Des carences dans la maintenance
Toujours plus sophistiqués, les appareils médicaux sont aussi de plus en plus difficiles à entretenir. Et le manque de moyens et de personnel qualifié n’arrange rien aux affaires des établissements de santé.
« Je voudrais savoir quel est le cursus à suivre pour faire de la maintenance de matériel médical et quels sont les pays qui offrent cette formation. » Cette demande, postée en février sur un forum d’étudiants africains et restée à ce jour sans réponse, est symptomatique du flou qui règne dans le secteur. La maintenance du matériel médical est un sérieux dilemme pour de nombreux établissements de santé sur le continent.
Un dilemme qui ne se posait pas autant avec les appareils d’avant les indépendances, moins sophistiqués. « Les machines étaient robustes et résistaient aux conditions climatiques extrêmes », explique le docteur Jean Théophile Banzouzi, coordonnateur Europe de l’ONG Médecins d’Afrique. Aujourd’hui, plusieurs d’entre elles fonctionnent toujours, et seul le manque de consommables, qui ne sont parfois plus fabriqués, pousse les établissements à les mettre au rebut. « En biochimie, vous n’avez plus les mêmes réactifs. Certaines radios ne sont pas compatibles avec les scanners anciens. Et le papier thermique utilisé pour le monitoring des femmes enceintes n’existe plus, tout comme certains fusibles », énumère le chercheur en pharmacologie, chimie-thérapeutique et biologie.
Quand les appareils sont remplacés, ce sont des équipements électromécaniques, plus sensibles à la chaleur, à l’humidité et à la poussière – un cocktail qui favorise des micro-courts-circuits -, qui les supplantent… Pour limiter la casse, les établissements doivent donc trouver des solutions de fortune : par exemple, limiter l’usage des appareils lors des fortes chaleurs. Et quand malgré tout la machine tombe en panne ? Tout dépend des aptitudes des techniciens, qui varient d’un pays à l’autre et, dans le même État, de la capitale aux régions.
Absence de formation
Entre 1972 et 1989, à Lomé, le Centre de formation en santé publique de l’Organisation mondiale de la santé enseignait, parmi d’autres apprentissages, l’entretien et la réparation du matériel électro-médical. Les personnels venaient s’y recycler, améliorer leurs connaissances. Au total, deux cent quarante-deux apprentis d’Afrique de l’Ouest, d’Afrique centrale et d’Afrique australe y ont reçu une formation diplômante, indique le professeur François Gado Napo-Koura, coordonnateur adjoint du centre de formation, chargé des activités pédagogiques et scientifiques.
Reste que ces modules d’enseignement ne sont plus dispensés depuis des années. Pénurie d’élèves ou manque de fonds ? La réponse fait encore débat. Et quelle alternative ? Plusieurs pays, dont le Togo, disposent désormais d’un pôle « maintenance » dans leur ministère de la Santé. Et certains, comme la Côte d’Ivoire, organisent par exemple la remise à niveau de leurs techniciens en France.
Dans le cadre des acquisitions d’appareils, lors des appels d’offres, l’aspect formation du personnel est certes bien présent, et, parfois, pour emporter le matériel, certaines entreprises proposent la maintenance gratuite pendant les deux premiers mois, ou la formation gratuite du personnel. Mais, dans le cas contraire, ces deux volets optionnels du contrat sont évités, car ils ont un coût important : entre 3 % et 5 % du prix de la machine, selon sa taille et sa complexité, pour le volet formation ; et en moyenne 10 % – voire jusqu’à 20 % ou 30 % quand il y a des consommables – pour la maintenance. Résultat : faute de moyens, les établissements se débrouillent en interne pour réparer – au risque d’aggraver la situation.
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