Et si les soudards de l’Afrique s’attelaient plutôt aux infrastructures ?

Nous avons tous cru que le temps de la terreur kaki n’était plus qu’un lointain souvenir sur l’ensemble du continent. Avions-nous été naïfs de croire que l’être humain peut être autre chose qu’une simple brute épaisse ?

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  • Tshitenge Lubabu M.K.

    Ancien journaliste à Jeune Afrique, spécialiste de la République démocratique du Congo, de l’Afrique centrale et de l’Histoire africaine, Tshitenge Lubabu écrit régulièrement des Post-scriptum depuis son pays natal.

Publié le 26 octobre 2015 Lecture : 2 minutes.

Nous avons assisté, ébahis, à la mise à mort de la révolution en Égypte, ou, si vous préférez, à son détournement par l’armée. Épisode suivant, le pitoyable coup d’État qui a secoué pendant quelques jours, en septembre, le Burkina Faso démontre bien que l’homme ne retient pas toujours les leçons de l’Histoire. La résistance du peuple burkinabè, qui était venu à bout, en octobre 2014, du régime de Blaise Comparé, en place pendant vingt-sept ans, a sans doute eu raison des apprentis sorciers du fameux régiment de sécurité présidentielle, une armée dans l’armée. Mais cette aventure a coûté la vie à des citoyens qui défendaient leurs droits. L’arrestation puis l’inculpation du numéro un des putschistes, le général Gilbert Diendéré, et de ses présumés complices vont-elles servir de leçon à tous les soudards qui complotent dans l’ombre dans la plupart de nos contrées ?

Vous avez sans doute remarqué que, dans certains pays africains, tous les chefs d’État arrivés au pouvoir de façon très peu orthodoxe, après un putsch ou une guerre dans lesquels ils étaient individuellement impliqués, ont renoncé, sans donner la moindre explication, à se faire appeler général ou colonel, ainsi qu’à porter la tenue militaire. Ils sont, donc, redevenus de simples civils comme vous et moi. Une preuve, sans doute, qu’ils ne sont pas fiers d’appartenir à des armées qui ne respectent rien. À moins que ce ne soit, pour eux, une façon de clamer, à la face du monde, qu’ils ont rompu avec leur passé de soudards et sont désormais fréquentables et… « démocrates ».

Ils ne sont plus militaires, ces messieurs ? Comment expliquer alors que la garde présidentielle soit le véritable socle du pouvoir ?

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Mais nous ne sommes pas dupes, vous et moi. Ne nous y trompons donc pas. Ceux de nos dirigeants qui étaient dans l’armée avant d’accéder au pouvoir grâce à celle-ci et de s’y accrocher ont érigé la soldatesque en rempart. Rempart contre la Constitution, contre la démocratie, contre la vérité des urnes, contre le droit des citoyens à exercer les libertés fondamentales qui leur sont reconnues. Ils ne sont plus militaires, ces messieurs ? Comment expliquer alors que la garde présidentielle soit le véritable socle du pouvoir ? Mais faut-il protéger un seul individu, fût-il président de la République, ou défendre l’intégrité du territoire, mission première de toute armée ? Faut-il une armée dans l’armée, un groupe souvent ethnicisé ou tribalisé, chouchouté, au service d’un homme ? Pourquoi le pouvoir doit-il continuer à être au bout du canon ?

Nos pays manquent cruellement de routes et d’infrastructures qui peuvent conduire au développement. Voilà à quoi nos soudards doivent s’atteler plutôt que de nous tirer dessus.

Il faut vite changer la donne. En commençant par dissoudre toutes ces gardes présidentielles dont la mission est claire : briser le quart-monde. Ensuite, tous les soudards, abusivement qualifiés d’« unités d’élite », doivent être affectés à des tâches plus utiles que celle de montrer les biscoteaux. Quelles tâches ? Le génie civil, pardi ! Nos pays manquent cruellement de routes et d’infrastructures qui peuvent conduire au développement. Voilà à quoi nos soudards doivent s’atteler plutôt que de nous tirer dessus. Nous ne sommes pas des lapins.

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