Syrie : des civils affamés pourraient être évacués de Madaya
Un convoi de 44 camions transportant de la nourriture, des couvertures et des médicaments est entré à Madaya, à 40 kilomètres à l’ouest de Damas, près de la frontière libanaise, a annoncé lundi le Croissant rouge syrien (SARC). Près de 400 personnes, « en grand danger de mort » pourraient être évacuées dès ce mardi.
Leur arrivée, le 11 janvier, était attendue avec impatience par les 42 000 habitants de la ville syrienne de Madaya, assiégée par l’armée de Bachar al-Assad depuis 6 mois. Ici, 28 personnes y sont mortes de faim depuis le 1er décembre, selon Médecins sans frontières (MSF).
« La première impression fait mal au coeur », confie le porte-parole du Comité international de la Croix Rouge, Pawel Krzysiek, qui était à bord du premier camion à arriver à Madaya.
« Nous avons vu beaucoup de gens dans les rues, certains étaient souriants et nous faisaient signe de la main et d’autres étaient trop faibles et trop fatigués », a-t-il dit dans un enregistrement audio. Une petite fille s’est approchée de lui en demandant : « Est-ce que vous avez amené de la nourriture… parce que nous avons très faim », a-t-il témoigné.
Face au tollé international provoqué par la diffusion sur les réseaux sociaux de photos et de vidéos montrant des enfants décharnés à Madaya – des photos truquées d’après les partisans du régime -, Bachar al-Assad a fini par y autoriser l’accès.
Une situation désespérée
Les habitants de Madaya décrivent une situation désespérée. « Depuis 15 jours, nous ne mangeons que de la soupe. J’ai vu de mes propres yeux un jeune homme tuer des chats et présenter aux membres de sa famille la chair comme étant de la viande de lapin », a témoigné Hiba Abdel Rahmane, 17 ans, interrogée par une journaliste de l’AFP entrée dans Madaya.
« Il y a des gens qui se nourrissent dans les poubelles et d’autres qui ne mangent que de l’herbe. Nous avons demandé aux hommes armés de la nourriture mais ils ont refusé de nous en donner », a ajouté cette jeune fille qui attendait avec cinq membres de sa famille de quitter la ville.
« Nos enfants meurent de faim, nos corps tremblent », a renchéri Ghaitha Assad, la trentaine. « Nous avons commencé à perdre conscience à cause de la faim, nous souffrons d’anémie et de beaucoup de maladies. (…) Nos enfants pleurent toute la nuit, on est incapable de trouver de quoi les nourrir. »
« Il n’y a ni électricité, ni chauffage, ni nourriture. Les prix sont exorbitants (…) mais nous n’avons plus d’argent », renchéri Ali Issa, âgé de 61 ans et père de huit enfants.
À Madaya, 400 personnes à évacuer
« 400 personnes doivent être évacuées immédiatement » car elles « sont en grand danger de mort », souffrant de malnutrition ou « d’autres problèmes médicaux », a déclaré Stephen O’Brien, patron des opérations humanitaires des Nations unies qui espère le faire peut-être dès mardi.
Une telle opération a été extrêmement complexe à organiser entre les différents acteurs syriens et internationaux concernés. Le Programme alimentaire mondial (PAM) de l’ONU a fait parvenir de la nourriture, notamment du lait pour enfants, tandis que le CICR fournissait des médicaments en quantité suffisante pour trois mois ainsi que du matériel chirurgical pour soigner les blessés et des couvertures.
« L’opération devrait se prolonger pendant quelques jours. C’est une ouverture très positive, mais il ne faut pas en rester à une seule distribution. On doit avoir un accès régulier à ces zones », a expliqué Marianne Gasser, qui dirige le CICR en Syrie.
400 000 civils assiégés par les rebelles ou l’armée du régime
Un autre convoi de 21 autres camions a quitté Damas au même moment pour atteindre Foua et Kafraya, deux localités chiites encerclées par les rebelles à plus de 300 km de Damas dans la province d’Idleb, au nord-ouest. La dernière fois que des convois humanitaires avaient pu atteindre ces villes remontait au 18 octobre, après un accord entre les belligérants.
Au total, 400 000 civiles sont piégés dans les villes syriennes assiégées par l’armée du régime de Bachar al-Assad ou les rebelles, d’après les Nations unies.
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