’opportunités, agissant au coup par coup. Présent au Gabon dans le projet de manganèse à Franceville, il manoeuvre pour reprendre l’alléchant gisement de fer de Belinga, détenu actuellement par un groupe chinois. Le cuivre zambien est aussi dans sa ligne de mire.

Options d’achat

Il continue aussi de signer – discrètement – des options d’achat avec des juniors d’exploration minière, moins exposées en Bourse. « Ces contrats stipulent, en échange d’un soutien financier de BHP Billiton, son entrée au capital en cas de découverte importante », explique le même ancien cadre, citant par exemple Ivanhoe Mines (aujourd’hui partenaire de Rio Tinto), actif dans le cuivre en RD Congo et en Afrique du Sud. Cela ne signifie pas que BHP Billiton mènera ces projets jusqu’au bout, mais ainsi il ne laisse pas ces gisements à la concurrence. « Au final, prédit notre interlocuteur, seuls les mégagisements, où les économies d’échelle sont à leur maximum, seront développés. Les autres seront revendus. » 

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