Katanga : de la mine à la minoterie, les enjeux du bukari
La préparation de ce foufou incontournable dans l’alimentation des Katangais absorbe des millions de tonnes de maïs chaque année, dont un tiers est importé. Fortement encouragée, la production locale augmente.
Le Katanga grandeur nature
Les principales zones de culture du maïs sont le Haut-Lomami, le Tanganyika et, plus marginalement, la vallée de la Lufira, ainsi que quelques poches exploitées par de petits planteurs, de grandes fermes et des sociétés d’agrobusiness privées, comme Terra – l’une des filiales de la Société minière du Katanga (Somika), fondée et dirigée par l’homme d’affaires indien Chetan Chug. Sans oublier les miniers.
Champ obligatoire
En effet, pour augmenter la production en 2007, l’exécutif provincial a invité les miniers et deux brasseries implantées au Katanga à cultiver au moins 500 ha de maïs chacun – invitation qui, début 2010, est devenue obligation (pas de champ, pas le droit d’exporter). « Un succès », selon le gouverneur Moïse Katumbi, certaines sociétés ayant cultivé jusqu’à 1 000 ha, voire plus. Ceux qui n’ont pas pu le faire ont investi dans le préfinancement d’intrants agricoles. Une politique qui a permis de diminuer les importations et d’abaisser les prix. La nouvelle loi agricole, qui prévoit des exonérations de droits de douane sur les intrants et le matériel, devrait aussi favoriser le développement de la production.
Terres promises
Dans la ceinture minière très urbanisée du Sud katangais, où la demande en produits agricoles est forte, l’accès à la terre devient difficile pour les petits agriculteurs locaux. Avec l’extension urbaine, l’essor des activités minières, l’implantation de fermes et de grandes sociétés d’agrobusiness – comme Terra (lire ci-dessus), qui possède 10 000 ha -, les espaces disponibles se réduisent et le prix des terrains a monté en flèche. Même si l’octroi de concessions aux miniers s’accompagne d’une indemnisation, cela représente une source d’insécurité foncière pour la paysannerie locale, qui s’est vu contrainte de céder des terres ?et d’aller s’installer ailleurs. L’octroi de nouvelles concessions minières et de vastes espaces à des compagnies agropastorales pourrait renforcer cette tendance. Avec le risque d’accélérer l’exode rural ou de transformer les paysans en simples journaliers. M.D.
Le maïs étant consommé principalement sous forme de bukari, la transformation est également primordiale pour la province. Dans les zones rurales, les villageois la réalisent de manière artisanale. Dans les zones urbaines, il faut mettre à disposition des consommateurs le produit fini. Une activité réalisée par les minoteries Mukalay (qui viennent d’agrandir leur unité) et Alfa Mining à Lubumbashi, ainsi que Kifita à Likasi.
Les autres minoteries, dont celles du groupe Forrest et de la Générale des carrières et des mines (Gécamines, qui produit très en deçà de sa capacité installée de 600 t par jour), réservent la farine à leur personnel. African Milling Congo Company (autre filiale de Somika), la nouvelle minoterie installée à Kinsevere, près de Lubumbashi, peut quant à elle traiter 200 t de maïs par jour. Toutefois, l’offre locale reste insuffisante. Pour combler le déficit, la province recourt donc, là encore, à l’importation de farine, principalement de Zambie ; les minoteries important par ailleurs du maïs grain pour compléter leur approvisionnement et faire tourner leurs unités.
L’augmentation de la production de maïs, dont le seul objectif actuellement est d’assurer une alimentation suffisante aux Katangais, conditionne le développement de ces unités de transformation. Elle pourrait aussi favoriser l’essor de la provenderie dans la province. Un peu partout, notamment aux abords des villes, se développent des élevages de petit bétail et de volaille, dont les besoins en son de maïs sont en expansion.
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