Algérie – Maroc : lutte contre l’habitat précaire
Préoccupation numéro un de la population et des élus : le logement. Au Maroc et en Algérie, on construit à tour de bras.
La lutte contre l’habitat précaire est un combat de longue haleine. Au Maroc comme en Algérie, les autorités se sont lancées ces dix dernières années dans une véritable croisade pour le supprimer. Hauts lieux de contestation concentrant criminalité, chômage et mal-être, les « bidonvilles » sont en effet devenus un problème politique de premier ordre. Dans les deux pays, ils ont explosé dans les années 1970, à la faveur de l’exode rural massif et d’une urbanisation anarchique. En Algérie, les villageois ont aussi quitté leurs terres durant les années noires pour fuir l’insécurité. Le terme lui-même est né au Maroc, où il a été utilisé à la fin des années 1930 pour désigner les quartiers périphériques de Casablanca, dont les logements étaient édifiés à partir de bidons découpés et de matériaux de récupération.
Au Maroc, les autorités ont lancé en 2004 le programme « Villes sans bidonvilles », avec pour objectif l’éradication de l’habitat insalubre à l’horizon 2012. Il concerne 83 villes et 294 000 ménages résidant dans près de 1 000 bidonvilles. Sept ans après, 42 agglomérations seulement sont déclarées débarrassées de ce fléau. Cependant, en 2010, le programme ONU-Habitat plaçait le Maroc à la deuxième place mondiale pour la résorption de ces derniers sur la période 2000-2010, durant laquelle leur population a baissé de 45,8 %.
Rare et cher
C’est l’organisme public Al Omrane qui est chargé de mener de front la réhabilitation, l’assainissement, la mise à disposition de terrains et la construction d’habitations. Et sa principale difficulté est de trouver du foncier, qui, « à proximité des grandes villes, est soit trop cher soit carrément inexistant », explique Lamia el-Kadiri, directrice générale déléguée de la société Al Omrane-Tamesna. Le problème du foncier se pose en particulier dans la banlieue de Casablanca, où deux villes nouvelles, Lakhyayta et Zenata, sont en cours de construction. Pour l’architecte Taoufik el-Oufir, ces cités sont une solution, à condition de ne pas aligner des barres d’immeubles sans charme. « Le beau est un droit pour tous. Ce n’est pas parce qu’on fait du logement social qu’il doit être moche. »
En Algérie, Noureddine Moussa, ministre de l’Habitat et de l’Urbanisme, est l’un des principaux acteurs de la lutte contre les logements précaires. Depuis 2005, son objectif est de réaliser en moyenne 70 000 nouveaux logements chaque année. Plus de 553 000 familles vivent actuellement dans des conditions difficiles, dont 50 000 foyers dans des abris de fortune autour d’Alger.
Enveloppe
Le plan quinquennal algérien (2010-2014) prévoit une enveloppe d’environ 204 milliards d’euros pour financer la construction de 2,5 millions de nouveaux logements, dont 15 % seront concentrés dans les quatre villes principales que sont Alger, Annaba, Oran et Constantine. Depuis fin 2010, 190 000 logements ont été livrés, 510 000 autres sont en cours de construction, et 400 000 nouveaux projets sont à l’étude. Hafida Brakni, architecte à Mostaganem, rappelle que « l’habitat précaire représentait au début de la décennie près de 10 % du parc national de logements. La construction de plus de 2 millions d’habitations, couplée à la destruction de 150 000 logis dans les bidonvilles, a ramené ce taux à 5 %. C’est une performance considérable, mais trop peu visible ! » Considérable, puisque l’État, qui a réalisé 350 000 logements entre 1980 et 1989, en a créé 820 000 entre 2000 et 2009. Mais trop peu visible, parce que l’offre reste en deçà de la demande, par manque de foncier notamment. Le contexte reste donc très tendu socialement, et toute distribution de logements sociaux donne lieu à des confrontations, parfois extrêmement violentes. La bataille du logement est loin d’être terminée.
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