Coupe du monde de rugby : pourquoi les Sud-Africains peuvent battre les All Blacks en demi-finale

On les attendait. Les Sud-Africains sont bien au rendez-vous des demi-finales de la Coupe du monde de rugby, où la Nouvelle-Zélande les attend de pied (très) ferme, samedi 24 octobre à Twickenham, près de Londres. Un duel de costauds et une montagne à franchir. Les « Boks » peuvent-ils le faire ? Éléments de réponse.

Bryan Habana. © AFP

Bryan Habana. © AFP

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Publié le 22 octobre 2015 Lecture : 5 minutes.

D’accord, les Black viennent d’infliger la plus grosse déculottée de leur histoire aux Bleus français, avec la bagatelle de 62 points marqués, un record pour un quart de finale de Coupe du monde.

D’accord, les Tricolores se sont fait renverser par l’ailier néo-zélandais Julian Savea, qui a marqué davantage de points que le mythique Jonah Lomu à seulement 25 ans.

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D’accord, le demi de mêlée black, Dan Carter, a été capable sans sourciller un dixième de seconde d’envoyer une chistera (passe dans le dos) « main gauche » au milieu de joueurs français aussi facilement qu’entre des piquets d’entraînement.

Mais, ces Néo-Zélandais sont-ils pour autant imbattables ? Non. Pour l’Afrique du Sud, il y a de l’espoir. Et voici pourquoi.

Parce que les Sud-Africains ne sont pas Français

Et heureusement, vu l’état du rugby hexagonal. D’abord, les Springboks affrontent régulièrement les All Black dans le cadre du Four Nations, dans lequel s’affrontent les quatre nations majeures de l’hémisphère sud. Au total, les deux équipes se sont affrontées 90 fois depuis 1921 et le bilan n’est pas si déséquilibré que ça : 52 victoires néo-zélandaises, 35 à l’Afrique du Sud et trois nuls.

Sans remonter aux confins de l’histoire de l’Ovalie, la fessée est cependant sévère. En douze matches depuis 2010, les Boks n’ont triomphé que deux fois en 2011 et 2014. C’est d’ailleurs dans ce dernier round gagné (27-25), le 4 octobre 2014 à l’Ellis Park de Johannesbourg, où ils étaient devenus champions du monde en 1995, que les Sud-Africains devront puiser leur force.

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En match de préparation, le 25 juillet dernier, ils ne s’étaient inclinés que de sept points, dans les dernières minutes, sur un essai du centre vétéran néo-zélandais Richie McCaw, après avoir pourtant dominé la rencontre, ce que n’ont jamais fait les Français en quart de finale. Toujours aussi présents physiquement, ils avaient alors proposé un jeu de passes ambitieux, assez éloigné de leur légende de bulldozers. Cette fois, il faudra tenir quelques minutes supplémentaires et concrétiser davantage leur domination.

Parce que les Sud-Africains sont prêts

Perdre contre le Japon lors de leur premier match n’était peut-être pas la meilleure idée pour entrer dans la Coupe du monde. Mais cela a eu le mérite de réveiller les Boks, peut-être trop trop sûrs de leur rugby en phase de poules. Depuis, l’Afrique du Sud a fait un sans-faute, prenant chaque rencontre comme un match couperet. Elle a notamment dominé, devant un stade hostile, en quart de finale, (23-19) des morts de faim gallois qui, malgré une moitié d’équipe pointant à l’infirmerie, ont proposé un des plus beaux rugbys de la compétition.

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Baromètre de l’Afrique du Sud, avec le demi de mêlée Fourie Du Preez et l’ouvreur Handré Pollard, l’ailier Bryan Habana arrive en pleine forme et reste sans doute l’un des seuls au monde à son poste à pouvoir rivaliser avec ses homologues néo-zélandais. Meilleur joueur du monde en 2007, il a notamment inscrit trois essais lors de la victoire (c’est un euphémisme pour un 64 à 0) de son équipe face aux États-Unis.

