Roberto Azevêdo : « Le commerce est décisif pour concrétiser le potentiel de l’Afrique »
À la veille de la première Conférence ministérielle en Afrique de l’Organisation mondiale du commerce, qui s’ouvre demain à Nairobi, Roberto Azevêdo, le directeur général de l’OMC, défend les vertus des négociations multilatérales, alors que de plus en plus de pays du continent se tournent vers les accords commerciaux régionaux.
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Roberto Azevêdo
Roberto Azevêdo est le directeur général de l’Organisation mondiale du Commerce.
Publié le 14 décembre 2015 Lecture : 3 minutes.
Partout où je me rends, on me demande quelle sera la prochaine grande tendance de l’économie mondiale. Ma réponse est toujours : l’Afrique. Un continent dynamique où la population est la plus jeune et la croissance la plus forte. L’énergie et la détermination de chaque dirigeant et homme et femme d’affaires africains que je rencontre est remarquable. Et le commerce va jouer un rôle décisif pour concrétiser ce potentiel.
Obtenir des résultats pour l’Afrique
En 1994, à Marrakech, les nations ont créé une organisation chargée de réguler et de réformer le commerce mondial. Le 1er janvier 1995, l’OMC entre en action. Elle est de retour en Afrique pour tenir à Nairobi, du 15 au 18 décembre, sa première Conférence ministérielle sur le continent en vingt ans d’existence. Honorons cette occasion d’obtenir des résultats pour l’Afrique.
La voix de l’Afrique est celle qui s’est le plus affirmée à l’OMC ces dernières années.
La majorité des 161 membres actuels de l’OMC sont des pays en développement (PED) ou des pays moins avancés (PMA). Chacun a sa place à la table des négociations et la voix de l’Afrique est celle qui s’est le plus affirmée ces dernières années. L’OMC compte aujourd’hui 43 membres africains. Les Seychelles nous ont rejoints en avril et nous accueillerons le Liberia à Nairobi.
L’engagement des pays africains à l’OMC a été essentiel dans l’obtention du « paquet de Bali » en 2013. Les décisions en matière de développement concernent l’agriculture et la sécurité alimentaire, certaines questions relatives aux PMA (y compris sur le coton) et l’Accord sur la facilitation des échanges.
Formalités
Cet accord pourrait être clé pour faciliter l’intégration économique en Afrique. En rationalisant et en standardisant les formalités douanières et à la frontière, l’Accord contribuera à réduire de façon spectaculaire les coûts des échanges commerciaux – de plus de 16 % dans les PED. Par exemple, un appui à la facilitation des échanges ciblé a permis de réduire de trois semaines à quatre jours le temps moyen mis par un camion pour franchir la douane au port de Mombasa (Kenya) et acheminer sa marchandise jusqu’à Kampala (Ouganda). Les économies pour les entreprises sont considérables. L’Accord sur la facilitation des échanges prévoit aussi un appui sur le terrain à sa mise en œuvre.
Chaque dollar investi génère près de 8 dollars d’exportations pour les pays en développement.
L’initiative « Aide pour le commerce » que nous pilotons a permis de débourser plus de 260 milliards de dollars pour aider les pays à renforcer leurs capacités commerciales. Chaque dollar investi génère près de 8 dollars d’exportations pour les PED en général – et 20 dollars d’exportations pour les pays les plus pauvres.
À Nairobi, nous lancerons la deuxième phase du « Cadre intégré renforcé », un programme qui vise à aider les PMA à faire du commerce un levier de croissance et de lutte contre la pauvreté.
Les membres de l’OMC négocient pour obtenir des résultats à Nairobi concernant l’agriculture et le renforcement des capacités commerciales des PMA. Ces débats sont complexes mais notre parcours à ce jour démontre que nous pouvons aboutir lorsque nous nous montrons créatifs et innovants. Le paquet de Bali et la décision des membres de proroger une exemption relative aux brevets sur les médicaments pour les pays les plus pauvres sont des exemples encourageants.
À vouloir tout régler dans des instances régionales, on court le risque de marginaliser les pays en développement.
L’avenir des négociations du Cycle de Doha
Notre travail ne s’achèvera pas à Nairobi. Nous devrons aussi débattre de l’orientation à donner à notre action future, notamment concernant l’avenir des négociations du « Cycle de développement de Doha ».
Depuis son lancement en 2001, sa lente progression a poussé les pays à explorer d’autres options telles que les accords commerciaux régionaux. Ces initiatives sont positives mais ce n’est qu’au niveau multilatéral que toutes les voix se font entendre et que les problèmes de développement les plus épineux, comme celui des subventions agricoles, peuvent être réglés efficacement. À vouloir tout régler dans des instances régionales, on court le risque de marginaliser les PED et les PMA.
Le commerce s’est révélé l’un des meilleurs moyens de lutter contre la pauvreté dans l’Histoire. Son rôle fut clé pour réduire l’extrême pauvreté de moitié – selon l’Objectif du Millénaire pour le développement – et il est un élément clé des nouveaux Objectifs fixés par l’ONU. Durant les deux dernières décennies, l’OMC a aidé les économies africaines à se développer. Veillons à poursuivre cette collaboration pour obtenir davantage – en commençant à Nairobi.
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