Electrostar, un mystère qui électrise le marché

Largement délaissé il y a encore quelques semaines, le spécialiste de l’électroménager fait l’objet d’une incompréhensible frénésie sur la place tunisienne. Et déjà, les rumeurs vont bon train…

Jusqu’au 15 mars, la valeur était largement boudée par la communauté financière © Nicolas Fauque/www.imagesdetunisie.com

Jusqu’au 15 mars, la valeur était largement boudée par la communauté financière © Nicolas Fauque/www.imagesdetunisie.com

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Publié le 13 avril 2012 Lecture : 3 minutes.

D’ici à fin avril au plus tard, la publication définitive des comptes d’Electrostar permettra à la communauté financière tunisienne de savoir, très précisément, quelle est l’ampleur des dégâts chez le spécialiste de l’assemblage et de la distribution de produits blancs (appareils électroménagers, climatiseurs). Loué pendant plusieurs années pour son dynamisme et sa grande efficacité commerciale, le groupe a vécu dix-huit mois extrêmement difficiles, du fait à la fois de l’impact de la révolution sur ses stocks (en partie détruits) et sur ses ventes, et des longues négociations avec ses créanciers.

16 millions de dinars de coûts

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115,5 % : l'envolée du cours d'Electrostar entre le 15 mars et le 5 avril 2012.

Selon les premiers résultats communiqués à la Bourse de Tunis, la filiale du groupe Hachicha (70 % du capital) verrait son chiffre d’affaires baisser de 19 %. « Les dégâts enregistrés début 2011 ont coûté environ 16 millions de dinars [8,2 millions d’euros, NDLR], rappelle Rim Bergaoui, directrice administrative et financière d’Electrostar. Le montant remboursé par les assurances s’élève à 2,7 millions de dinars, soit 17 % du montant des dommages. » Pour éviter que cela ne se traduise par de vertigineuses pertes, un rééchelonnement bancaire a été mis en place, via un crédit à moyen terme d’environ 16 millions de dinars, avec les partenaires financiers du groupe. L’endettement de l’entreprise a donc explosé, au point d’être aujourd’hui son principal point noir.
Mais, grâce à ce montage financier, la profitabilité devrait être préservée. Electrostar a annoncé fin 2011 qu’elle s’attendait à un résultat net compris entre 500 000 et 1 million de dinars sur l’ensemble de l’année, un petit ballon d’oxygène après les 18,7 millions de dinars de pertes enregistrées en 2010.

Malgré une situation financière très difficile, le cours de Bourse connaît actuellement une véritable envolée. Depuis le 15 mars et en une quinzaine de séances, il a gagné 115,5 %, pour s’établir le 5 avril à 8,19 dinars. Chaque jour, 20 000 titres en moyenne ont changé de main, contre moins de 500 au cours des deux mois qui ont précédé. Cette toute petite valeur, peu liquide, a vu sa part dans les échanges multipliée par 50. « Il n’y a aucune raison fondamentale à cet intérêt et à cette progression », tranche un analyste qui, comme toute la profession, s’interroge sur les raisons de ce brusque engouement.

Electrostar : une activité en dents de scie.

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Délit d’initié ?

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Retards réguliers dans la publication des documents financiers, absence de communication récurrente auprès des analystes ou encore rapports annuels inaccessibles en ligne et très succincts… La société n’est pas réputée pour sa transparence et était auparavant largement boudée par la communauté financière tunisienne. Interrogée par Jeune Afrique, Rim Bergaoui confirme les éléments fournis quelques jours plus tôt au Conseil du marché financier. « Aucune information, aucun événement susceptible de provoquer une telle hausse du cours et de la quantité de titres échangés ou de l’expliquer n’est intervenu », affirme-t-elle. Délit d’initié caractérisé, tentative de prise de contrôle prochaine… Autant de rumeurs qui circulaient, début avril, sur le marché, où l’on évoquait aussi l’existence de négociations avec un groupe égyptien leader dans l’électroménager.

Electrostar, en attendant, confirme ses ambitions de redressement. « La direction a annoncé un doublement de son chiffre d’affaires en 2012, à 100 millions de dinars, pour un bénéfice de 2,5 millions », souligne Myriam Dhib, analyste chez Maxula Bourse et l’une des rares personnes présentes à la dernière assemblée générale d’Electrostar, en décembre. Fort de sa relation privilégiée mais non exclusive avec le sud-coréen LG et de plusieurs accords de distribution avec Indesit et Electrolux, le groupe compte aussi sur le déploiement de la marque chinoise d’entrée de gamme Midea pour doper ses ventes. Il affirme enfin que la suspension du marché parallèle – spécialité de la famille Trabelsi avant la révolution – est quelque chose d’extrêmement positif.

Peu de relais de croissance

Historiquement élevé, le taux d’endettement a bondi de 136,4 % en 2009 à 551 % en 2010, selon Maxula Bourse.

Néanmoins, plusieurs éléments demeurent inquiétants. Les pertes abyssales enregistrées en 2010 ont lourdement réduit les fonds propres, rendant indispensable une recapitalisation prochaine. En termes de relais de croissance, les perspectives sont limitées. Electrostar a cédé fin 2009 ses activités en Algérie, portées par sa filiale locale Sodinco, à une autre structure du groupe Hachicha, pour une plus-value modeste (263 157 dinars). À l’époque, la nature « de plus en plus inaccessible pour les opérateurs étrangers » du marché algérien avait été mise en avant. Electrostar s’était alors coupé de tout espoir de développement hors des frontières tunisiennes, concentrant ses activités sur son seul marché domestique, très concurrentiel et désormais plutôt bien équipé.

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