Nouvel opérateur : qui veut la peau de Tunisiana ?

L’entrée en lice d’un troisième opérateur tunisien poussera le leader de la téléphonie mobile à revoir sa stratégie.

Publié le 17 juin 2009 Lecture : 3 minutes.

Faut-il abattre Tunisiana ? Sa réussite fait des envieux. En six ans, l’opérateur a conquis 4,2 millions de clients, soit près de 52 % du marché de la téléphonie mobile selon Orascom Telecom, son actionnaire à 50 %. Tunisie Télécom, actuel seul concurrent, cherche tous les moyens de lui tenir tête. Mais l’ennemi a du répondant. Comme il en avait à son arrivée, à la fin de 2002, quand il a lancé les premières cartes prépayées du pays. Le taux de pénétration du mobile en Tunisie était de 5 %, et 800 000 noms s’étaient accumulés sur la liste d’attente de l’opérateur historique. Multipliant les points de vente et les offres ciblées, Tunisiana a conquis près d’un million de clients par an, avant de consolider ses acquis : « Nous avons lancé l’un des premiers programmes de fidélisation du pays en février 2008, explique Najla Chaar, directrice de la communication. Seul Carrefour en avait un. »

Côté ressources humaines, la transformation a été aussi rapide. Tunisiana est passé de 300 personnes à ses débuts, dont beaucoup de cadres d’Orascom Telecom, à 1 800 aujourd’hui, dont trois expatriés : le DG et le directeur financier venus d’Orange ; le directeur du marketing, ex-Bouygues Télécom, en France. Mieux. « Tunisiana a recruté à l’étranger des cadres tunisiens de très bon niveau », explique un chasseur de têtes qui préfère rester anonyme. Les carrières du directeur technique, Hatem Mestiri, et de la directrice des ressources humaines, Maha Meddeb, qui ont progressé au sein de la société depuis ses débuts, sont souvent citées en exemple.

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Reste l’avenir. « Tunisiana sera attaqué sur ses ressources humaines, sur son marché, et même sur sa présence en Tunisie à terme », commente Hassen Zargouni, patron de la société d’études de marchés Sigma Conseil. L’allusion à la nationalité du leader est limpide. Détenu à 50/50 par l’égyptien Orascom Telecom et le qatari Qtel, Tunisiana n’a finalement de tunisien que le nom. Il a trouvé la parade et annonce son entrée à la Bourse de Tunis : « Les études sont en cours et la décision sera prise avant la fin de l’année. Nous devrions introduire entre 10 % et 30 % du capital », confirme Yves Gauthier, directeur général de Tunisiana. Il est par ailleurs lucide sur la menace de pillage des ressources humaines, même s’il en relativise la portée : « Il est clair que le troisième opérateur prendra des gens chez nous, il ne peut pas fonctionner qu’avec des expatriés. » Tunisiana prévoit d’embaucher 300 personnes cette année.

La 3G, son vrai point faible

Côté marché, la marge de manœuvre est étroite. Le niveau d’équipement de la Tunisie en téléphone mobile – 82 % de la population, selon le World Cellular Information Service (WCIS) – laisse peu de nouveaux clients à conquérir, entre 2 et 3 millions si l’on suppose qu’à terme le taux de pénétration atteindra 110 %, comme en Europe. La plus grande partie de la clientèle est déjà en mains. « Nous allons perdre des clients, confirme Yves Gauthier, tout en se refusant à détailler des chiffres : nous avons fait des évaluations, mais je ne sais pas réellement ce qui se passera. » Tant que le troisième opérateur n’aura pas dévoilé sa stratégie commerciale, l’incertitude ne sera pas levée. Le nouveau venu disposera d’une licence globale, lui permettant de faire des offres dans le fixe, le mobile et l’Internet sur téléphone mobile (la 3G). Va-t-il abattre toutes ces cartes ou plutôt cibler telle ou telle ? Tunisiana n’a pas de licence 3G pour le moment. C’est son point faible. « La vraie bataille, c’est de choisir son territoire et de cibler ses clients, conclut Hassen Zargouni. Ce qui passera par les antennes, ce n’est pas de la technique, c’est ce que veulent les clients. »

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