Tunisie : une défense sous influences ?

La France a annoncé lundi le quadruplement de son aide militaire à la Tunisie, dont les partenaires dans le domaine de la défense se sont multipliés ces dernières années. Une aide actuellement indispensable qui n’est pas sans conséquences sur le positionnement du pays dans le jeu des alliances internationales.

Un hélicoptère de l’armée tunisienne au-dessus du musée du Bardo, à Tunis, le 18 mars 2015. © Ali Ben Salah/AP/SIPA

Un hélicoptère de l’armée tunisienne au-dessus du musée du Bardo, à Tunis, le 18 mars 2015. © Ali Ben Salah/AP/SIPA

Publié le 7 octobre 2015 Lecture : 3 minutes.

« La sécurité de la Tunisie, c’est aussi la sécurité de la France ». Avec cette affirmation Jean-Yves Le Drian, ministre français de la Défense, a annoncé lors d’une visite officielle à Tunis, le 5 octobre, que l’Hexagone quadruplait son aide militaire à la Tunisie. Celle-ci passe ainsi de 2,5 millions d’euros à 10 millions d’euros par an. Un effort conséquent, consenti par Paris avec pour objectif la mise à niveau du renseignement tunisien et la création d’un deuxième bataillon de forces spéciales. Dès fin octobre, une Commission militaire mixte tuniso-française sera chargée de préciser ce partenariat.

Mais Paris n’est pas le seul à considérer que la Tunisie, au vu de sa proximité avec l’Europe, de ses frontières avec la Libye, de l’instabilité régionale et de l’existence de groupuscules jihadistes sur son sol, est en première ligne dans la lutte contre le terrorisme. Depuis la chute du régime de Ben Ali, les États Unis ont même devancé la France au plan de la coopération sécuritaire.

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Entre 2011 et 2014, l’aide américaine, selon le général David Rodrigez, chef de l’US Africa Command, a été de l’ordre de 35 millions d’euros et elle sera portée à 88,5 millions d’euros en 2016. Une somme destinée essentiellement à renforcer la capacité militaire du pays par l’achat de matériel et d’équipements américains mais aussi à améliorer la coordination du conseil technique et l’échange de renseignements.

Urgente mise à niveau de la défense

L’empressement américain a été payant ; la Tunisie avait déjà commandé en 2014 douze hélicoptères de combat et de transport type « Black Hawk », pour un montant 700 millions de dollars qui inclut la formation et le soutien technico-logistique du personnel tunisien. Sans parler de la fourniture de systèmes de détection d’explosifs, de 52 véhicules de type Humvee et d’un navire de patrouille…

Le budget de 1,792 milliard de dinars accordé à la défense reste bien en deçà des besoins d’un pays affecté par l’instabilité en Libye et les attaques terroristes

Outre les États-Unis, l’Italie s’est directement engagée auprès de la Tunisie depuis près de 20 ans dans la fourniture de systèmes d’armement de pointe et de patrouilleurs. Objectif : renforcer la protection des côtes pour contrer l’immigration clandestine. En juillet 2015, l’Allemagne a promis de son côté une aide militaire d’un montant de 1,2 million d’euros et la fourniture d’un dock flottant pour la maintenance des canots, d’un patrouilleur, de 5 camions de marque Unimog, de 3 000 casques et 700 jumelles de vision nocturne.

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L’aide sécuritaire peut sembler hétéroclite mais, dans le cas de la Tunisie qui, depuis son indépendance, a préféré financer l’éducation et la santé, il s’agit surtout d’une urgente mise à niveau des hommes et des équipements. D’autant que le budget de 1,792 milliard de dinars accordé à la défense reste bien en deçà des besoins d’un pays affecté par l’instabilité en Libye et les attaques terroristes.

Allié majeur hors Otan

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Cependant, pour que les pays occidentaux délient leur bourse, la Tunisie a dû montrer patte blanche. Elle a obtenu en mai 2015, à l’occasion de la visite d’État à Wahington de Béji Caïd Essebsi, président de la République tunisienne, le statut d’allié majeur hors de l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN), qui octroie à la Tunisie des privilèges en matière de défense et de coopération comme l’accès à certaines formations, à des équipements performants de recherche et de développement, et au financement militaire étranger pour l’acquisition de matériels de défense.

Pour achever de convaincre ses partenaires, la Tunisie a également rejoint la coalition internationale contre Bachar al-Assad en Syrie. « Nous n’avons pas d’autre choix que de solliciter de l’aide en attendant la mise sur pied d’une armée de métier », précise le colonel à la retraite Tahar El Cadhi.

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