Anglo/franco : business is business

Leur philosophie, leur stratégie et leurs cibles sont parfois différentes selon qu’elles sont d’origine anglophone ou francophone. En tout cas, c’est dans les entreprises que l’on maîtrise le mieux les deux langues, et les deux cultures, du pays.

Faute d’avoir fait du bilinguisme une priorité, les autorités le respectent scrupuleusement. © Jean-Pierre Kepseu pour JA

Faute d’avoir fait du bilinguisme une priorité, les autorités le respectent scrupuleusement. © Jean-Pierre Kepseu pour JA

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Publié le 25 juin 2012 Lecture : 2 minutes.

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Le Cameroun sort de ses frontières

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Lorsqu’en 2009 le pape Benoît XVI fait sa première visite officielle en Afrique, c’est au Cameroun qu’il choisit d’aller. « Cela lui permettait de pouvoir toucher en une seule étape l’ensemble des communautés anglophones et francophones du continent », explique Sa’ah François Guimatsia, professeur de français et d’anglais au Centre linguistique de Douala. Pour l’auteur de Cinquante ans de bilinguisme au Cameroun. Quelles perspectives en Afrique ? (L’Harmattan, juin 2010), il n’y a aucun doute, « parler deux des principales langues internationales est une chance inouïe pour le pays ».

D’autant que le bilinguisme ne génère pas de tensions trop vives entre les communautés linguistiques du pays, membre à la fois de la Francophonie (depuis 1991) et du Commonwealth (depuis 1995). Les francophones représentent toujours 78 % de la population. « Comme toutes les minorités, les anglophones se sont parfois sentis un peu menacés culturellement, mais la mondialisation a changé la donne », remarque Sa’ah François Guimatsia. D’ailleurs, aujourd’hui, nombreux sont les parents francophones qui envoient leurs enfants dans des écoles spécifiquement anglophones.

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Les lignes de partage héritées de l’indépendance n’ont pourtant pas encore bougé. « Les politiques ont été beaucoup trop timides pour réellement mettre en place le bilinguisme, pourtant inscrit dans la Constitution », regrette le spécialiste. L’enseignement des deux langues officielles a bien été soutenu équitablement par les pouvoirs publics ces cinquante dernières années, « mais aucun pont n’a été mis en place entre les deux », constate Sa’ah François Guimatsia. « Cela aurait pourtant permis de développer une culture originale dans la région. »

Bientôt le mandarin ?

Faute d’avoir fait du bilinguisme une priorité, les gouvernements successifs se contentent de leur bilan plutôt honorable sur la question, préférant éviter le débat pour mieux ménager les susceptibilités communautaires. Avant de passer peut-être demain au multilinguisme. Toujours plus présent dans la sous-région, le mandarin l’est en particulier au Cameroun, où l’université de Yaoundé-II accueille, depuis 2007, l’un des instituts Confucius les plus actifs du continent – une annexe a même été ouverte à Douala en 2009.

Comme le souligne Guimatsia, « c’est davantage sur le terrain économique que le bilinguisme connaît un certain dynamisme ». Au bord des routes, on voit depuis longtemps des panneaux publicitaires dans les deux langues. Les entretiens d’embauche se déroulent de plus en plus en anglais, même dans les entreprises francophones. « Le secteur privé est aujourd’hui beaucoup plus bilingue que ne l’ont jamais été les pouvoirs publics », conclut le professeur. Avec parfois, selon les domaines d’activité, quelques différences de style. Comme en témoignent six dirigeants, francophones et anglophones, de l’industrie ou des médias. 

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