Les promoteurs la jouent modeste à Marrakech
Après l’éclatement de la bulle immobilière, les professionnels de la Ville ocre se positionnent sur le segment « économique ». Le logement social prendra-t-il le relais des résidences de luxe ?
À plus d’un titre, Marrakech, joyau touristique du royaume chérifien, est sorti de sa bulle. Rattrapé par la crise financière, le marché immobilier de la Ville ocre, après une période d’euphorie frisant l’indécence entre 2005 et 2008, subit un véritable contrecoup. « Tous les segments de marché – villas, appartements, riads – ont enregistré une baisse », résume le notaire Saïd Harrous. La tendance s’est confirmée au quatrième trimestre de 2010, selon une note de conjoncture de Bank Al-Maghrib et de l’Agence nationale de la conservation foncière, du cadastre et de la cartographie : globalement, les prix de l’immobilier sur Marrakech ont reculé de 2,4 % par rapport au quatrième trimestre de 2009. Dans le détail, le prix des appartements enregistre une baisse de 6,9 %, et celui des villas de 21,7 % !
Effets du « printemps arabe »
Tributaire à 90 % de sa clientèle étrangère aisée, Marrakech pâtit également du contexte géopolitique au Maghreb et au Moyen-Orient, régions bousculées par le « printemps arabe ». « La clientèle étrangère est très frileuse, poursuit Saïd Harrous. Pour elle, le Maroc, ça reste l’Afrique du Nord, alors que les événements internationaux n’ont rien à voir avec notre pays… »
Le vent a semble-t-il tourné : avis de gros temps sur les projets haut de gamme et touristiques ! Illustration éloquente avec la mésaventure du promoteur français La Perla World (ex-Mandarine Holding), qui indiquait, en novembre 2010, que les travaux du projet Bab Asfi [prévoyant la construction d’un lotissement de riads à Tamansourt, ville nouvelle à 20 km de Marrakech, NDLR] avaient été arrêtés à la fin du premier semestre de 2010. En mars dernier, la société indiquait qu’elle « étudie notamment la possibilité de repositionner le projet sur un segment “économique”, actuellement très porteur au Maroc »…
Une orientation stratégique qui laisse sceptique Vincent Benvenuti, agent immobilier : « Il ne me paraît pas possible – sauf dans un ou deux cas marginaux – de déclasser des projets de standing pour en faire des logements sociaux, ne serait-ce que par rapport au prix du foncier. »
Méthode Coué
Le logement social, bouée de sauvetage des promoteurs locaux ? Après s’être temporairement refait une santé en basculant sur le marché locatif, ils entonnent déjà le refrain de la reprise, à l’exemple d’Adil Bouhaja, président de l’Association des promoteurs immobiliers de Marrakech : « Au plan des mises en chantier, l’année 2011 s’annonce exceptionnelle : la plupart des promoteurs ont finalisé leurs études et déposé leurs demandes d’autorisation. »
Des propos qui, s’ils fleurent bon la méthode Coué, reposent tout de même sur quelques certitudes. « La tendance actuelle s’oriente sur l’“économique”, qui reste une niche très favorable eu égard au déficit d’offre sur le marché », confirme Jaafar Derraji, agent immobilier. Il faut dire, aussi, que l’État marocain soutient activement ce segment du marché. La loi de finances 2010 a ainsi entériné des incitations fiscales visant à la fois promoteurs et acquéreurs de logements d’une valeur inférieure à 250 000 dirhams (21 850 euros).
Joignant les actes à la parole, le groupe Al Omrane, promoteur public, vient de lancer, en présence du roi Mohammed VI, la construction de quatre ensembles immobiliers totalisant 682 appartements à moins de 250 000 dirhams, dans le quartier de M’Hamid, dans le sud de Marrakech. Les groupes privés ne sont pas en reste, à l’image d’Al Amane, qui vient de livrer deux lots d’appartements vendus à partir de 120 000 dirhams à Tamansourt, ainsi que des logements de plus haut standing (à partir de 250 000 dirhams) en centre-ville.
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