Caoutchouc : pas de rebond en vue

Malgré la crise postélectorale ivoirienne, la Société africaine de plantation d’hévéas, filiale de Sifca, a affiché de belles performances en 2011. Mais le marché se dégrade et assombrit les perspectives.

SAPH est le premier producteur de caoutchouc naturel d’Afrique de l’Ouest, avec 130 000 tonnes par an. © Olivier pour J.A.

SAPH est le premier producteur de caoutchouc naturel d’Afrique de l’Ouest, avec 130 000 tonnes par an. © Olivier pour J.A.

ProfilAuteur_MichaelPauron

Publié le 8 juin 2012 Lecture : 3 minutes.

Deuil

SAPH cours_BRVML’année 2011 n’était pourtant pas gagnée. Avec la crise postélectorale, SAPH avait perdu huit véhicules, vu trois de ses cinq usines fermer et 150 000 euros disparaître… Mais surtout, elle avait été endeuillée par le décès de 23 salariés de la maison mère Sifca, dont son directeur général, Yves Lambelin. Grâce à l’anticipation de ce dernier et à sa farouche détermination malgré les risques, l’activité n’a été que partiellement suspendue. Finalement, les bénéfices ont tout de même crû de 40,31 %, pour atteindre 69,6 millions d’euros. Ces bonnes performances ont littéralement dopé le titre à la Bourse régionale des valeurs mobilières (BRVM) d’Abidjan. Le titre est passé de 28 750 F CFA le 24 mai 2011 à 48 000 F CFA le 23 mai 2012 (soit 73,20 euros), avec un pic à 53 000 F CFA le 19 mars.

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Cependant, les analystes sont unanimes pour dire que la situation en 2012 sera moins bonne au regard de l’évolution du marché mondial du caoutchouc (voir infographie). Une note de la société boursière Hudson & Cie propose même de vendre les actions de SAPH. En effet, depuis un an, les cours de la matière première ont chuté de 31 % en raison de la crise européenne et du ralentissement de la croissance en Chine : les ventes de véhicules (et donc de pneus) n’y ont progressé que de 1,3 % sur les quatre premiers mois de l’année, la plus mauvaise performance depuis 1998.

« Les cours du caoutchouc restent assez stables depuis la fin de l’année dernière, mais sensiblement en retrait par rapport à la moyenne de 2011, explique Bertrand Vignes, directeur général de Sifca. En outre, la profession s’est vu imposer une taxe de 5 % sur le chiffre d’affaires du caoutchouc granulé. D’un point de vue volume, notre performance devrait être meilleure que l’an dernier, bien que l’usinage et les ventes aient été affectés par le ralentissement économique en Europe en fin d’année dernière. »

cours caoutchouc_Osaka_0512Alors que le marché mondial accusait un déficit de 150 000 t sur la saison 2010-2011, un excédent pourrait s’installer jusqu’en 2014. La production mondiale de caoutchouc, qui devrait atteindre 11,3 millions de tonnes cette année, devrait progresser à 11,9 millions en 2013, au moment où la consommation pourrait plafonner à 11,8 millions de tonnes, prévoit l’International Rubber Study Group. Côté SAPH, Bertrand Vignes assure que « l’excédent de stock [résultant du ralentissement de l’activité européenne, NDLR] est déjà résorbé sur la première partie de 2012 ».

Michelin en soutien

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Le groupe est habitué à gérer les changements importants qui affectent le secteur depuis dix ans. Alors que les principaux débouchés de SAPH se situaient en Europe, la demande s’est fortement délocalisée vers l’Asie. Chine, Inde et Malaisie représentent aujourd’hui 50 % de la consommation mondiale de caoutchouc, tirée notamment par la forte croissance du marché de l’automobile. Mais SAPH a l’avantage de pouvoir s’appuyer sur l’un de ses actionnaires, le français Michelin (10 %), qui lui achète 50 % de sa production.

SAPH compte des extensions au Ghana, au Liberia et au Nigeria.

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La situation mondiale ne remet pas non plus en question les investissements du groupe. « SAPH continue de renouveler le verger de ses plantations existantes », rappelle Bertrand Vignes. La société a par ailleurs de nombreuses extensions en cours hors de Côte d’Ivoire. Sa filiale Ghana Rubber Estates cherche à acquérir de nouvelles surfaces et renouvelle ses anciennes plantations. Au Liberia, Cavalla Rubber Corporation, dont elle est propriétaire à 100 %, exploite désormais 30 000 ha, après avoir acquis 22 000 ha supplémentaires, et prévoit d’investir 25 millions d’euros dans les dix prochaines années et de construire une usine. Enfin, son autre filiale Rubber Estates Nigeria a entièrement modernisé l’usine d’Araromi, dans l’État d’Ondo (Sud-Est). De quoi convaincre les investisseurs à la BRVM ? Les analystes misent sur une stabilité de l’action SAPH, à 47 800 F CFA à la fin de l’année.

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