Rwanda : le centre de Gikondo à Kigali, l’envers du décor ?
Dans un rapport publié le 24 septembre, l’ONG Human Rights Watch dénonce des arrestations arbitraires et la détention illégale de personnes vulnérables au centre de santé de Gikondo, à Kigali. Le gouvernement rwandais réfute ces accusations, parlant d’un point de transit vers d’autres centres de réhabilitation
C’est en 2005 qu’un ancien entrepôt de Gikondo, à Kigali, commence à accueillir des personnes en difficultés, essentiellement des enfants des rues, des mendiants, des vendeurs à la sauvette et les travailleurs du sexe.
Selon les autorités rwandaises, l’endroit, situé en plein cœur de la capitale, est officiellement destiné à servir de « centre de transit » où les personnes ne doivent pas être détenues plus de trois jours. Un lieu gardé par la police mais placé sous la gestion de la mairie de Kigali.
« Le centre accueille des personnes qui ont besoin d’une assistance sociale par exemple des sans-abri qui ne peuvent pas être emprisonnés », affirme à Jeune Afrique Fidèle Niyonsaba, le maire de la ville de Kigali.
Centre de détention non officiel ?
En 2006, Human rights Watch publie son premier rapport sur le centre, appelé familièrement « Kwa Kabuga ». L’ONG se base sur des témoignages de personnes qui disaient avoir été raflées, puis libérées, ou de témoins de ces rafles à grande échelle à Kigali. Elle revient à la charge en 2015 avec des témoignages de 57 ex-détenus et accuse le gouvernement rwandais de « détention arbitraire ».
« Le centre de Gikondo est l’un des secrets les mieux gardés de Kigali. Il est utilisé pour détenir des mendiants, des sans abris et d’autres personnes issues des milieux pauvres de la société rwandaise », affirme Carina Tertsakian, chercheuse à HRW.
Des allégations aussitôt démenties par Kigali. « Gikondo n’est en aucun cas un centre de détention. C’est plutôt un centre de transit vers des centres de réhabilitation », explique le maire de Kigali. Et celui-ci de donner en exemple concret le « centre de réinsertion et de développement des compétences » de l’île d’Iwawa, sur le lac Kivu, qui accueille des consommateurs de drogue.
Mais pour HRW, loin de la version officielle, les personnes vulnérables paieraient en réalité l’image positive que la ville de Kigali veut montrer à l’extérieur. « La ville de Kigali est souvent présentée comme l’une des capitales les plus propres et les plus ordonnées d’Afrique et cela est dû en partie au fait que la police arrête de façon arbitraire les personnes considérées comme indésirables », déplore Carina Tertsakian.
Mauvais traitements
« C’est une insulte de la part de Human Rights Watch de croire que le gouvernement va sacrifier des gens au nom de la propreté », s’insurge Fidèle Ndayisaba. Mais la réalité ne semble pas aussi simple que ce que les autorités en disent. Sur 57 témoins rencontrés par HRW, 41 affirment avoir été maltraités lors de leur séjour au centre de Gikondo.
« Une fois arrivée sur place, tu peux être battu sans raison. J’ai même eu peur de mourir là-bas », témoigne un ancien sans abri. « Quand ils t’arrêtent, ils disent que tu es un vagabond, sans aucun motif ni aucune inculpation », précise une vendeuse ambulante.
De son côté, la mairie de Kigali estime que les pensionnaires du centre ne peuvent en aucun cas être maltraités. La gestion du centre est assuré par des assistants sociaux et des psychologues, des professionnelles qui ne cautionneraient pas d’éventuelles violences… Dans un communiqué publié jeudi 23 septembre, le gouvernement rwandais exhorte néanmoins HRW à apporter des preuves à ses accusations pour que des enquêtes soient menées le cas échéant. L’ONG, quant à elle, demande la fermeture pure et simple du centre de transit de Gikondo.
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