Au Cameroun, la croissance est en béton armé
Seul producteur local, Cimencam ne parvient pas à satisfaire la demande exponentielle de ciment. Pour rester numéro un et s’imposer dans la sous-région, la filiale de Lafarge va devoir batailler ferme.
Le Cameroun sort de ses frontières
Pas besoin d’être un expert pour voir que, chez Cimenteries du Cameroun (Cimencam), on ne chôme pas. Devant l’entrée de la principale cimenterie du pays, à Bonabéri, les files de poids lourds encombrent les routes défoncées en attendant leur chargement, pendant qu’un nuage épais s’échappe en continu des broyeurs, enfumant toute la banlieue industrielle de Douala. Pourtant, la filiale camerounaise du numéro un mondial, Lafarge, n’arrive pas à suivre la cadence nécessaire ces dernières années, « dans un pays où tout est à construire », explique Ravi Iyer, son directeur général. Seul fabricant local de ciment depuis sa création en 1963, Cimencam produit en effet péniblement 1,3 million de tonnes par an, quand la demande nationale excède les 2 millions et, selon les estimations des pouvoirs publics, devrait culminer à 8 millions de tonnes par an à court terme, avec le lancement des projets structurants programmés par l’État.
Pénurie
Les importations de ciment en provenance de Chine, de Turquie ou du Pakistan, autorisées depuis 2008, ont permis de répondre aux pénuries tout en stabilisant les prix. « Elles ne pourront cependant pas soutenir à elles seules une demande locale et régionale affichant chaque année une croissance à deux chiffres », estime un distributeur.
La seule solution passe donc par la construction de nouvelles unités de production. Cimencam, qui dispose, outre son site de Bonabéri, d’une usine à Figuil (dans le nord du pays), attend les conclusions des dernières études de faisabilité pour lancer les travaux de sa future cimenterie de Nomayos, au sud de Yaoundé.
La consommation nationale devrait passer de 70 kg à 200 kg par personne et par an d’ici à 2020.
Programmé « pour la fin 2013 », cet investissement de 70 millions d’euros, pris en charge par l’opérateur, doit offrir une capacité de production supplémentaire de 700 000 t par an, « susceptible de faire face à l’augmentation des marchés locaux et sous-régionaux », espère Ravi Iyer. L’usine devrait permettre également de regagner au passage quelques-unes des parts de marché grignotées ces dernières années par les différents importateurs. Le temps presse pour Cimencam, qui ne détient plus « que » 75 % du marché, contre plus de 90 % il y a trois ans. Même si, selon le directeur général de l’entreprise, « les perspectives sont suffisamment prometteuses pour qu’il y ait de la place pour tout le monde », la concurrence fourbit ses armes.
Dangote hausse le ton
Attiré par la croissance du marché camerounais et désireux de prendre pied dans la sous-région, le nigérian Dangote Cement a posé la première pierre de son usine (d’une capacité attendue de 1 million de tonnes par an) en septembre 2011, sur les berges du Wouri à Douala… juste en face de la station de broyage de Cimencam. Mais depuis le 1er mars, le projet est gelé pour cause de tracasseries administratives relatives au choix du site, pourtant attribué par l’État. Pendant qu’Aliko Dangote hausse le ton, le gouvernement tente de débloquer la situation et de relancer le dossier, qui, en plus de créer 200 emplois, injecterait 87 millions d’euros dans l’économie locale.
Un autre projet de cimenterie, lancé en 2002 et suspendu, revient dans l’actualité. L’État vient en effet de donner son feu vert au consortium sud-coréen et singapourien d’Afko Cement pour la construction à Limbé d’une unité d’une capacité de 800 000 t par an (un investissement de 40 millions d’euros). « Les travaux devraient démarrer avant la fin de l’année », confirme Mohamadou Dabo, consul honoraire de Corée du Sud à Douala.
Enfin, à l’issue de sa rencontre avec le chef de l’État camerounais, début mai, le PDG du promoteur marocain Addoha, Anas Sefrioui, a annoncé que son groupe allait investir entre 20 et 30 millions d’euros dans la construction à Douala, d’ici à la fin de 2012, d’une cimenterie d’une capacité de 500 000 à 1 million de tonnes par an.
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