Ce que l’histoire d’un maçon sénégalais peut nous apprendre
À l’oeuvre depuis le petit matin un jeune maçon sénégalais élève un mur. Il manie la truelle, étale le mortier, place ses briques avec précision. Sa dextérité laisse oublier qu’il y a trois ans, Mustapha n’avait ni métier, ni qualifications.
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Clément Dagneaux
Associé à l’Atelier Koé, concepteur d’architecture en terre crue au Sénégal.
Publié le 22 décembre 2015 Lecture : 2 minutes.
Employé comme manœuvre au sein d’une équipe de trente ouvriers, sa détermination et son engagement lui ont permis de progresser rapidement et de se former. Il est désormais l’un des piliers du chantier. Nourri et logé à proximité, il met avec fierté une grande partie de son salaire à contribution du foyer familial et aide ainsi quotidiennement plus d’une dizaine de personnes.
Aujourd’hui le mur qu’il bâtit n’est pas fait de parpaings, mais de briques de terre compressée, et édifié selon des méthodes millénaires. La terre argileuse – matière première – est recueillie in situ. Le sable et la chaux arrivent de carrières à proximité. Le mélange est moulé et séché sur place.
Simplicité constructive
Cette simplicité constructive laisse oublier qu’il y à trois ans Mustapha ne connaissait que le béton et l’aggloméré.
Des méthodes jeunes, bon marché et peu durables qui avaient éclipsé un patrimoine fait de choses simples modelées par la main de l’homme. Désormais, peut-être inconsciemment, il entretient et cultive l’héritage de sa terre jusque là stigmatisée.
Le germe d’une construction plus responsable, moins impactante et biodégradable grandit maintenant en lui. Il devient le vecteur de l’appréhension, de la connaissance, de la transmission d’une autre valeur du sol. Il est désormais porteur d’une énergie positive.
Cette réalité laisse oublier qu’il y a trois ans Mustapha n’avait rien d’une figure de la résilience africaine.
Améliorer quotidiennement son environnement
Un renouveau humain, social, philosophique, constructif fondé sur l’apprentissage et la formation, qui lui permet, comme tant d’autres, d’améliorer quotidiennement son environnement.
Un progrès aujourd’hui encouragé et entretenu par des petits acteurs locaux, non seulement dans le domaine de la construction par des ateliers d’architecture engagés, mais également par des missions de protection de l’enfance, des centres de protection marine, des associations de reboisement, des organisations de réinsertion sportive, […] qui réalisent un travail de terrain quotidien avec l’optimisme du premier jour.
Des forces vives, volontaires et actives développant des projets humains, qui sont trop souvent éclipsés par un processus de développement global, de directives générales et de grands travaux.
Complémentarité entre globalité et localité
La recherche de cette complémentarité entre globalité et localité est la clef dans la durabilité et la stabilité d’un futur sénégalais. Il s’agit ici de trouver un point équilibre, une source de dialogue afin de pouvoir échanger et envisager des solutions adaptées, dans une dynamique riche et enthousiaste.
Le récit de Mustapha est bien plus qu’un simple appel aux alternatives constructives et à l’amélioration de l’environnement bâti d’Afrique de l’ouest.
Il s’agit d’un témoignage réel qui aborde les questions urbaines et sociales pressantes, de manière optimiste et philanthropique, en cherchant à impliquer et à sensibiliser les citoyens, les collectivités locales mais aussi les politiciens et les personnalités influentes.
Ce récit est là pour stimuler la réflexion, ouvrir la discussion, et tendre des mains. Il s’agit à présent de trouver la place du dialogue, c’est-à-dire le lieu et le temps de l’échange, de l’apprentissage et de la construction.
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