RD Congo : pour le gouvernement, la grève de la faim des militants de Lucha et Filimbi est un « chantage »

La grève de la faim initiée mardi par Fred Bauma et Yves Makwambala pour protester contre leur détention, jugée arbitraire par de nombreuses organisations internationales, ne suscite pour l’instant que l’indifférence du gouvernement congolais.

Fred Bauma, militant du mouvement Lucha. © Frederico Scoppa / AFP

Fred Bauma, militant du mouvement Lucha. © Frederico Scoppa / AFP

Publié le 18 mars 2016 Lecture : 2 minutes.

Mardi 15 mars, Fred Bauma et Yves Makwambala ont entamé une grève de la faim illimitée. Les militants de Lutte pour le changement (Lucha) et de Filimbi (sifflet, en swahili) marquaient ainsi l’anniversaire de leur arrestation à Kinshasa et les lenteurs d’un procès au point mort depuis des mois, et qu’ils estiment politiquement motivé.

« Peu de gouvernements au monde cèdent face à ce type de chantages. Les exemples sont légion tant en Occident que sur d’autres continents. Ils vont inutilement mettre leur santé en péril. Ce n’est pas la bonne démarche. Ils doivent attendre les décisions judiciaires et exercer leur droit de recours », confie Alexis Thambwe Mwamba, ministre de la Justice.

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Alors que Lucha et ses sympathisants protestent sur Twitter avec le hashtag #FaimDeLiberté, le colonel Thaddée Kabisa, directeur de la prison centrale de Kinshasa, dément toute grève de la faim. « Je ne suis au courant de rien. Il n’y a rien de tel, c’est une fabrication purement médiatique. Il n’y a pas de gréviste connu dans mon administration ! »

« Politisation du système judiciaire »

Vendredi 18 mars, les deux activistes – notamment accusés de complot contre le président Joseph Kabila, suspecté de vouloir s’accrocher au pouvoir après 2016 – étaient très affaiblis. « Fred se sent fatigué. Il boit beaucoup d’eau, il a perdu du poids et il a des vertiges. Yves aussi : il passe son temps allongé sur son lit », confie un proche sous couvert d’anonymat.

Jeudi, la Cour suprême de justice, siégeant en cour de cassation, ne leur a pas accordé la liberté provisoire. « C’est une décision certes décevante, mais pas surprenante, connaissant l’instrumentalisation de la justice dans tous les dossiers nous concernant », explique dans un communiqué Lucha publié vendredi.

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Interrogé, Jose Maria Aranaz, directeur du Bureau conjoint de l’ONU pour les droits de l’Homme (BCNUDH), s’est dit « très inquiet de la politisation du système judiciaire ». « Il est temps de changer de direction, d’inverser la tendance répressive et de travailler tous ensemble pour s’assurer du respect du cadre constitutionnel. »

Inquiétude sur l’état de santé des militants

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En attendant, les familles s’inquiètent « sérieusement » de l’état de santé des deux militants, souligne Lucha, que Kinshasa assimile à un groupe subversif, tout comme Filimbi. Craignant que l’indifférence des autorités « perdure », Lucha a écrit à l’Union africaine pour une « implication directe auprès du président Kabila ».

Dans un communiqué publié jeudi, Filimbi appelle à l’action. « Nous ne devons pas, nous ne pouvons pas laisser mourir à petit feu Yves et Fred, et avec eux l’espoir légitime de tout un peuple dans la liberté, la démocratie, un avenir meilleur. Avec cette grève de la faim, la sonnette d’alarme est clairement tirée. »

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