Tchad : le procès de Hissène Habré est entré dans sa dernière ligne droite
Les premières plaidoiries des parties civiles ont commencé lundi. Suivront jeudi et vendredi celles de la défense avec, entre-temps, le réquisitoire très attendu du procureur général des chambres africaines extraordinaires, mercredi.
Après deux mois d’interruption, le procès-marathon de Hissène Habré touche à son épilogue. En vertu du calendrier fixé par le président Gberdao Gustave Kam, il devrait s’achever vendredi 12 février avec les plaidoiries des avocats de la défense. Depuis lundi 8 février, et jusqu’à ce mardi soir, les avocats des parties civiles se relaient à la barre pour récapituler les diverses facettes d’un procès pour crimes contre l’humanité, crimes de guerre et torture, au cours duquel pas moins de 92 témoins et experts ont relaté la répression féroce ayant marqué les huit années du règne de l’ancien président tchadien.
Tour à tour, les avocats tchadiens, sénégalais et français ont revisité les moments forts du procès, égrenant les sévices endurés par les 4 000 victimes qu’ils représentent et n’hésitant pas à convoquer les fantômes d’Adolf Hitler et de Pol Pot pour décrire le Tchad des années 1980. Épuration politique, incarcération sans motif, torture systématique, sévices sexuels, répression ethnique, état de terreur… « La mort est sûre mais elle arrive lentement, et cette attente est atroce”, a lancé l’avocate Delphine Djiraïbé en évoquant les conditions de détention dans les geôles de N’Djaména.
Prouver l’implication personnelle de Habré
Pour les parties civiles, outre le rappel des sévices et traumatismes endurés par les rescapés du système Habré, qui aurait causé quelque 40 000 victimes entre 1982 et 1990, la tâche consiste à démontrer l’implication personnelle de l’accusé, afin d’établir sa responsabilité pénale – véritable enjeu du procès. « Il vaut mieux dire : ‘ce n’est pas moi’, plutôt que : ‘je n’étais pas seul’ », a ironisé Me Yaré Fall, citant un proverbe wolof.
La plaidoirie de Me Jacqueline Moudeina :
Dans une plaidoirie remarquée, Me Jacqueline Moudeina, coordinatrice du collectif des avocats de la partie civile, s’est efforcée de convaincre la cour que Hissène Habré, en ce temps-là, contrôlait tout et savait tout. « On [le] prévenait même que les portes abîmées par les urines n’avaient pas été réparées », glisse-t-elle, parmi tant d’autres illustrations. À l’appui de sa démonstration, l’avocate emblématique de la cause des victimes tchadienne a produit plusieurs graphiques afin d’illustrer l’omniscience et l’omnipotence de Hissène Habré au cœur du système répressif qu’il avait lui même instauré.
Mercredi, le procureur général des chambres africaines extraordinaires, Mbacké Fall, prononcera son réquisitoire. Enfin, jeudi et vendredi, il reviendra aux trois avocats commis d’office la tâche délicate de défendre un accusé demeuré mutique tout au long du procès, qui les a récusés d’entrée, et de plaider son acquittement.
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