Cannabis : que dit la loi (et où en est le débat) dans les pays du Maghreb ?
On l’appelle « haschich » au Maroc et « Zatla » en Tunisie et en Algérie. Le cannabis est au centre d’un important débat de société dans les pays du Maghreb demandant sa dépénalisation. Les politiques oseront-ils franchir le pas ?
« Tout cela pour un joint », est le titre provocateur du dernier rapport de l’ONG Human Rights Watch (HRW) publié le 2 janvier, qui dénonce les dégâts de la « loi 52 », promulguée en 1992 en Tunisie du temps du président déchu Zine el-Abidine Ben Ali. Cette loi prévoit une peine maximale de 5 ans de prison pour consommation de stupéfiants.
Si les ONG internationales se mêlent de ce débat de société, c’est qu’il a mûri et que les politiques vont devoir s’en saisir eux aussi. Et pas uniquement en Tunisie.
Des lois très strictes pour les consommateurs
Les lois relatives à la possession et à la consommation du cannabis sont très strictes dans les pays du Maghreb, toutes prévoient des peines de prison, assorties d’amendes, mais avec des circonstances atténuantes différentes d’un pays à l’autres.
Au Maroc, les fumeurs de joints risquent de 2 mois à un 1 an de prison ; en Algérie, de 2 mois à 2 ans ; et en Tunisie, de un 1 an à 5 ans, soit la peine la plus dure. Elle est aussi prise sans circonstance atténuante alors que le Maroc et l’Algérie annulent les poursuites pénales si l’auteur de l’infraction consent à une cure de désintoxication.
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Et pour les producteurs et les revendeurs
Les lois sont encore plus dures lorsqu’il s’agit de production ou de commercialisation des stupéfiants, avec des peines plus graves pour les trafics organisés qui vont jusqu’à la peine de mort en Libye et en Mauritanie et la réclusion perpétuelle en Algérie. Elles s’inscrivent dans le sillage du durcissement des lois mondiales de lutte contre la criminalité organisée.
Maroc et Tunisie à la pointe du débat sur la légalisation
Si les législations sont répressives dans tous les pays du Maghreb, le débat les concernant diffère d’un pays à l’autre. Les pays les plus avancés sont la Tunisie et le Maroc La question se pose très frontalement : « Et si on légalisait le cannabis ? »
À cause d’une série de fâcheux incidents, dont l’arrestation de jeunes artistes, la législation sur le cannabis en Tunisie fait la une ces derniers mois. Les Tunisiens ne comprennent pas qu’on soit aussi sévère dans l’application de la loi alors au vu de la surpopulation carcérale.
Ils sont 100 000 fumeurs à croupir dans les geôles tunisiennes, selon l’Association tunisienne pour la prévention contre la consommation de drogue. C’est trop ! Les appels à l’annulation de la loi 52, jugée rétrograde, se multiplient, porté par des collectifs de la société civile tels que « Forza Tounes » ou « Al sajin 52 », (prisonnier 52).
Au Maroc, les médias se sont emparés du débat dès 2006. Les politiciens ont pris le relais de la presse, mais en centrant la question sur un volet bien précis : la légalisation de la culture du cannabis à usage thérapeutique et industriel. Le Parti authenticité et modernité (PAM) et l’Istiqlal ont déposé deux propositions de loi au Parlement l’année dernière (OU EN EST ON ?). D’après les chiffres du ministère de l’Intérieur marocain, 90 000 ménages, soit environ 700 000 Marocains, vivraient encore de la production du cannabis dans la région du Rif (Nord du Maroc).
En Algérie et en Mauritanie, les trafics au cœur des débats
L’Algérie et une plateforme majeure de transit pour les drogues, en particulier le haschich produit au Maroc et destiné à l’Europe. Le cannabis est au centre des différends diplomatiques entre les deux pays. Et très souvent, l’Algérie attaque son voisin marocain l’accusant de lui exporter ce fléau, via les frontières officiellement fermées, mais par lesquelles transite toute sorte de contrebande.
En Mauritanie, comme en Algérie, le cannabis est un sujet politique. De temps en temps, lorsque les relations entre Rabat et Nouakchott ne sont pas au beau fixe, les responsables mauritaniens jettent la pierre à leur voisin « exportateur de haschich ».
Quant à la Libye, parler de cannabis semble presque anecdotique vu l’état de déliquescence de l’État. Néanmoins, la consommation est en hausse, selon les estimations de la presse libyenne, y compris des drogues dures.
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