Mutilations génitales féminines : où en est l’Afrique ?
Samedi 6 février 2016, aura lieu la journée internationale « tolérance zéro contre les mutilations génitales féminines ». Beaucoup d’efforts ont été réalisés en matière de lutte contre les mutilations génitales féminines mais le chemin à parcourir est encore long.
Publié le 5 février 2016 Lecture : 3 minutes.
Les pays africains seraient-ils à un tournant décisif de la lutte contre les mutilations génitales féminines ? Le 28 décembre dernier, c’est la Gambie qui se déclarait tout récemment « république islamiste » qui s’illustrait positivement dans ce noble combat : l’Assemblée nationale a voté en grande majorité une loi réprimant pénalement l’excision. Depuis 2008, environ 15 000 communautés ont abandonné les mutilations génitales féminines, dont 2 000 en 2015.
Les chiffres restent cependant effarants. Selon l’ONU, 200 millions de jeunes filles et de femmes vivant aujourd’hui ont déjà été victimes de mutilations sexuelles. 30 pays dans le monde sont concernés, principalement en Afrique.
Prévalence des mutilations sexuelles féminines par pays
Le record des plus fortes prévalences dans le monde est détenu par cinq pays africains : la Somalie, la Guinée, le Djibouti, l’Egypte, et l’Érythrée; respectivement : 98%, 96%, 93%, 91% et 89 %.
Des pratiques qui changent en fonction des lieux
On note de nouvelles tendances dans la pratique des mutilations génitales : un abaissement de l’âge moyen des victimes, elles sont de plus en plus médicalisées, et elles sont moins fréquentes chez les filles âgées de 15 à 19 ans.
Il existe quatre catégories de mutilations génitales féminines : clitoridectomie (l’ablation partielle ou totale du clitoris) dite mutilation de type I, l’excision (ablation partielle ou totale du clitoris et des petites lèvres), dite de type II. D’après les estimations actuelles, environ 90% des mutilations sexuelles féminines sont des mutilations de types I ou II.
Risques
L’opération elle-même consiste à l’ablation totale ou partielle des organes génitaux externes de la femme pour des raisons non médicales. L’absence d’hygiène, le caractère rudimentaire des outils utilisés, l’usage répétitif des instruments contribuent à provoquer de graves hémorragies, des problèmes urinaires, des maladies sexuellement transmissibles et par la suite des kystes, des infections, la stérilité, des complications lors de l’accouchement, et font accroître le risque de décès du nouveau-né.
Mutilations génitales et traditions
Généralement pratiquées dans un contexte traditionnel, les mutilations génitales féminines (MGF) sont considérées comme un rite d’initiation, un passage souvent obligatoire d’un statut social à un autre dans les sociétés qui les pratiquent. De ce fait, leur accomplissement a souvent lieu lors de cérémonies culturelles spécialement prévues à l’occasion dans des endroits insolites comme des forêts, aux pieds des montagnes parfois à même le sol. De même, dans de nombreuses communautés, l’excision est une condition préalable au mariage.
Sous l’action des migrations, on retrouve de nombreuses femmes excisées en dehors de leurs pays d’origine déplaçant ainsi l’activité sur leur progéniture dans des zones jusqu’alors épargnées.
Les moyens mis en oeuvre
Outre les investissements financiers de la part des États ou des organisations internationales, les mesures prises vont de la sensibilisation à la pénalisation des MGF. Mais dans les villages reculés où les habitudes sont très ancrées dans les us, les populations ne coopèrent pas toujours.
Les matrones exciseuses occupent un statut social important et sont vues comme des gardiennes de la culture au sein des populations en plus de leur apporter divers avantages : argent et cadeaux en nature. Pour tenter d’y remédier, de nombreuses ONG en collaboration avec l’OMS et de l’Unicef, ont procédé courant 2015 à plusieurs campagnes de reconversion d’exciseuses en leur proposant à la place, des formations à l’élevage.
Des résultats certes encourageants mais encore insuffisants vu l’ampleur de la tâche. « Dans des pays comme la Somalie, la Guinée et Djibouti, cette pratique est presque universelle », a souligné à l’AFP Claudia Cappa, qui a dirigé la rédaction d’un nouveau rapport de l’Unicef sur les mutilations génitales.