COP21 : « L’Éthiopie n’exploite encore que 5% de son potentiel hydroélectrique »

Alors que la COP21 s’achève le 11 décembre à Paris, Mulugeta Mengist Ayalew, conseiller spécialiste du changement climatique auprès du Premier ministre éthiopien, a fait part de ses interrogations quant à la possibilité d’arracher un accord qui permettrait le maintien du réchauffement climatique, non pas à 2 degrés mais à 1,5.

Elias Asmare / AP / SIPA © Le grand barrage hydroélectrique Renaissance.

Elias Asmare / AP / SIPA © Le grand barrage hydroélectrique Renaissance.

Publié le 8 décembre 2015 Lecture : 3 minutes.

Jeune Afrique : Que pensez-vous de l’état d’avancée des négociations ?

Mulugeta Mengist Ayalew : L’Éthiopie est un des pays les plus affectés par le changement climatique. Pour nous, il ne s’agit pas de prospective, nous le vivons déjà.  Depuis les années 1960, la température moyenne a augmenté d’un degré dans notre pays. Nous souffrons de sécheresses et d’inondations, chaque fois plus intenses. Nous espérons donc quitter Paris avec un accord dans lequel chacun s’engage de manière ambitieuse à atténuer les risques climatiques. Pour l’Afrique, nous défendons un accord qui contribuerait au maintien de la hausse des températures en dessous de 1,5 degré. C’est une nécessité vitale pour les populations et les écosystèmes.

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Êtes-vous confiant ?

Pour l’heure, beaucoup de pays, développés ou non, comme l’Arabie saoudite ou le Venezuela par exemple, résistent au changement. L’idée seule de parler d’un objectif de température provoque des crispations chez certains. Or, sans direction comment savoir vers quoi on tend ?

En tout, 95% de l’énergie électrique du pays provient des énergies renouvelables

L’Éthiopie veut réduire de 64% ses émissions de gaz à effet de serre d’ici 15 ans. Quels sont les principaux moyens mis en place ?

En tout, 95% de l’énergie électrique du pays provient des énergies renouvelables. Et dans l’hydroélectricité, notre potentiel est énorme. Nous pourrions atteindre une production allant jusqu’à 45.000 MW, contre 4.000 MW actuellement. Nous n’avons, pour l’heure, réalisé que 5% de ce que nous pourrions faire. Les travaux du barrage Renaissance – qui est financé à 100% par le gouvernement éthiopien –  sont à mi-parcours. Mais une fois achevé, ce dernier devrait fournir 6.000 MW. Cette hausse de production, la plus importante pour le pays,  va permettre de rendre l’électricité plus accessible à la population, d’exporter aux pays voisins et d’approvisionner notre industrie, nos transports.

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Qu’en est-il des différends avec vos voisins sur ce barrage ?

Les relations sont excellentes avec le Soudan et l’Égypte. Le barrage va leur permettre d’avoir un flux constant d’eau et va bénéficier à leur agriculture. Il y a eu des soucis au départ avec l’Égypte mais cela relevait plus d’un manque de confiance. Depuis nous avons négocié et tenté de rétablir cette confiance. Nous avons signé un accord et négocié la manière dont ce barrage serait opéré, rempli car c’est un barrage énorme. L’Égypte sera prioritaire pour l’achat d’électricité. Le barrage sera achevé en 2017 mais il commencera déjà à produire de l’électricité d’ici à quelques mois.

En 2050, ce coût pourrait affecter 10% de notre PIB dans un cas de scénario de sécheresse extrême

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Quel est l’impact du changement climatique sur votre économie, l’une des plus dynamiques d’Afrique ?

Si l’on en croit nos projections, en 2050, ce coût pourrait affecter 10% de notre PIB dans un cas de scénario de sécheresse extrême. Cette année, en raison de la sécheresse et de l’impact d’El Nino, 8 millions de personnes ont d’ores et déjà besoin d’une assistance humanitaire. C’est près du double par rapport aux 3 à 4 millions de personnes qui bénéficient en moyenne de l’aide du gouvernement chaque année. Faute de pluies suffisantes, les agriculteurs ont perdu leurs récoltes et ont dû avoir recours à l’aide du gouvernement.

Et en termes de maladies, quelles conséquences cette situation engendre-t-elle ?

On ne recense pas de nouvelles maladies. En revanche, certaines se sont étendues à des zones où on ne les trouvait pas avant. On voit par exemple désormais des cas de paludisme dans la banlieue de la capitale.

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