Nigeria : Access Bank au pied du podium

Grâce à l’acquisition d’Intercontinental Bank, le groupe Access Bank a doublé son total de bilan et multiplié par près de dix le nombre de ses clients. Mais, comme la majorité des établissements du pays, il reste fragile.

En Côte d’Ivoire, la banque panafricaine a affiché des pertes de 5,2 millions d’euros en 2011. © Vincent Fournier/J.A.

En Côte d’Ivoire, la banque panafricaine a affiché des pertes de 5,2 millions d’euros en 2011. © Vincent Fournier/J.A.

ProfilAuteur_FredMaury

Publié le 18 avril 2012 Lecture : 4 minutes.

Le jeune directeur général d’Access Bank, Aigboje Aig-Imoukhuede (45 ans), est le chouchou des marchés. Alors qu’il entame sa deuxième décennie à la tête de la banque nigériane, il a tenu sa promesse, faite dès 2002 : hisser l’institution parmi les tout premiers établissements du pays et, incidemment, d’Afrique.

Après des années de forte croissance, l’acquisition d’Intercontinental Bank, scellée en septembre, a définitivement consacré la place d’Access Bank dans le top 5 nigérian, non loin des trois leaders historiques que sont First Bank of Nigeria, United Bank for Africa et, dans une moindre mesure, Zenith Bank.

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Solide performance

L’effet taille a été immédiat : le total des actifs du nouvel ensemble a plus que doublé, pour atteindre 7,8 milliards d’euros (1 635 milliards de nairas), quand le total des dépôts progressait de 126 %. Surtout, le groupe, très tourné vers les entreprises (600 000 clients mi-2011), s’est mué en mastodonte, avec 5,7 millions de clients et un réseau bancaire de plus de 300 agences.

Fin 2011, à peine 50% du business en dehors du Nigeria était rentable. Abiola Rasaq, Vetiva Capital

Malgré son coût (230 millions d’euros), l’acquisition d’Intercontinental Bank ne s’est pas traduite par une baisse des profits : en 2011, Access Bank a vu ses bénéfices nets bondir de 41 %, à 74,3 millions d’euros. Une solide performance saluée par la communauté financière. Après avoir perdu 45,8 % de sa valeur sur les onze premiers mois de 2011, le cours boursier a gagné 37,8 % à la suite de la finalisation de l’opération.

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« Access Bank a une histoire impressionnante en matière de fusion, notamment depuis la consolidation qui a eu lieu en 2005 et 2006 », se réjouit Kayode Tinuoye, analyste pour le courtier nigérian Afrinvest. Néanmoins, dans un paysage bancaire fragile (lire encadré), Access Bank ne fait pas illusion. « Aucune des banques nigérianes notées par Fitch Ratings n’affiche une note de viabilité au-dessus de B, ce qui signifie une qualité de crédit hautement spéculative », pondèrent Denzil De Bie et Éric Dupont, analystes auprès de l’agence de notation, soulignant la faiblesse de la gouvernance d’entreprise et de la transparence dans le pays.

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Confronté à l’envolée de ses charges, Access Bank s’est séparé de 1 500 employés d’Intercontinental Bank, selon la presse nigériane. En matière de risque crédit, si le groupe s’est délesté en 2011 de créances en souffrance auprès de l’Asset Management Company of Nigeria (Amcon, structure de défaisance publique), beaucoup reste à faire.

Rationalisation

5,7 millions de clients et un réseau bancaire de plus de 300 agences.

Au Nigeria, l’année qui s’est ouverte sera donc celle de la rationalisation et de l’intégration. Quant à la stratégie sur le reste du continent, les indications sont peu nombreuses.
« Notre vision baissière concernant les opérations à l’étranger reste justifiée, eu égard à leur contribution déclinante : 9 % en moyenne pour les revenus opérationnels, contre 12 % en 2010, explique Abiola Rasaq, analyste pour le courtier nigérian Vetiva Capital. Si l’expansion en Afrique offre des opportunités attractives en matière de financement du commerce, le cadre institutionnel fragile et la faiblesse des relations commerciales du Nigeria avec les autres pays du continent restent un défi. »

Repositionnement 

Avec United Bank for Africa, Access Bank a pourtant été l’une des premières banques locales à entreprendre une réelle politique de développement en Afrique. Entre 2007 et 2009, Omnifinance (Côte d’Ivoire), Bancor (Rwanda) et Banque privée du Congo (RD Congo) sont tombés dans son escarcelle.

Fin 2009, le groupe était présent dans huit pays africains en dehors du Nigeria. Depuis, plus rien… Pire, après le déclenchement de la crise ivoirienne, Access Bank a annoncé son repositionnement stratégique dans ce pays : exit les particuliers, cap sur le corporate. Fin 2011, Access Bank se situait toujours au 15e rang ivoirien en matière de ressources et au 17e pour les crédits. Pas de quoi pavoiser. 

« Le management tient à transformer les opérations existantes en entreprises profitables avant toute incursion supplémentaire dans de nouveaux pays, souligne Abiola Rasaq, de Vetiva Capital. Il faut se rappeler qu’à peine 50 % du business africain en dehors du Nigeria était rentable fin 2011. » L’année dernière, les quatre filiales africaines déficitaires ont perdu 7,9 millions d’euros en tout… dont 5,2 millions pour les seules activités ivoiriennes.

Le grand ménage continue

La saison des résultats annuels bat son plein. Deux des principales banques du Nigeria ont déjà tiré la sonnette d’alarme. United Bank for Africa a précisé s’attendre à un déficit en 2011 et First City Monument Bank – jusqu’ici un modèle de rentabilité – a chiffré à 46,6 millions d’euros sa perte nette annuelle, contre 38,9 millions d’euros de bénéfices en 2010. Pour l’ensemble du secteur bancaire, le nettoyage des comptes est à l’origine de ces déboires. Selon des chiffres cités par Renaissance Capital, l’Amcon, structure de défaisance créée mi-2010, aurait acquis pour 15 milliards d’euros de créances douteuses, soit environ 30 % du total des crédits bancaires. L’espoir des autorités bancaires est que les provisionnements massifs et les opérations avec l’Amcon permettent aux établissements nigérians de repartir rapidement sur les bons rails. F.-M.

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