Djibouti : les tensions politiques derrière les affrontements meurtriers du 21 décembre
Les affrontements du 21 décembre entre la police et les membres d’un clan Issa à Balbala, ont fait monter la tension d’un cran à Djibouti, dans le contexte tendu des élections électorales, attendues pour avril 2016.
Si le rassemblement le lundi matin aux aurores, de plusieurs centaines de fidèles de la communauté Yonis Moussa, du clan Issa, dans la banlieue de la capitale, se voulait culturel et religieux, il a pris une tournure politique suite à la répression féroce des forces de l’ordre, qui aurait fait 7 morts selon le gouvernement, près d’une trentaine pour la Ligue djiboutienne des droits humains (LDDH).
Surtout que quelques heures plus tard, la police menait une nouvelle opération musclée au domicile de l’un des cadres de l’Union pour le salut national (USN), qui se soldait par l’arrestation de sept membres de la coalition des partis d’opposition. « Les premiers éléments d’enquêtes ont permis l’identification de sept personnes ayant organisé les évènements de la matinée », a justifié dans la foulée Hassan Omar, le ministre de l’intérieur.
Le rassemblement a dégénéré lorsque la police s’est appuyée sur les mesures exceptionnelles de sécurité prises par le gouvernement au lendemain de l’attentat de Bamako, le 20 novembre – et qui depuis interdit les rassemblements sur la voie publique -, pour tenter de déplacer l’événement, contre l’avis des fidèles. Des contestations auraient alors grandi dans les rangs des participants, constitués entre autres de plusieurs centaines de nomades, arrivés avec armes et bagages de la frontière avec l’Éthiopie.
Des couteaux, des haches auraient alors été brandies et des pierres lancées vers les forces de l’ordre, « surprises par une telle réaction », selon un témoin.
Rapidement dépassées, celles-ci ont alors ouvert le feu à balles réelles sur la foule, avant de demander le renfort de la garde présidentielle.
Le gouvernement parle d’une cinquantaine de policiers blessés lors des affrontements, Hassan Omar dénonçant une manifestation « orchestrée par des individus agissant depuis l’étranger ».
Des accusations du pouvoir contre Adbourahman Boreh
L’ombre et l’argent d’Abdourahman Boreh plane sur la journée du 21. L’ancien directeur du port fait aujourd’hui l’objet d’un mandat d’arrêt lancé par les autorités djiboutiennes pour corruption. En effet, cet ancien proche du chef de l’État Ismaïl Omar Guelleh (IOG) est devenu son adversaire le plus acharné.
Membre lui-même de la communauté Yonis Moussa, il est fortement soupçonné par le pouvoir de financer l’USN. De là à faire le lien entre son rôle d’opposant et les événements du 21 décembre, il n’y a qu’un pas que le gouvernement a rapidement franchi.
À cinq mois de l’élection présidentielle, et quelques semaines seulement après la confirmation qu’IOG allait briguer un quatrième mandat, le dialogue semble au point mort entre le camp présidentiel et l’opposition. En cause, la mise en place d’une Commission électorale nationale indépendante (CENI) imposée dans les négociations par l’USN à un IOG qui ne veut pas en entendre parler.
Toujours aussi fractionnée, l’opposition pourrait être tentée de s’entendre à minima sur un nouveau boycott du processus électoral à venir si la situation ne se débloque pas. « Ce serait alors un véritable retour en arrière après sa participation en 2013 », s’inquiète un observateur étranger.
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