Tunisie : les surprises d’un remaniement longtemps attendu

Le Premier ministre tunisien Habib Essid a annoncé mercredi un remaniement de son gouvernement. Tout en respectant les équilibres politiques fondamentaux du Parlement, celui-ci réserve quelques surprises.

Habib Essid, à Carthage, le 8 janvier 2015. © Ons Abid / J.A.

Habib Essid, à Carthage, le 8 janvier 2015. © Ons Abid / J.A.

Publié le 6 janvier 2016 Lecture : 3 minutes.

Mercredi 6 janvier, Habib Essid a pris de court ceux qui accordaient du crédit aux rumeurs laissant entendre que le changement de gouvernement – attendu depuis de long mois – ne serait annoncé qu’après le congrès que doit tenir Nidaa Tounès en cette fin de semaine. Le chef du gouvernement n’opère pas une refonte totale de son équipe mais effectue des ajustements importants, même si certains répondent plus à la conjoncture et aux contraintes politiques qu’aux véritables besoins des secteurs concernés.

Première surprise de taille : le départ de Najem Gharsalli, ministre de l’Intérieur qui n’avait pas été remis en question malgré trois attentats terroristes d’envergure. Il est remplacé par un homme de la maison, Hédi Majdoub, ancien secrétaire d’État chargé des collectivités locales qui avait été le chef de cabinet de Habib Essid puis d’Ali Larayedh de 2011 à 2014.

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Deuxième surprise : Othman Battikh, ministre des Affaires religieuses, qui avait tenu tête aux islamistes au sujet de la nomination de certains imams radicaux, a été écarté, en raison vraisemblablement des pressions du parti d’Ennahdha.

Influence d’Ennahdha 

Si on s’interrogeait sur l’influence du parti islamiste, ce remaniement apporte des réponses puisqu’il place trois de ses proches à des postes clés : Omar Mansour à la justice, Mongi Marzouk ministre de l’Énergie et des Mines et Nejmeddine Hamrouni réintègre le Premier ministère en tant que conseiller en prospective. À noter également le maintien de Zied Ladhari, ministre de l’Emploi et de la Formation professionnelle, unique ministre d’Ennahda  de l’exécutif sortant.

Troisième surprise : le remplacement de Ahmed Ammar Younbaï au poste de ministre des Affaires sociales par Mahmoud Ben Romdhane, un économiste qui avait été jusque là en poste aux Transports.

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Les remplacements prévisibles

Quant à la reprise en main de la Culture et de la sauvegarde du patrimoine par la cantatrice et militante Sonia Mbarek, elle n’est pas vraiment étonnante tant le bilan de Latifa Lakhdar, à laquelle elle succède, était jugé faible.

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Le remplacement de Taïeb Baccouche aux Affaires étrangères était de même prévisible, au vu des divergences de ce dernier avec Carthage en matière de diplomatie. L’homme d’affaires et porte-parole de l’Union patriotique libre, Mohsen Hassen, atterrit quant à lui au Commerce – alors que ses compétences avaient été mises en doute quand il avait été pressenti au tourisme début 2014 – ,tandis que les secrétariats d’État ont été supprimés, certains de leurs occupants étant promus : Anis Ghedira aux Transports, Youssef Chahed aux Affaires locales.

Les indépendants éloignés

Le nouveau gouvernement Essid éloigne aussi les indépendants, tout en renouvelant sa confiance à certains ministres dont l’efficacité était pourtant mise en cause, comme Selma Elloumi, ministre du Tourisme. Les portefeuilles de souveraineté sont tenus par des proches de Béji Caïd Essebsi tel que Khemais Jhinaoui aux Affaires étrangères, ou comme Khaled Chouket, figure de l’aile de Nidaa Tounès qui œuvre à un rapprochement avec les islamistes, et qui a lui été promu porte-parole du gouvernement.

Le remaniement partiel respecte toujours les délicats équilibres électoraux en reflétant la composition de l’Assemblée des représentants du peuple (ARP). Même l’opposition n’a élevé aucune critique. Bien au contraire, elle souhaite bon vent au deuxième gouvernement Essid… Reste maintenant à sortir la Tunisie du gouffre.

Les nouvelles nominations du gouvernement Essid II :

– Omar Mansour, ministre de la Justice

– Hédi Majdoub, ministre de l’Intérieur

– Khemais Jhinaoui, ministre des Affaires étrangères

– Mohamed Khalil, ministre des Affaires religieuses

– Youssef Chahed, ministre des Affaires locales

– Mahmoud Ben Romdhane, ministre des Affaires sociales

– Sonia Mbarek, ministre de la Culture

– Mongi Marzouk, ministre de l’Énergie et des Mines

– Mohsen Hassan, ministre du Commerce

– Anis Ghedira, ministre du Transport

– Kamel Jendoubi, ministre chargé des Relations avec les Instances constitutionnelles, la Société civile et les Organisations des droits de l’Homme

– Kamel Ayadi, ministre de la Fonction publique, de la Gouvernance et de la Lutte contre la corruption

– Khaled Chouket, ministre chargé des Relations avec le Parlement et porte-parole du gouvernement

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