Rodolphe Saadé : « CMA CGM prévoit des investissements de 200 à 250 millions d’euros à Abidjan »

Rodolphe Saadé, directeur général délégué de CMA CGM, l’affirme : le transporteur maritime sera candidat en consortium à l’appel d’offres pour le deuxième terminal à conteneurs d’Abidjan et lance une filiale dédiée aux pays de l’hinterland.

Rodolphe Saadé est le numéro deux de CMA CGM, compagnie maritime fondée et contrôlée par son père, Jacques. © DR

Rodolphe Saadé est le numéro deux de CMA CGM, compagnie maritime fondée et contrôlée par son père, Jacques. © DR

Publié le 5 juillet 2012 Lecture : 4 minutes.

Mise à jour du 05/07/12 à 17h07GMT : dans une mise au point, CMA CGM tient à préciser que les sommes en question (200 à 250 millions d’euros) seront financées en consortium et que la quote-part de CMA CGM sera donc limitée.

En visite en Côte d’Ivoire les 3 et 4 juillet, Rodolphe Saadé a rencontré le président de la République, le ministre des Transports et divers personnalités de premier rang. Endettement du groupe, conjoncture délicate, évolution de la stratégie en Afrique… le directeur général délégué du troisième transporteur mondial en conteneurs CMA CGM et président de l’armateur « africain » Delmas répond aux questions de Jeune Afrique.

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Propos recueillis par Baudelaire Mieu, à Abidjan.

Jeune Afrique : Comment évolue l’endettement de CMA CGM ? 

Rodolphe Saadé : La situation de notre dette n’est plus un secret. Ce problème structurel nous contraint à faire des choix mais nous ne perdons pas espoir quant à la résolution de cette question. C’est la raison pour laquelle nous poursuivons les discussions avec nos banquiers pour essayer de trouver une solution définitive à la restructuration de cette dette. Durant mon séjour en Côte d’Ivoire, le  président de la République Alassane Ouattara  nous a proposé l’aide de banques ivoiriennes. Nous sommes ouverts à toutes sortes de solutions et nous allons nous pencher sur cette proposition. En Europe, c’est devenu quasi impossible de lever des fonds auprès des banques qui  ne prêtent plus et encore moins pour le secteur du transport maritime. Les banquiers préfèrent investir dans des industries où ils ont une garantie de stabilité absolue. Notre métier, malheureusement, est cyclique. Nous sommes très tributaires de l’offre et de la demande, contrairement à d’autres secteurs qui ne le sont pas. Nous sommes donc partants pour trouver des solutions en Côte d’Ivoire.

Nous regardons avec attention l’appel d’offres d’Abidjan auquel nous allons soumissionner.

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Cette situation vous permet -t-elle financer votre plan de développement en Afrique de l’ouest pour les années à venir ?

Notre plan de développement prévoit des investissements compris entre 200 et 250 millions d’euros sur trois ans pour Abidjan seulement. Nous regardons avec attention l’appel d’offres d’Abidjan [sur le deuxième terminal à conteneurs, NDLR] auquel nous allons participer. Le même montant est aussi en jeu à Sao tomé, où nous souhaitons développer une plateforme de transbordement importante. Nous avons déjà signé la concession avec le gouvernement de São Tomé, mais le projet est en stand-by pour des raisons financières. Ce sont des investissements importants. Le choix sera fait en fonction de la situation géographique et du coût. Les investissements stratégiques pour nous seront réalisés. Dans le cas d’Abidjan, nous avons des partenaires qui sont prêts à financer nos projets avec nous. La concurrence est très forte sur les côtes africaines et, pour survivre, il faut innover grâce à des partenariats stratégiques.

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Quels objectifs poursuivez-vous en adoptant une stratégie d’implantation dans l’hinterland ?

Nous nous apprêtons à lancer dans les semaines à venir une nouvelle filiale, CMA-CGM Transit Transport, qui  se consacrera au Niger, au Mali et au Burkina Faso. La stratégie de notre groupe est d’être présent sur tout le processus du transport. CMA-CGM s’est développé depuis plusieurs années  en Afrique, surtout sur la partie maritime. Maintenant, nous préférons entrer dans les terres. Nous avons pour volonté d’investir de plus en plus dans les terminaux en Afrique de l’ouest, sur la partie maritime mais aussi sur la partie terrestre. Aujourd’hui il est important pour nous de pouvoir sécuriser les fenêtres [d’accès aux ports], d’éviter la congestion quand cela est possible, de pouvoir investir dans des terminaux et nous avons identifié Abidjan comme étant une possibilité intéressante pour le groupe.

Nous nous apprêtons à lancer dans les semaines à venir une nouvelle filiale, CMA-CGM  Transit Transport, qui  se consacrera au Niger, au Mali et au Burkina Faso.

À combien estimez-vous la progression du trafic maritime en Afrique dans les années à venir  ?

La croissance du trafic maritime en Afrique se situe entre 8 et 10% annuellement, ce qui est quand même une croissance forte essentiellement tirée par les importations, à l’exception de la Côte d’Ivoire qui exporte. La relation entre l’Afrique de l’Ouest et la Chine, où nous sommes très présents, se développe. L’Afrique n’est pas le seul continent à tirer la croissance du secteur maritime. Les pays émergents comme la Chine, l’Inde, le Brésil…  affichent une croissance positive de même que la Russie. La difficulté, aujourd’hui, est que les marchés européens ne grandissent plus. Nous croyons beaucoup en l’avenir des pays africains et nous voudrions participer à cet élan.

Quelle est la part du continent dans vos activités ?

Nous avons réalisé sur le continent un chiffre d’affaires de 1,4 milliard de dollars en 2011. L’Afrique représente 10% de notre chiffre d’affaires total qui s’est établi à 14,9 milliards de dollars. Nous avons transporté 1,5 million de conteneurs sur l’Afrique et envisageons une progression de 10%. En Côte d’Ivoire, nous sommes leader avec 34% de parts de marché.

Comment voyez-vous l’avenir du transport maritime dans le monde ?

Aujourd’hui, le transport le plus économique est le transport par navire et en conteneurs. Je ne pense pas que dans les dix années à venir le transport en conteneurs soit remplacé par un autre moyen de transport.

Lire aussi : Le port d’Abidjan veut reprendre sa place

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