Bourse d’Alger, l’impossible réforme ?

Avec le départ de Noureddine Ismaïl, régulateur en chef du marché, la bourse d’Alger perd aussi celui qui, depuis quatre ans, devait piloter sa modernisation. Partie remise une fois de plus.

La bourse d’Alger a du mal à sortir de sa torpeur. © Omar Sefouane

La bourse d’Alger a du mal à sortir de sa torpeur. © Omar Sefouane

Publié le 3 juillet 2012 Lecture : 4 minutes.

Activité inhabituelle à la Bourse d’Alger en cette fin de juin. Le 21, Alliance Assurances et l’Entreprise de gestion hôtelière El-Aurassi ont organisé leur assemblée générale des actionnaires pour leur présenter les résultats de l’année 2011. Le 28, le groupe pharmaceutique Saïdal fera de même. Puis l’intermède se refermera et la Bourse d’Alger retrouvera sa torpeur. Car à ce jour, elle ne compte que ces trois sociétés cotées sur le marché des actions. Trois valeurs mobilières qui se négocient deux fois par semaine, le lundi et le mercredi. Seules Sonelgaz et Dahli, inscrites au département obligations, complètent ce bref panorama.

Pourtant, depuis 2008, une réforme pour dynamiser la Bourse est annoncée. C’était d’ailleurs la priorité de Noureddine Ismaïl, le président de la Commission d’organisation et de surveillance des opérations de Bourse (Cosob), au moment de sa prise de fonctions, la même année, pour un mandat de quatre ans qui vient d’arriver à terme. Dans le cadre de la mise en oeuvre de la réforme du marché financier en Algérie, une convention de financement a même été signée en mai 2011 entre Alger et le Programme des Nations unies pour le développement (Pnud), ce dernier déboursant 1 million d’euros et déléguant ses experts pendant dix mois. Sur le terrain, Noureddine Ismaïl a été désigné directeur national du projet. Officiellement lancée en octobre 2011, la réforme devait être mise en place d’ici à l’automne 2012.

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Vaines tentatives

Vaste chantier. « La Bourse d’Alger reste à ce jour une organisation essentiellement publique, déconnectée du monde économique et ne disposant pas de l’environnement professionnel nécessaire au développement du marché », rappelait Noureddine Ismaïl dans son mot d’introduction du rapport annuel 2011 de la Cosob, publié en avril. Et d’établir ce bilan : « Il est aisé de constater que le marché est totalement illiquide. » Car jusque-là, les tentatives pour dynamiser le marché des capitaux n’ont guère été fructueuses. En 2008, l’État a bien lancé des obligations assimilables du Trésor. Quatorze ont été introduites à la cote pour un encours de 273 milliards de dinars (2,7 milliards d’euros). Mais « ce compartiment a enregistré une baisse du volume des transactions réalisées en 2011 par rapport à 2010 de 802 millions de dinars », relève le rapport de la Cosob.

Autre exemple. Depuis juin 2011, BNP Paribas El-Djazaïr bénéficie d’un agrément provisoire comme intermédiaire en opérations de Bourse. C’est désormais la seule société à capitaux étrangers sur la place d’Alger parmi les six sociétés d’intermédiation existantes, détenues principalement par des banques publiques algériennes dont le département Bourse n’est pas la priorité. Résultat ? « Le volume des opérations échangées entre les intermédiaires sur le marché boursier a enregistré un montant de 3,8 milliards de dinars fin 2011, contre 4,9 milliards en 2010 et 5,9 milliards en 2009 », note la Cosob.

Peu de soutien

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À la décharge des institutions techniques chargées de faire tourner la Bourse – la Société de gestion de la Bourse des valeurs mobilières et Algérie Clearing (dépositaire des titres cotés), contrôlées par des capitaux publics -, elles n’ont pas vraiment bénéficié du soutien des autorités ou de l’engouement des entreprises. Le programme de privatisations mené entre 2003 et 2008 s’est déroulé sans faire appel à la Bourse, et lorsque les entreprises viennent à la cote, c’est d’abord pour lever des fonds à travers des emprunts obligataires (Algérie Télécom, Cevital, Sonelgaz…).

Noureddine Ismaïl voulait tout mettre à plat. Il a demandé de transformer la Cosob en véritable gendarme du marché en élargissant « son domaine d’intervention dans la supervision, le contrôle, l’enquête et la sanction ». Une évolution qui devait « aller de pair avec l’ouverture de l’activité des services d’investissements à de nouveaux acteurs indépendants et professionnels ». Conséquence : ce « chantier juridique ne peut pas se satisfaire d’un simple toilettage des textes en vigueur », estimait-il. Il proposait de « s’appuyer sur une loi-cadre de modernisation pour accompagner le développement du marché financier en Algérie, améliorer son contexte institutionnel, protéger l’investisseur et assurer son fonctionnement ». Pour Noureddine Ismaïl, il s’agissait aussi de transformer l’environnement des affaires et d’adapter le droit commercial, le droit fiscal, le droit de la concurrence, etc.

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Intérim

Le marché est totalement illiquide. Noureddine Ismaïl

Avec la réforme, l’ex-patron de la Cosob espérait attirer une centaine d’entreprises, privées ou publiques, à la Bourse d’Alger. En début d’année, les autorités ont donné leur feu vert pour la création d’un département PME, mais rien de concret n’a depuis été entrepris en ce sens. Un programme trop ambitieux ? En tout cas, il a été fatal à Noureddine Ismaïl. Dans un communiqué du 11 juin, la Cosob « a pris acte de la fin de mandat, le 1er juin, du président sortant ». En attendant la nomination d’un nouveau président, « le secrétaire général sera chargé de la gestion des affaires courantes », ajoutait-elle.

Fin de partie pour le président de la Cosob, tandis que le projet de réforme perd son directeur national. À la Commission, personne ne souhaite s’exprimer, à commencer par le président par intérim, le secrétaire général Samir Degaïchia, sur la date de nomination du successeur de Noureddine Ismaïl. Ni sur un éventuel report du calendrier de la réforme de la Bourse d’Alger…

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