« Chez Ambroise » à Abidjan, tous à la même enseigne
Depuis tout petit, j’ai toujours su que j’ouvrirais un jour ma propre affaire. Si bien qu’à la fin des années 1990, lorsque l’occasion de voler de mes propres ailes s’est présentée, je n’ai pas hésité une seconde.
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Ambroise Kouakou
Propriétaire du maquis « Chez Ambroise », à Abidjan.
Publié le 13 janvier 2016 Lecture : 3 minutes.
Côte d’Ivoire : c’est déjà demain
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Je venais de passer douze années à la Caisse de stabilisation (Caistab) et quelques autres dans une société de pneumatiques où je ne m’investissais pas vraiment, et je rêvais d’un nouveau départ.
Mon père, l’acteur Bertin Kouakou, que nombre d’Ivoiriens connaissent pour avoir joué dans des films (La Victoire en chantant, Bal poussière, etc.) et des publicités, venait de mourir. Il fallait donc reprendre le maquis qu’il avait eu l’idée d’ouvrir en 1984, juste en face de notre maison familiale, dans la commune de Marcory. Peu de gens le savent, mais c’est là que je suis né et que j’ai grandi.
À l’époque, le maquis s’appelait Ahengoué, qui veut dire « entre amis », en baoulé. En souvenir de mon père, je l’ai d’abord rebaptisé Agonda Beach, association du nom de notre village d’origine et du mot « plage », en anglais, car j’avais eu l’idée d’en faire un établissement de plein air en utilisant une partie de la place qu’il jouxtait et en y déversant du sable. Une plage en pleine ville !
Le 23 décembre 1999, j’ouvrais. Le lendemain, un coup d’État, le premier de l’histoire de la Côte d’Ivoire, faisait tomber le président Henri Konan Bédié. Il faudra près de trois semaines pour que la situation se normalise et que nous rouvrions. Depuis lors, rien ne nous a jamais plus arrêtés, mis à part, parfois, quelques intempéries.
Politiques, artistes, sportifs, journalistes, Ivoiriens ou étrangers… Tout le monde passe chez Ambroise
Je pense qu’au début le nom de mon père m’a vraiment aidé. Beaucoup venaient voir ce qu’il était advenu du maquis du vieux Bertin, ce que nous en avions fait, avec mes frères et sœurs. Et très vite, notre réputation n’a plus été à faire. Pendant la décennie de crise, les soldats français du 43e bataillon d’infanterie de marine (Bima), qui faisaient déjà partie de mes clients les plus assidus, ont été rejoints par ceux de la force Licorne. Ils surnommaient l’établissement « la cantine ».
Politiques, artistes, sportifs, journalistes, Ivoiriens ou étrangers… Tout le monde passe chez Ambroise. J’en suis très fier et, tous les jours, je rends grâce au bon Dieu pour cela. J’aime bien aussi faire le beau en racontant, par exemple, comment, il y a quelques années, l’épouse de notre actuel ministre de l’Intérieur, Hamed Bakayoko, a organisé pour lui un anniversaire surprise dans mon maquis.
Ils sont nombreux à m’avoir marqué. Le Sénégalais Macky Sall (lorsqu’il n’était encore que candidat à la présidence de son pays), la journaliste française Christine Ockrent, les onze Éléphants de notre équipe nationale de football, la légende ghanéenne du ballon rond Abedi Pelé, le rappeur haïtien Wyclef Jean, la chanteuse américaine Keri Hilson, l’acteur et réalisateur français Richard Berry…
Tout le monde est logé à la même enseigne et mange ses brochettes d’escargots ou ses poissons braisés les pieds dans le sable
Récemment, le chanteur belge Stromae est aussi passé. Lorsqu’il a commencé à manger, il a commis l’erreur de signer quelques autographes… Il lui a été impossible de s’arrêter ensuite, tant les fans étaient nombreux. Dans une ville aussi connectée que la nôtre, il suffit qu’une personne vous photographie et balance que vous êtes chez Ambroise pour que tout Abidjan débarque au maquis ! Car tout le monde sait où c’est, Chez Ambroise… et il n’y a pas vraiment de carré VIP. Tout le monde est logé à la même enseigne et mange ses brochettes d’escargots ou ses poissons braisés les pieds dans le sable.
Un soir, le footballeur camerounais Samuel Eto’o a dû être carrément exfiltré par ses gardes du corps, et nous avons fini par lui apporter son repas à domicile. Didier Drogba, lui, a trouvé la parade. Lorsqu’il vient, il demande gentiment à tout le monde de le laisser manger d’abord, en promettant des échanges par la suite. Et ça marche !
Alors oui, ces milliers de souvenirs et d’instants privilégiés vécus par le seul partage d’un repas en famille ou entre amis font certainement de moi « l’un des dix premiers Abidjanais ». Premiers en quoi, me direz-vous ? En « vivance », comme on dit chez nous, c’est-à-dire en plaisir de vivre… en bon vivant.
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