Discriminations à l’emploi, racisme et sexisme… le long chemin de la France vers l’égalité
Dans quelle mesure existe-t-il des discriminations dans l’accès à l’emploi en France et dans les salaires, tout particulièrement vis-à-vis des femmes et des descendants d’immigrés ? Une étude de France Stratégie, l’organisme de réflexion rattaché au gouvernement, tente de faire le point.
Ce n’est pas nouveau : de sérieuses inégalités face à l’emploi existent en France. Elles demeurent très importantes tout particulièrement pour les femmes ou les personnes issues de l’immigration. Mais dans quelle mesure ? C’est pour tâcher de répondre à cette question, épineuse dans un pays qui interdit les statistiques dites « ethniques », que France Stratégie, un organisme de réflexion, d’expertise et de concertation rattaché aux services du Premier ministre, a publié le 18 février une « note d’analyse » synthétique de 12 pages, en partie basée sur les enquêtes Emploi de l’Insee et portant sur la période 1990-2014.
Son titre annonce d’emblée la couleur : « Marché du travail : un long chemin vers l’égalité« . En 2014, note par exemple le document, il est préférable d’être un homme, sans ascendance migratoire, lorsque l’on se met en quête d’un emploi. C’est là tout l’enjeu du travail de France Stratégie : percer à jour les écarts salariaux et d’accès à l’emploi entre hommes et femmes et entre personnes avec ou sans ascendance migratoire. Des écarts qui ne sont justifiés par aucune variable objective (formation, expérience ou origine sociale) et qui peuvent donc être expliquées par le sexe ou l’origine de l’ascendance familiale. Voici trois points à retenir de cette note d’analyse.
Des chances bien moindres de trouver un emploi
Premier enseignement de la note, les descendants d’immigrés d’Afrique (y compris le Maghreb) ont nettement moins de chance de trouver un emploi en France. Entre 2009 et 2014, la probabilité d’être en emploi des hommes descendant d’immigrés d’Afrique ou du Maghreb est de 15 points inférieure à celle des hommes sans ascendance migratoire directe – qui restent significativement avantagés sur le marché du travail par rapport aux autres catégories étudiées. Quelle que soit leur origine, les femmes sont les plus pénalisées. Sur vingt-cinq ans (1990-2014), on observe néanmoins une forte réduction des écarts inexpliqués entre hommes et femmes dans l’accès à l’emploi.
Champ : individus âgés de 25 à 59 ans.
Lecture : entre 1990 et 1996, la probabilité d’être en emploi des natifs des DOM est de 5 points inférieure à celle des hommes sans ascendance migratoire directe. Pour les hommes et les femmes descendant d’immigré d’Afrique et Maghreb, les données ne sont pas disponibles pour 1990-1996.
Source : France Stratégie, sur la base des enquêtes Emploi (Insee).
Les écarts de salaire : -13 % pour les femmes descendant d’immigrés
Une fois l’embauche concrétisée, les écarts de salaire n’ont rien de très enthousiasmant non plus. Dans les données rassemblées par France Stratégie, on observe une nette différence entre les catégories masculines et féminines. L’écart est plus hétérogène au sein des catégories masculines, alors que les femmes nées dans les DOM ou originaires du continent africain ne sont que légèrement pénalisées par rapport aux femmes sans ascendance migratoire. Ce qui confirme que les femmes, globalement, continuent d’être les premières victimes des inégalités salariales.
Champ : salariés âgés de 25 à 59 ans.
Lecture : les femmes nées dans les DOM ont en moyenne un salaire inférieur de 13 % à celui des hommes sans ascendance migratoire directe.
Source : France Stratégie, sur la base des enquêtes Emploi (Insee).
Probabilité d’être au chômage bien plus forte
Après 2009, on observe une importante hausse au détriment des hommes et les femmes originaires du continent africain, qui ont davantage de probabilité de se retrouver au chômage depuis les débuts de la crise économique et financière. Seule note positive : la réduction des écarts du taux de chômage entre hommes et femmes sans ascendance migratoire depuis 1990.
Champ : individus âgés de 25 à 59 ans.
Lecture : entre 1990 et 1996, les hommes nés dans les DOM ont une probabilité d’être au chômage supérieure de 4 points à celle des hommes sans ascendance migratoire.
Source : France Stratégie, sur la base des enquêtes Emploi (Insee).
Quid des statistiques ethniques ?
Les résultats de ce rapport, qui donne un chiffrage des discriminations salariales ou à l’embauche en fonction du sexe et de l’origine géographique des individus, est-il plus ou moins pertinent que s’il s’agissait de statistiques ethniques proprement dites si elles étaient autorisées en France ?
Les défenseurs de ces dernières avancent qu’elles pourraient aider à lutter contre les discriminations. En novembre 2014, un rapport du Sénat préconisait leur mise en place afin de mesurer les discriminations ethniques, raciales et religieuses. Début février 2015, le président François Hollande les avait écartées. Et vous qu’en pensez-vous ?
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