Bénin : à Hêvé, l’acteur Djimon Hounsou veut capturer l’« esprit » du vaudou

À Hêvé, l’acteur américano-béninois Djimon Hounsou se fait réalisateur et tente de capturer l’« esprit » du vaudou à travers un documentaire sur cette religion née au Bénin et qui a essaimé jusqu’au continent américain.

L’acteur bénino-américain Djimon Hounsou (à g.) lors du tournage du film à Hêvé, dans le sud-ouest du Bénin, le 12 décembre 2015. © Delphine Bousquet/AFP

L’acteur bénino-américain Djimon Hounsou (à g.) lors du tournage du film à Hêvé, dans le sud-ouest du Bénin, le 12 décembre 2015. © Delphine Bousquet/AFP

Publié le 5 janvier 2016 Lecture : 3 minutes.

Le tournage de « In Search of Voodoo : Roots to Heaven » (À la recherche du vaudou : les racines du paradis) a débuté mi-décembre dans ce petit village du sud-ouest du pays. « Je suis comme un Africain qui revient chez lui, qui a besoin de savoir et d’avoir des notions de sa culture », affirme Djimon Hounsou, qui a quitté très jeune son pays natal.

Il est désormais l’un des acteurs noirs les plus connus après avoir joué dans « Gladiator » aux côtés de Russell Crowe, « Amistad » de Steven Spielberg ou partagé la vedette avec Leonardo di Caprio dans « Blood Diamond », l’histoire d’un trafiquant de diamants pendant la guerre civile en Sierra Leone.

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« Il y a des esprits partout »

« Le vodoun [terme utilisé au Bénin, NDRL], c’est une partie de nos traditions, de notre culture », explique-t-il, soulignant avoir commencé à se poser des questions sur ce rite « après avoir passé tant de temps en Europe et aux États-Unis, et en voyant au sein de la diaspora africaine des traditions qui ressemblent aux nôtres ».

Le vaudou a essaimé aux Antilles et au Brésil dans le sillage de la traite des esclaves. On le retrouve aussi dans le sud des Etats-Unis. Au Bénin, cette religion bâtie autour des forces de la nature (air, eau, terre, feu) et du culte des ancêtres est très présente. D’après le dernier recensement, qui date de 2002, il y aurait 17% de vaudouisants, 27% de catholiques et 24% de musulmans. Mais de nombreux Béninois, qui vont à l’église ou à la mosquée, ont aussi un petit temple vaudou chez eux.

Djimon Hounsou veut montrer la réalité du vaudou et le dédiaboliser. « Vodoun, ça veut dire esprit. Il y a des esprits partout. Le feu qui chauffe le repas peut brûler ta maison. L’eau qui étanche la soif peut te noyer. Donc le vodoun est partout ». Il reconnaît que le cinéma a contribué à le peindre négativement, comme le célèbre opus de James Bond « Vivre et laisser mourir » où un dictateur utilise le vaudou pour inspirer la peur aux habitants d’une île des Caraïbes.

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Le chemin du Vodoun 

« Cette vision remonte à l’esclavage, dit l’acteur. C’est pour ça qu’il faut éclaircir ce qui définit le vodoun. Ceux qui pratiquent ici ne sont pas des méchants, ni des sauvages ».

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L’équipe est venue à Hêvé filmer des adeptes de Dan, divinité de l’air, et de Mami Wata, divinité aquatique, vêtus de pagnes blancs et parés de perles. Djimon Hounsou se mêle à une procession et entre dans une concession pour une cérémonie. Chez les femmes, seules les initiées peuvent approcher. Les tam-tams résonnent, les chants s’élèvent au-dessus de la palissade.

Le village n’a pas été choisi au hasard. « A Hêvé, ces divinités sont encore grandement conservées et les adeptes sont restés sur le chemin du vodoun », explique David Koffi Aza. « Cela veut dire que le village n’a pas été investi par les religions importées », ajoute ce prêtre du Fâ, science divinatoire utilisée dans le vaudou, qui sert de guide pendant le tournage.

On s’est dit qu’il était temps de changer la narration sur l’Afrique et le vaudou est une histoire qui a été très mal racontée

Djimon Hounsou est accompagné par Sorious Samura, journaliste sierra-léonais et coréalisateur. Les deux hommes se sont rencontrés il y a neuf ans sur le tournage de « Blood Diamond », basé sur son documentaire « Cry Freetown » qui racontait la guerre civile dans son pays.

« On s’est dit qu’il était temps de changer la narration sur l’Afrique et le vaudou est une histoire qui a été très mal racontée. On pense sorcellerie, magie, mal. Même nous les Africains, parce que c’est tellement rentré dans notre psyché. Ce qu’on veut faire, c’est comme peler un oignon pour que les gens comprennent ce qu’il y a au coeur », témoigne le journaliste, plusieurs fois primé pour son travail.

Djimon Hounsou ne veut pas faire la promotion du vaudou. « Il n’en a pas besoin! Il existe depuis des siècles, il est toujours là. Il ne te force pas à venir vers lui et ne discrimine pas ».

Le budget du film n’est pas dévoilé. L’acteur a en tout cas réussi à faire participer l’Etat béninois. Le tournage doit se terminer le 10 janvier, jour de la fête du vaudou célébrée partout au Bénin, et le documentaire devrait sortir courant 2016.

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