2016, l’année des marathons présidentiels
Après une année 2015 marquée, sur le plan électoral et démocratique, par le sursaut nigérian et l’heureux dénouement de la « révolution » burkinabè, que nous réserve 2016 ?
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Marwane Ben Yahmed
Directeur de publication de Jeune Afrique.
Publié le 11 janvier 2016 Lecture : 3 minutes.
Première certitude, le continent sera pris de fièvre présidentielle avec pas moins de seize scrutins au programme. Dans le désordre chronologique : Gambie, Cap-Vert, Ghana, Bénin, Niger, Tchad, Centrafrique (en cours), Congo, Gabon, RD Congo, Guinée équatoriale, São Tomé-et-Príncipe, Ouganda, Zambie, Djibouti et Comores. Parmi eux, il y a ceux qui, en principe – mais depuis la chute de Compaoré, évitons de nous muer trop facilement en haruspices -, ne devraient pas donner lieu à des bouleversements ni, a fortiori, à des alternances.
Nous citerons la Gambie de l’instable mais indéboulonnable Yahya Jammeh, la Guinée équatoriale d’Obiang, le Congo de Sassou, le Djibouti d’Ismaïl Omar Guelleh, l’Ouganda de Museveni, voire le Tchad de Déby Itno. Un siècle et demi d’exercice du pouvoir à eux six, excusez du peu ! Étrange prime aux dinosaures de la politique africaine, qui voient le temps jouer pour eux : plus longtemps vous vous maintenez au pouvoir, moins vous risquez d’être contesté dans les urnes et de perdre votre fauteuil…
Deuxième cas de figure, plus intéressant pour nous journalistes ou observateurs, celui où le changement, au moins de tête, est possible, voire certain. Notamment quand le chef de l’État ne peut pas se représenter – c’est plus simple -, comme au Bénin de Boni Yayi, aux Comores d’Ikililou Dhoinine ou, fin de transition oblige, en Centrafrique. Suspense garanti donc, surtout au Bénin, où les candidats de poids sont légion, comme les possibilités d’alliance au second tour ; Lionel Zinsou, Abdoulaye Bio Tchané, Pascal Koupaki, Léhady Soglo, Robert Gbian, Emmanuel Golou ou les tycoons Patrice Talon et Sébastien Ajavon, entre autres, sont en lice pour un scrutin qui aura rarement été aussi ouvert. En Centrafrique, second tour prévu le 31 janvier entre Anicet-Georges Dologuélé et Faustin Archange Touadéra. Un match à l’issue incertaine au-dessus duquel plane l’ombre de l’ancien président François Bozizé…
Au Ghana, on nous promet la passionnante revanche de 2012 entre le président sortant, John Dramani Mahama, et Nana Akufo-Addo
Les surprises sont aussi possibles quand la transparence du scrutin semble, autant que faire se peut, assurée, comme au Ghana, où l’on nous promet la passionnante revanche de 2012 entre le président sortant, John Dramani Mahama, et Nana Akufo-Addo. Ou au Niger, qui verra Mahamadou Issoufou briguer un second mandat en février face à une opposition certes affaiblie par l’emprisonnement de Hama Amadou, mais qui n’a pas encore dit son dernier mot.
Reste les présidentielles « à problème ». Du moins potentiellement. Contexte déjà tendu, trop nombreuses incertitudes, calendrier flou. Si l’on considère que le scrutin doit se tenir, aux termes de la Constitution, en 2016, les mois à venir en RD Congo s’annoncent à haut risque. A fortiori pour un pays qui, depuis l’indépendance, n’a connu que des alternances pour le moins brutales. Surtout si Joseph Kabila décide de jouer la montre ou, pis, de se représenter après révision de la Constitution.
Moins inquiétant, mais à surveiller tout de même, le Gabon. S’il ne fait aucun doute qu’Ali Bongo Ondimba (ABO) se lancera à la conquête d’un second septennat, se pose aujourd’hui la question des adversaires qu’il devra affronter, dans un climat social que la chute brutale des cours du pétrole a fatalement dégradé. L’opposition, qui peine à s’entendre sur une candidature unique, alors que le scrutin n’est qu’à un tour, prendra-telle le risque, en cas d’échec, de miser sur la rue ou le chaos, comme ce fut le cas en 2009 ? Que se passerait-il si d’aventure – envisageons tous les scénarios – ABO était éjecté du Palais du bord de mer ? Quel rôle joueront des pays voisins qui, déjà il y a sept ans, n’avaient pas fait grand-chose pour apaiser les tensions ou masquer leur soutien à tel ou tel concurrent du fils d’Omar ?
Ces seize scrutins représentent autant de tests et de chantiers cruciaux. Leur organisation, leur déroulement et leur issue nous en diront un peu plus sur la maturité et la vitalité de nos « démocraties ». En espérant que les hirondelles nigériane et burkinabè annonçaient l’arrivée prochaine d’un vrai printemps africain.
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