Référendum au Congo : affluence discrète dans les bureaux de vote
Les Congolais votaient dimanche sur un projet de constitution contesté ouvrant la voie pour 2016 à une nouvelle candidature du président Denis Sassou Nguesso, qui cumule plus de 31 ans de pouvoir à Brazzaville.
Groupés en plusieurs coalitions, les opposants au chef de l’État ont appelé à boycotter ce référendum qu’ils qualifient de « coup d’État constitutionnel ».
A la mi-journée, l’affluence était discrète dans les bureaux de vote de la capitale congolaise, où la circulation automobile était interdite sauf laissez-passer spécial de la police.
Denis Sassou Nguesso a glissé son bulletin dans l’urne vers 12H30 (11H30 GMT) au bureau de l’École nationale des beaux-arts – près du Palais présidentiel – le seul des six centres visités par l’AFP où l’on pouvait voir une file d’attente.
« Nous voulons changer pour avoir une constitution d’avenir et non comme les autres l’évoquent de façon superficielle parce que le président veut briguer de nouveaux mandats. Cette question n’est pas à l’ordre du jour », a affirmé le chef de l’État, appelant ses détracteurs à venir « exprimer (leur mécontentement) par les urnes » plutôt qu’en s’abstenant.
Depuis mardi, l’internet mobile, les SMS et le signal FM de la radio française RFI, l’une des stations les plus écoutées du pays sont coupés.
La campagne référendaire s’était achevée vendredi dans une ambiance tendue, après plusieurs jours d’interdiction des rassemblements publics et des violences meurtrières qui ont ravivé dans l’opinion le spectre des épisodes de guerre civile ayant déchiré le pays entre 1993 à 2003.
Dans le centre de la capitale, Brice Mbemba a déclaré à l’AFP être « venu voter pour la paix dans (son) pays ». Depuis plusieurs mois, les médias officiels présentent Denis Sassou Nguesso comme « le messager de la paix » ou « le gardien de la démocratie ».
Le projet de nouvelle constitution permettrait de faire sauter les deux verrous qui empêchent le chef de l’État de briguer un troisième mandat : la limite d’âge et celle du nombre des mandats présidentiels.
Les électeurs doivent y répondre par « oui » (bulletin vert) ou « non » (bulletin rouge).
« Répression »
Vers midi (11H00 GMT), un peu moins de 10% des inscrits avaient voté à la mairie de Makélékélé, un des quartiers sud de Brazzaville qui s’était embrasé mardi, selon le responsable de ce centre de vote.
A Pointe-Noire (sud), la capitale économique dominée par l’opposition, un journaliste de l’AFP a constaté que trois centres de vote installés dans le quartier 120 Mpaka (sud-est) étaient déserts.
Dans l’un de ces centres comptant près de 4 000 inscrits, on pouvait voir moins d’une dizaine d’enveloppes à travers l’urne en plastique transparente à la mi-journée, dans les autres les urnes étaient vides.
« Je suis venu voir si mon nom est sur la liste mais cela ne m’intéresse pas de voter », a déclaré Geoffroy, âgé d’une vingtaine d’années.
A Sibiti (220 km à l’ouest de Brazzaville), un membre de la commission diocésaine catholique locale Justice et Paix a affirmé par téléphone à l’AFP avoir vu « quelques dignitaires du pouvoir » distribuer de l’argent pour inciter les gens à aller voter.
Plusieurs ONG locales et internationales ont dénoncé cette semaine un climat de « répression » au Congo rendant impossible la tenue d’un scrutin dans des conditions démocratiques, opinion partagée publiquement par l’Union européenne.
Né en 1943, Denis Sassou Nguesso cumule plus de 31 ans à la tête du Congo, petit pays d’Afrique centrale de 4,4 millions d’habitants. Riche en pétrole, cette ancienne colonie française où le groupe Total est solidement implanté, est classée par l’ONU comme un pays au « développement humain moyen », mais avec un fort taux de chômage des jeunes.
Denis Sassou Nguesso a dirigé le Congo à l’époque du parti unique, de 1979 jusqu’aux élections pluralistes de 1992, qu’il a perdues. Revenu au pouvoir par les armes en 1997, il a été élu président en 2002 et réélu en 2009.
Plusieurs pays du continent ont été récemment confrontés à la question de la modification ou de l’interprétation de leur constitution pour permettre au chef de l’État de se maintenir au pouvoir, à l’image du Burundi, où la candidature puis l’élection de Pierre Nkurunziza à un 3e mandat ont plongé le pays dans une crise profonde et meurtrière.
Jeudi, l’Élysée a déclaré que le président français souhaitait « que les Constitutions soient respectées et que les consultations électorales se tiennent dans des conditions de transparence incontestables ». La veille, François Hollande avait appelé Denis Sassou Nguesso à « rassembler », tout en estimant qu’il avait « le droit » de « consulter son peuple ».
Les bureaux de vote devaient fermer dimanche à 18H00 (17H00 GMT). Les résultats du référendum ne devraient pas être connus avant plusieurs jours.
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