Chicago : un policier réclame dix millions de dollars à la famille du jeune Noir qu’il a tué
Un agent de la police de Chicago qui avait tué Quintonio LeGrier, un étudiant de 19 ans en décembre 2015 s’en prend aujourd’hui à la famille de la victime: il leur réclame 10 millions de dollars (8,93 millions d’euros) de dommages pour avoir été traumatisé par l’événement.
Dans un pays où la police est rarement poursuivie après avoir tué des civils et où les quelques agents inculpés ne sont presque jamais jugés coupables, des procès intentés par les victimes de bavures policières et leurs familles deviennent monnaies courantes.
Vendredi 5 février, la tendance s’est inversée à Chicago. Robert Rialmo, agent de police, a déclaré poursuivre en justice la famille de Quintonio LeGrier, un étudiant qu’il a lui-même abattu en décembre 2015 à la suite d’une intervention au domicile familial.
Une dispute qui vire au drame
Le 26 décembre 2015, la police de la ville de Chicago est alertée pour troubles de voisinage. Selon les agents de police, un jeune homme noir de 19 ans menaçait son père avec une batte de baseball. Mais l’intervention tourne court, l’agent Rialmo dégaine son arme et a abat froidement Quintonio LeGrier. Le jeune homme est touché à plusieurs reprises et succombe à ses blessures. Le policier abat également Bettie Jones, la voisine du bas à qui le père de Quintonio avait prié de ne pas ouvrir aux forces de l’ordre. Selon la police, Madame Jones a été « accidentellement frappée et tragiquement tuée ».
La violence policière une nouvelle fois dénoncée
Cette nouvelle bavure a attisé la colère des citoyens de Chicago qui dénoncent un usage excessif de la force des agents de police. La mère de Quintonio accuse la police de ne jamais avoir essayé de calmer la situation en amont, préférant user immédiatement de la force.
Peu de temps après le drame, le père de Quintonio a intenté un procès pour « mort injustifiée » contre la ville de Chicago. Il accuse l’agent Rialmo d’avoir tué son fils sans légitimation et de ne pas avoir essayé de le soigner quand qu’il succombait à ses blessures, allongé au sol.
La guerre des avocats
Ajoutant au sordide d’une affaire devenue tristement banal aux États-Unis, le policier a contre-attaqué vendredi 5 février : il réclame plus de dix millions de dollars de dommages et intérêts à la famille du jeune Quintonio. Relayée par CNN, la plainte est claire : l’agent Rialmo a subi un traumatisme émotionnel extrême en tuant accidentellement Bettie Jones après avoir été « obligé » d’abattre Quintonio à la suite de ses actes.
L’avocat de la famille LeGrier dénonce l’absurdité de cette démarche. Il a qualifié ce procès d’ »absurde »et de « pure fantaisie ». L’avocat de l’agent Rialmo, quant à lui, réplique en expliquant que ce procès est la seule façon pour Robert Rialmo de faire entendre sa propre version des faits, alors qu’il est accusé d’avoir utilisé son arme dans un contexte qui ne le justifiait absolument pas.
Bavures policières quotidiennes
Les discriminations policières contre les Noirs en Amérique sont quotidiennes. À commencer par les contrôles d’identité : selon la police de New York, en 2012, 284 229 Noirs ont été contrôlés, contre 165 140 Hispaniques et 50 366 Blancs. Et le décompte des bavures devient difficile à tenir.
Parmi les bavures qui vont marquer l’opinion publique, il y a celle du 9 août 2014, lorsque Michael Brow, 18 ans, est abattu de six balles par la police de Ferguson. Face à la colère de l’opinion publique, le président Barack Obama ordonne la création d’un groupe de travail (Task Force on 21st Century Policing), effectif depuis mars, pour mener des réformes structurelles afin de rétablir la confiance entre les forces de sécurité et les gens qu’elles protègent. Deux ans plus tôt, en février 2012, Trayvon Martin, un adolescent noir de 17 ans, a été tué à bout portant par un vigile blanc à Sanford, en Floride. Son meurtrier, George Zimmerman, a été acquitté. Il y aussi l’histoire tragique de Eric Garner, père de famille noir de 43 ans, décédé à la suite de son arrestation par un policier de New-York. L’un des agents a utilisé une prise bloquant les voies respiratoires pour le neutraliser. Une technique pourtant interdite au sein de la police new-yorkaise. Autant d’incidents qui reflètent la forte crispation communautaire qui ne cesse de cliver le pays.
Les réactions des internautes
L’éternel hashtag #BlackLivesMatter (« la vie des noires compte ») réapparaît abondamment sur Twitter. Ce mouvement a pris de l’ampleur depuis sa création, il y a environ un an, et a suscité une prise de conscience importante sur les inégalités raciales chez les jeunes. Les réseaux sociaux sont devenus une arme braquée sur les forces de l’ordre et la tragique histoire de Quintonio alimente, une fois de plus, la colère de l’opinion publique.
https://twitter.com/HodsThePoet/status/696971171422720000
(Repose en paix Quintonio, j’espère Quintonio et sa famille auront la justice qu’ils méritent)
https://twitter.com/Kassandra_26/status/697070092631330817
(Hé Robert Rialmo, va te faire voir!)
https://twitter.com/IsaacEHale/status/693475116131360768
(L’audace, le non-respect et l’ignorance de ce clown d’officier de police d’intenter un procès. WTF***)
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