#FreeMoussa : audience cruciale au Bangladesh pour Moussa de BarakaCity
Moussa, le jeune humanitaire français de l’ONG musulmane BarakaCity, emprisonné au Bangladesh, sera entendu mercredi par la Haute court de ce pays.
Ce qui est reproché à Moussa Ibn Yacoub
Moussa participait à une mission humanitaire au Bangladesh pour l’ONG musulmane française BarakaCity. Il avait été arrêté à un check-point alors qu’il se rendait vers le sud du pays pour fournir une assistance humanitaire dans des camps de Rohingyas. Cette minorité musulmane étant considérée comme illégale dans le pays, l’organisation avait alors expliqué ne pouvoir légaliser sa présence pour apporter assistance. Les autorités locales accusent le jeune homme d’ »utilisation de fausse identité » : son nom d’usage musulman adopté après sa conversion, Moussa Ibn Yacoub, étant différent de celui figurant sur ses papiers d’identité officiels.
Que peut espérer Moussa au terme de cette audience ?
Selon l’un des avocats de Moussa, maître Bolaky, contacté par Jeune Afrique, l’enjeu de cette audience est la remise en liberté. « Le traducteur a été libéré hier et donc nous sommes optimistes bien que méfiants par rapport aux soubresauts et différents atermoiements connus de la part de la justice bangladaise. »
L’audience est donc cruciale pour le Français. Détenu depuis le 22 décembre, Moussa Ibn Yacoub (Puemo Tchantchuing, de son nom à l’état civil) a perdu 10 kilos, et n’a pu s’entretenir que quelques minutes au téléphone avec sa famille. Accusé de représenter un « danger » sur le territoire national, le jeune homme originaire de Montreuil sera entendu demain par la Haute court au Bangladesh. « Faisant face à une violation de la loi par l’État lui-même, oublieux de ses principes – en vacance de sa propre légalité – nous avons interjetés appel devant la Haute Cour. Une audience se tient le 27 janvier 2016, au cours de laquelle Moussa, au travers de ses avocats, se défendra et s’élèvera contre les accusations portées contre lui. Il se défendra d’accusations non contradictoires, qui ne sont pas totalement connues de sa part et de celle de ses avocats à ce jour », ont déclaré mardi sur Facebook ses avocats, Me Karim Achoui et Me Samim Bolaky.
L’autre enjeu du procès : la condition des Rohingyas
Toujours dans la même publication Facebook, les avocats de Moussa entendent mettre en lumière, en même temps que leur client, la cause que celui-ci défendait en se rendant au Bangladesh : « Si le crime reproché à Moussa est de venir en aide aux autres, alors il n’aurait aucune raison d’en rougir et pourrait même le revendiquer avec orgueil. Le procès de Moussa n’aurait pas de sens s’il ne devait pas aboutir – au moins philosophiquement – à l’amorce d’un changement de la condition des Rohingyas. Moussa et ses avocats, deux Français, et cinq Bangladais, se démèneront sans relâche afin d’aboutir à sa libération, mais surtout pour mettre en lumière la noble cause des Rohingyas… »
Peu après, toujours sur Facebook, les avocats de Moussa ont annoncé « la libération de Molovi Abdusalam, imam et traducteur de Moussa, qui fût détenu depuis le 22 décembre 2015 avec Moussa », au terme d’une audience devant la même cour devant laquelle comparaîtra demain le jeune français. « Il sera libre en attendant un prochain procès après que la police a déposé un nouveau dossier à charge. Nous nous réjouissons de cette victoire judiciaire et espérons arracher la liberté de Moussa à l’audience de demain… », ont-il conclu.
En France, la polémique BarakaCity
En France, la diffusion de l’émission Le supplément sur Canal plus, le 24 janvier, a déclenché une vive polémique. Initialement invité pour parler de Moussa, Idriss Sihamedi, président de BarakaCity, a rapidement a été interviewé sur sa pratique de l’islam et sur ses positions vis à vis de l’État islamique.
Interrogé sur sa pratique de l’islam, Idriss Sihamedi a affirmé être un musulman orthodoxe. Serre-t-il la main des femmes pour les saluer ? « Non, comme certains rabbins, je ne serre pas la main aux femmes », répond-il agacé. Lorsque l’animateur lui fait remarquer que dans le reportage, diffusé avant l’entretien, il ne « condamne pas publiquement l’État islamique », il répond : « Ce n’est pas qu’on condamne pas l’État islamique. C’est qu’on essaie d’avoir une certaine pédagogie pour expliquer, et de discuter avec les jeunes pour leur faire comprendre qu’on a une alternative qui est bien, et pacifique, et qu’on peut trouver au Togo et en France. »
Un autre journaliste le presse à nouveau de se prononcer sur une condamnation ou non de sa part de l’EI. Exaspéré, Idriss Sihamedi répond : « S’il y aurait (sic) le grand rabbin de paris qui serait présent, est ce que vous lui auriez demandé s’il aurait condamner les bombardements (…). Je pense que ce n’est pas équitable et que ce n’est pas juste de me poser la question parce que je suis musulman (…). D’une manière plus générale et très humaine, l’organisation humanitaire BarakaCity, qui est une organisation humanitaire et de défense des droits de l’homme, condamne toutes les exactions, qu’elles soient commises par des groupes armés, par des gouvernements, par des juntes, etc. On l’a fait en Égypte, on l’a fait en plaidant pour cet humanitaire Allan Henning (…). S’ils tuent des gens, brûlent des gens dans des cages, etc, s’ils tirent sur des femmes enceintes, je ne vais as vous dire ‘non je ne condamne pas’ (…), mais je suis gêné de la question car je ne pense que ce n’est pas équitable. »
Sur le plateau, c’est le malaise. « On est un peu gêné de la réponse pour tout vous dire », lance l’animateur, avant de demander à la ministre française de l’Éducation, Najat Vallaud-Belkacem, si elle souhaitait commenter les propos d’ Idriss Sihamedi. Embarrassée, elle s’est contentée de rappeler l’importance de distinguer ce débat de la situation de Moussa « en sa qualité de ressortissant français ». Avant d’ajouter qu’elle se sentait mal à l’aise avec ce qui venait d’être dit.
Après la diffusion de l’émission, le président de BarakaCity s’est de son côté exprimé à plusieurs reprises sur sa page Facebook, estimant avoir été piégé, dénonçant, entre autres, la coupe de ses propos au montage. « Au lendemain d’une émission que nous avions, avec le comité FreeMoussa et BarakaCity voulu faire pour lui, bien que nous étions réticents, nous avons décidé d’accepter, car on nous avait juré que les thèmes seraient : Moussa, les Rohingyas et les coulisses de sa défense. Ainsi nous avons été clairement dupés. Une meilleure visibilité pour lui, une promesse pour sa maman, il était question de mettre de côté nos ressentiments pour accorder une autre tribune », déclare-t-il.
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