Le blues des petites entreprises gabonaises
Procédures complexes, lenteur de l’État : au Gabon, pas facile d’être une PME !
À la suite du décès de son père, en septembre 2011, Kassanault Bussamb a hérité d’Afric Construction (Afco), une PME gabonaise spécialisée dans le BTP. Mais il envisage de se désengager du secteur : « C’est trop difficile. Généralement, dans le BTP, les marchés se passent par affinités, et moi, je n’ai pas le carnet d’adresses de mon père. » Et force est de constater que, quand il y a un appel d’offres, son entreprise de 20 salariés ne fait pas le poids face aux groupes étrangers. Avant sa disparition, Dieudonné Bussamb avait remporté le marché de construction d’un bâtiment pour la police nationale. Mais depuis le rejet de sa demande de financement par les banques, son jeune repreneur de fils frise la déprime et envisage de se lancer dans la restauration rapide.
Dépôts de bilan, changements de statut… Les PME ont du mal à trouver leur place dans un environnement difficile. L’État a pourtant tenté de favoriser l’expansion des entreprises nationales en leur réservant 20 % des marchés publics, mais les conditions fixées par la loi sont encore trop complexes. « Pour 2012, nous demandons au gouvernement d’alléger les procédures d’attribution des marchés pour nous permettre de survivre », indique Pierre Obiang, patron de l’Office gabonais de bâtiment et de construction (Ogabac), dont le chiffre d’affaires annuel est de 500 millions de F CFA (760 000 euros).
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Actuellement, s’il veut répondre à un appel d’offres pour un marché d’un montant de 200 millions de F CFA, un entrepreneur doit déposer une caution de garantie s’élevant à 2 % du montant du marché, soit 4 millions de F CFA. En cas de succès de son offre, il doit encore s’acquitter, en tant qu’adjudicataire, d’une autre provision de 5 % (soit 10 millions de F CFA supplémentaires) afin de garantir l’exécution du marché, avant d’espérer bénéficier de l’avance de démarrage payée par l’État.
Or la plupart des jeunes entrepreneurs n’ont pas de fonds propres suffisants pour autofinancer leurs projets. Ce qui les conduit à solliciter le concours des banques, pour la plupart frileuses. Quant aux établissements spécialisés, comme les guichets du Fonds d’expansion et de développement des PME (Fodex) ou la Banque gabonaise de développement (BGD), ils exigent un dossier comprenant une étude de marché, trois bilans certifiés, des prévisions d’exploitation sur trois à cinq ans… Parfois, une étude de la rentabilité de l’investissement projeté est également demandée. Vient ensuite l’examen des garanties. Ces dernières tiennent autant à des flux de trésorerie générés par le projet lui-même en remboursement des échéances de crédit qu’à des biens réels : immeubles bâtis ou non, machines, loyers existants, nantissements des comptes de dépôt à terme, assurance vie, etc.
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Parcours du combattant
Après l’exécution du projet, le parcours du combattant se poursuit. Et Dieu sait que le recouvrement des créances n’est pas aisé aux guichets du Trésor public… « Je traîne encore une facture de décembre 2010, qui demeure impayée à ce jour », se plaint Pierre Obiang. Quand l’équilibre des comptes publics le permet, le gouvernement paie une partie de la dette intérieure, parfois avec l’appui des banques locales. Une bouffée d’oxygène pour les PME, qui peuvent alors relancer leurs activités.
Si un petit nombre d’entre elles ont bénéficié des travaux préparatifs de la Coupe d’Afrique des nations 2012 (coorganisée par la Guinée équatoriale et le Gabon du 21 janvier au 12 février), la plupart comptent accroître leur volume d’activités grâce au vaste programme engagé par le gouvernement l’an dernier pour doter le pays d’infrastructures et de logements sociaux. Là encore, les PME du BTP devront se frotter aux plus importantes entreprises du secteur, à l’instar de la Socoba, de Jean-Claude Baloche, ou de la Socofi, de la famille Hejeij.
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