Tunisie Télécom à la veille d’un tournant historique

Sous l’impulsion de son actionnaire minoritaire EIT, l’opérateur historique se prépare à une transformation sans précédent. Réduction des effectifs et possible privatisation totale sont en vue.

Depuis le début de l’année 2012, Tunisie Télécom a baissé ses tarifs. © Fethi Belaid/AFP

Depuis le début de l’année 2012, Tunisie Télécom a baissé ses tarifs. © Fethi Belaid/AFP

Julien_Clemencot

Publié le 2 juillet 2012 Lecture : 3 minutes.

Au sein de Tunisie Télécom, « les blocages demeurent », explique un fin connaisseur de l’opérateur historique. Un an après le licenciement de 63 cadres contractuels à la demande de l’Union générale tunisienne du travail (UGTT), qui trouvait leurs salaires trop élevés, les relations sociales restent un souci permanent pour la direction de l’entreprise. Celle-ci se trouve dans une position paradoxale. Elle emploie 8 500 salariés, quand plusieurs observateurs sont convaincus que 5 000 suffiraient. Mais de nombreux postes stratégiques restent non pourvus. « Dans les domaines les plus en pointe, par exemple les communications internationales ou les réseaux IP, nous manquons de compétences, indique un cadre de la compagnie. Certains postes sont octroyés en interne, mais ce n’est pas satisfaisant. »

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La situation pourrait néanmoins rapidement évoluer. Ces dernières semaines, une importante délégation d’Emirates International Telecommunications (EIT, filiale de Dubai Holding et actionnaire à 35 % de Tunisie Télécom), arrivée à Tunis le 29 mai, a visiblement persuadé l’État (65 % du capital) d’entamer une transformation en profondeur de l’opérateur. Avant le ramadan, la direction devrait annoncer un vaste plan de départs volontaires élaboré sur les conseils du cabinet américain Oliver Wyman. Son objectif est de convaincre entre 2 500 et 3 000 employés de plus de 50 ans de quitter l’entreprise, en échange d’un accompagnement qu’elle espère attractif. Pour l’heure, l’état-major de Tunisie Télécom, inquiet de la réaction des syndicats, ne veut pas en dire plus.

Les relations sociales restent un souci permanent.

L’autre évolution majeure à court terme devrait être la création d’un nouveau type de contrat pouvant offrir une alternative au statut de fonctionnaire. « Non seulement la grille de salaires de la compagnie nous empêche de recruter les compétences dont nous avons besoin pour être compétitifs, mais le contexte social n’incite pas non plus les meilleurs profils à nous rejoindre », déplore un administrateur de Tunisie Télécom.

Enfin, à plus long terme, Tunis pourrait opter pour une privatisation de la majorité du capital de l’entreprise en faveur d’EIT. « La mesure présente plusieurs intérêts pour le gouvernement. C’est la possibilité de faire rentrer de l’argent dans les caisses de l’État, mais aussi un bon signal envoyé aux investisseurs, notamment dubaïotes », estime une source proche du dossier. Pour EIT, cette solution s’apparente en tout cas à un plan de la dernière chance. Entré au capital en 2006 contre un chèque de 1,9 milliard d’euros, l’actionnaire émirati a vu son actif perdre près de la moitié de sa valeur, selon certains experts. Mais en reprenant le contrôle de l’opérateur en cas de privatisation, il reste persuadé de pouvoir réaliser une bonne affaire.

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De nombreux atouts

Il faut reconnaître que Tunisie Télécom présente de nombreux atouts à même de séduire de nouveaux investisseurs, notamment ses infrastructures filaires, devenues stratégiques avec la montée en puissance des échanges de données. Par ailleurs, depuis le début de l’année, l’entreprise s’échine à rattraper le terrain perdu sur ses concurrents en baissant ses tarifs de communication mobile autour de 0,10 dinar (0,05 euro) la minute et en redéployant son réseau de distribution. Enfin, du côté de la direction, on se félicite du bon décollage des offres 3G (haut débit mobile) et des marchés gagnés sur le créneau des flottes de téléphones pour les entreprises.

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Mais face à Tunisiana (filiale du groupe Qtel) et à Orange, les dirigeants de Tunisie Télécom savent que le combat sera rude et que l’opérateur public aura besoin de toutes ses forces vives. D’où la cession de la filiale mauritanienne Mattel, attendue au troisième trimestre 2012.

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