Avec quinze essais en Coupe du monde, il est le meilleur marqueur sud-africain en activité. Et donc le joueur qui sera le plus surveillé en demi-finale. Pour battre la Nouvelle-Zélande, « il faut être au-dessus de ce qu’on peut donner de meilleur, au sommet du sommet de notre forme et de nos capacités », a-t-il déclaré dans L’Équipe. C’est à peu près ça.

Parce qu’Handré Pollard peut rivaliser avec Dan Carter

Certes, Dan Carter est capable de fulgurances assez uniques dans l’Ovalie. Mais Handré Pollard, ancien meilleur joueur du monde chez les moins de vingt ans, n’est pas mal non plus. À seulement 21 ans, il est un titulaire indiscutable du XV sud-africain. Solide (1,89m pour 98 kilos), il est également l’artisan du rugby nouveau des Boks. Terminé le tout-physique. Pollard entend bien utiliser les espaces avec des longues passes vers le large, en recourant le moins possible au jeu au pied.

Quatrième meilleur scoreur de la compétition, Pollard n’a été remplaçant qu’une seule fois dans ce mondial. Et l’Afrique du Sud a perdu, face au Japon…

Un domaine dans lequel il est pourtant plein d’assurance, et qui pourrait lui servir à occuper le terrain et à repousser la marée noire. Depuis le début de cette Coupe du monde, fiable dans le secteur des pénalités, il a inscrit 64 points, dont 18 dans le seul quart de finale contre les Gallois, remporté 23 à 19. Quatrième meilleur scoreur de la compétition, Pollard n’a été remplaçant qu’une seule fois dans ce mondial. Et l’Afrique du Sud a perdu, face au Japon. De quoi ne pas douter de son influence.

Handré Pollard (Matt Dunham/AP/SIPA) © Handré Pollard (Matt Dunham/AP/SIPA)

Handré Pollard (Matt Dunham/AP/SIPA) © Handré Pollard (Matt Dunham/AP/SIPA)

Parce que leur dimension physique peut fatiguer les Black

On promettait aux Néo-Zélandais un gros combat physique contre les Français. Il n’a pas eu lieu tant les Tricolores ont été lessivés par la machine noire. Mais, côté combat, les Sud-Africains peuvent proposer une toute autre résistance, notamment si le temps est pluvieux et oblige, pour cause de ballon glissant, à raccourcir les passes. Même avec un rugby renouvelé, le XV d’Afrique du Sud reste l’un des plus solides du monde à l’impact.

Pas sûr donc que l’ailier néo-zélandais Savea parvienne à mettre les Sud-Africains fesses par-dessus tête aussi facilement que des Français. Quant aux centres Richie McCaw ou Ma’a Nonu, indispensables au XV néo-zélandais, ils pourraient, à 35 et 33 ans, souffrir de la densité des Springboks.

Et les Sud-Africains se souviendront certainement que c’est dans le combat physique qu’ils étaient parvenus à battre la Nouvelle-Zélande en 1995, lors de leur titre de champion du monde. Certes, cela fait une éternité, mais, en rugby, l’ADN d’une équipe change rarement. « Avec l’Afrique du Sud, il y a toujours un certain degré d’impact physique. Elle ne lève jamais le pied et ces cinq dernières années, les matchs contre elle ont toujours été serrés », estime d’ailleurs Conrad Smith, le centre néo-zélandais.

Parce que l’arbitre sera Français ?

Avec tout le respect dû à l’arbitre, et avec un peu de mauvaise foi, l’un des avantages des Boks dans cette demi-finale pourrait être le seul homme censé être neutre : Jérôme Garcès. Le Français sera en effet l’arbitre de la rencontre. De là à imaginer qu’il pourrait faire payer aux Black l’humiliation infligée à ses compatriotes en quart de finale, il n’y a qu’un pas…

D’un autre côté, il est également l’arbitre qui a officié lors du match Afrique du Sud-Japon, avec le résultat que l’on connaît… Et, objectivement, il est l’un des meilleurs dans ce mondial. Mieux vaut donc ne pas compter sur son coup de pouce.

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