Youtube : les « booktubeuses » tunisiennes, cyber-ambassadrices de la lecture

Véritable phénomène à travers le monde, le mouvement des « booktubeurs » débarque sur la toile tunisienne. Face caméra, des youtubeuses d’un nouveau genre partagent leur passion pour la lecture, laissant les produits de beauté et autres accessoires de mode au placard.

Sahar, « Booktubeuse » tunisienne © Capture d’écran/Livrement Moi/Youtube

Sahar, « Booktubeuse » tunisienne © Capture d’écran/Livrement Moi/Youtube

Publié le 19 février 2016 Lecture : 3 minutes.

Booktubeur. Né d’une contraction du mot anglais « book » (livre) et de « Youtube », ce nouveau terme recouvre une réalité déjà partagée par de nombreux adeptes à travers le monde. En Tunisie, ce sont surtout des femmes qui ont rejoint le mouvement, en choisissant de partager en ligne des vidéos sur leurs dernières lectures et leurs coups de cœur, tout en prodiguant critiques et conseils avisés aux internautes.

Des chroniques littéraires 2.0

la suite après cette publicité

Pour Amal, 19 ans, l’idée s’est imposée naturellement : « J’adore lire, les livres sont toute ma vie, a-t-elle expliqué à Jeune Afrique. Je voulais partager ma passion, inciter les gens à lire et prouver aux Tunisiens que nous, les filles, pouvons avoir d’autre intérêts que le maquillage, etc. »

Sur sa chaîne Youtube (Confession of a Bookaholic), le livre est roi. Elle y partage aussi bien des recommandations que des astuces pour continuer à lire en période de révision pour les examens, ou encore des applications mobiles utiles.

Comme elle, d’autres Tunisiennes ont décidé de surfer sur cette nouvelle vague littéraire en tenant un « Vlog » (vidéo-blog) en tunisien, en français ou en anglais, comme Arij (Daydreamer), Yosra et Bookish Mariamites.

Et ces jeunes cyber-bibliophiles partagent tout un vocabulaire qui leur est propre, de la « P.A.L » (« Pile à Lire »), aux « TAG » (challenges entre internautes), en passant par la « BookHaul » (nouvelles acquisitions), le « Bookshelf Tour » (présentation rapide de sa bibliothèque), les « Read a Thon » (marathons de lecture) et les « Unboxing » (ouverture en direct des colis reçus).

la suite après cette publicité

Sarah, elle aussi, passe beaucoup de temps sur ses vidéos, y ajoutant une musique de fond et quelques animations pour attirer les internautes. Sous le pseudo A Tunisian Reader, elle prodigue toutes sortes de conseils et de recommandations à ses followers. Et lorsqu’on lui parle de livres numériques, sa réponse est claire : rien ne vaut un bon vieux livre imprimé sur papier. « Il y a quelque-chose de plaisant dans le fait tenir un livre entre les mains, écrire de petites notes en marge… Qu’importe le côté pratique des e-books, les livres papier sont toujours mieux, à mon avis ».

Et c’est aussi une force des Booktubeurs, du point de vue des éditeurs : redonner vie et goût aux livres imprimés, qu’on annonçait sans doute un peu trop vite en voie de disparition…

Amal, "Booktubeuse" tunisienne © Capture d’écran/Confession of a Bookaholic/Youtube

Amal, "Booktubeuse" tunisienne © Capture d’écran/Confession of a Bookaholic/Youtube

la suite après cette publicité

Un nouveau chapitre ?

Et en Tunisie, le livre semble à nouveau à la page. C’est en tout cas l’impression que donne la création de trois nouveaux sites ces derniers mois : Nakra.tn (une plateforme de vente de livres d’occasion en ligne), Manuskri.tn (un site de livraison de livres tunisiens et étrangers), et YallaRead (un portail d’échange de livres).

Les groupes de lecture se multiplient aussi un peu partout dans le pays, sur les traces du Tunis Book Club (qui regroupe plus de 13 400 personnes sur Facebook), et un bus-bibliothèque reliant Jendouba à Nabeul vient de voir le jour, sous le slogan « Le livre, l’ami du voyageur ».

Une collecte de livres pour les bibliothèques des prisons tunisiennes est par ailleurs organisée jusqu’à la fin du mois de février.

Le paiement à l’international est encore un obstacle

Sahar, co-organisatrice du Tunis Book Club, bloggeuse littéraire et « Booktubeuse » (sous le pseudo Livrement moi), inspire ainsi à agrandir la communauté et à « inciter les gens à lire plus, ou à lire tout simplement ». Mais avec des limitations concernant à la fois le choix des œuvres proposées en librairie et le paiement en ligne à l’international, beaucoup d’accros tunisiens à la lecture peinent encore à se procurer les derniers livres sortis à l’étranger.

« Je me rends tout simplement dans les librairies telles que Al kiteb, Culturel ou encore El Moez. Elles ont souvent une bonne sélection et quand je veux quelque chose en particulier, je passe commande chez elles. Il m’est arrivé également de demander à ma cousine, qui habite en France, de me ramener quelques livres », nous explique Sahar.

« On ne peut pas avoir de compte PayPal, et vu les prix exorbitants qu’affichent les librairies, je préfère acheter sur Amazon les livres nouvellement publiés, via de bons amis », nous confie de son côté Amal. Mais ces freins dans l’accès à la littérature internationale sont aussi pour elle un bon stimulant pour s’intéresser aux auteurs et aux ouvrages nationaux. « Mon livre coup de cœur de ce mois de février est sans aucun doute À ta place, de Khaoula Hosni, une jeune écrivaine tunisienne que je viens de découvrir ».

La Matinale.

Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.

Image

La rédaction vous recommande

Le Maghreb des livres attire chaque année près de 6000 visiteurs. © Association Coup de Soleil

France : « Le Maghreb des Livres » ouvre ses pages à Paris

Contenus partenaires