Immigration : ces seules ressources qui n’intéressent pas l’Occident

Ils sont les conquérants des temps modernes, des conquérants non belliqueux.

Des migrants arrivant sur l’île italienne de Lampedusa. © Mauro Buccarello/AP/SIPA

Des migrants arrivant sur l’île italienne de Lampedusa. © Mauro Buccarello/AP/SIPA

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Publié le 25 septembre 2015 Lecture : 2 minutes.

Aussi, ne puis-je résister à la tentation de paraphraser le poète [1] :

Comme un vol de gerfauts hors du charnier natal, fatigués de porter leur misères hautaines, du Soudan et de Somalie, de l’Érythrée et de la Libye, de l’Iraq et de la Syrie, de tous les pays appauvris et/ou en guerre, migrants et refugiés embarquent dans des bateaux de fortune pour rejoindre les côtes occidentales. Sont-ils ivres d’un rêve héroïque et brutal ? Brutale est, en tout cas, la réalité qu’ils fuient ; brutalité économique, brutalité humaine, brutalité… climatique.

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Ces hommes, femmes et enfants qui parviennent à traverser l’océan, prendre le large pour ainsi dire, sont en réalité peu nombreux comparés à tous les autres qui n’ont que leurs pieds pour marcher et qui, par conséquent, ne se réfugient guère loin de leur zone de brutalité. Lampedusa, ce n’est rien comparé à tous les camps de réfugiés en Afrique, pour ne parler que de ce continent. Mais l’Occident se sent bousculé dans sa zone de confort.

Libre circulation

Pourtant, on ne cessera de le dire, le libre-échange et la libre circulation des marchandises au sein du marché néolibérale globale – couplé à une géopolitique globale de prédation – implique incidemment la libre circulation de la force de travail qui elle-même n’est pas considérée autrement que comme une marchandise. Les images de ces migrants qui resquillent dans des camions de marchandises pour traverser les frontières sont révélatrices et hautement symboliques.

L’Europe a besoin de nouvelles ressources humaines, mais elle veut choisir ses migrants. Le beurre et l’argent du beurre.

Les multinationales et les marques occidentales de vêtements vont acheter cette main-d’œuvre bon marché sur place dans des pays vulnérables, mais beaucoup en Occident ne veulent voir ces ressources humaines venir eux-mêmes vendre leurs compétences sur la place forte européenne. Certes, l’Europe a besoin de nouvelles ressources humaines pour équilibrer sa faible démographie et sa population vieillissante, mais elle veut choisir ses migrants. Des intellectuels, des jeunes déjà instruits et formés par leur pays d’origine prêts pour l’emploi et dont elle aura pris le soin de vérifier la qualité et l’utilité auparavant. Le beurre et l’argent du beurre.

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Alors, face aux nouvelles vagues migratoires, il faut être ignorant ou complètement de mauvaise foi pour s’empêcher de sortir cette phrase bête : « Nous ne pouvons pas accueillir toute la misère du monde » ! Est-il besoin de redire ici que ces réfugiés ne sont pas complètement responsables de leur sort ? Ils n’ont pas allumé les foyers de tension ni délibérément contribué à leur paupérisation, que l’on sache ; ils viennent simplement, dans un effet de boomerang, charrier toutes les injustices de l’exploitation de l’homme par l’homme dont l’ultime illustration est celle des passeurs qui les font venir s’échouer sur les côtes occidentales.

[1] Jose-Maria De Heredia (1842-1905), Les Trophées, recueil de poèmes publié en 1893 à Paris. Éditeur : Alphonse Lemerre

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